La présence française en Afrique ne se résume pas à Bolloré, Accor ou Orange. Avec son développement économique fulgurant et un climat des affaires stabilisé, le continent africain est devenu une terre propice pour les PME tricolores. Même si la Chine place ses pions.
Les opportunités en Afrique sont légion, le continent étant l’un des marchés les plus dynamiques au monde, et sa population va passer de 1,2 à 2 milliards d’habitants en 30 ans. L’Afrique bénéficie d’un autre atout majeur : le développement exponentiel d’une classe moyenne dont l’augmentation du pouvoir d’achat représente un immense potentiel économique. Contrairement aux clichés, de nombreuses entreprises françaises se sont exportées avec brio en Afrique, en dépit de l’implantation durable de groupes venus des pays émergents (Chine, Turquie, Inde, Russie, Brésil…). Les pays francophones comme le Cameroun, Sénégal, le Gabon ou la Côte d’Ivoire sont souvent privilégiés comme premier point d’entrée pour les entreprises françaises.
Tous les secteurs sont concernés
Fondé en 1965, le groupe Piriou (200 M€ de chiffre d’affaires) est un bel exemple. Cette PME s’est imposée en Afrique malgré la présence de géants étrangers qui domine son secteur, la construction et la réparation navale. La société originaire de Concarneau (Finistère) a su décrocher des contrats avec la Marine nationale française, mais aussi en Algérie ou au Vietnam. Piriou a également signé un contrat avec la marine sénégalaise pour la livraison de trois patrouilleurs lance-missiles. Dans le secteur des aliments thérapeutiques à destination des enfants des pays du Sud, Nutriset (114 M€ de chiffre d’affaires) a suivi un chemin similaire.
Le groupe basé en Seine-Maritime, à Malaunay, développe des produits pour lutter contre la malnutrition depuis 1986. Nutriset s’est notamment implanté au Kenya, en Ethiopie, en Guinée, au Niger, au Burkina Faso et au Nigeria. Spécialiste de la logistique et du transport de marchandises, l’entreprise marseillaise La Rhodanienne de Transit (15 M€ de CA) est présente à Madagascar, Djibouti, au Maghreb et dans l’Ouest de l’Afrique. Toujours à Marseille, CMR Group (60 M€ de CA) a également réalisé une implantation réussie en Afrique. Experte dans l’instrumentation, notamment dans les énergies renouvelables et les solutions d’efficacité énergétique, le groupe phocéen fondé il y a 60 ans a même lancé une filiale au Nigéria. Également originaire de Marseille, Seafoodia (180 M€ de CA), spécialiste de la distribution de produits de la mer, détient entre autres 10 % des parts du marché des morues salées séchées de l’Atlantique Nord vers les Caraïbes et l’Afrique de l’Ouest.
Une préférence pour les pays francophones
Basée à Boulogne-Billancourt, une autre PME s’est imposée sur son secteur. Il s’agit de Sacred (50 M€ de CA), qui développe des solutions dans le domaine du caoutchouc et du thermoplastique en milieu industriel. A Bordeaux, c’est Geosat qui fait forte impression. Après avoir levé 10 M€ en 2019, la pépite bordelaise continue de grandir pour « créer un géant français ou européen de la cartographie et des jumeaux numériques ». Elle est implantée au Mozambique et en Zambie. Spécialiste des études, topographie et lasergrammétrie pour les métiers de l’aménagement du territoire, Ecartip Fondasol travaille sur des chantiers dans une grande partie de l’Afrique (Afrique du Sud, Tanzanie, Tchad, Mozambique…). Une autre belle réussite du tissu entrepreneurial français. L’Afrique, principalement l’Afrique de l’Ouest (Mali, Burkina Faso, Guinée, Bénin…), c’est également le terrain de chasse d’Airwell, fabricant de solutions climatiques et thermiques depuis 1947.
De nombreuses PME industrielles brillent en Afrique
Eclairer l’Afrique, c’est l’objectif du fabricant de lampadaires Ragni (50 M€ de CA). Cette PME azuréenne presque centenaire, dont le siège social se situe à Cagnes-sur- Mer (Alpes-Maritimes), mise beaucoup sur son développement sur le continent africain, où elle est présente depuis une vingtaine d’années, notamment le Côte d’Ivoire. Beaucoup plus jeune, Dinactis (5 M€ de CA) est un fabricant d’installations dans le domaine de l’aéraulique en industrie. Pour soutenir sa croissance à deux chiffres, l’entreprise havraise va se lancer en Afrique francophone durant cette année 2021.
L’entreprise bretonne Technature (20 M€ de CA), spécialisée dans la conception et la réalisation de produits cosmétiques, va chercher en 2021 à gagner des parts de marché sur le continent africain, notamment en Afrique de l’Ouest. Dans le Centre-Val-de-Loire, c’est une autre PME qui a trouvé des débouchés en Afrique. Son nom : Vergnet Hydro (20 M€ de CA). Cette entreprise industrielle créée dans le Loiret qui intervient sur le marché de l’accès à l’eau en zone rurale réalise la totalité de son chiffre d’affaires à l’export en Afrique subsaharienne.
Franck Riester : « Pour nous, l’Afrique, c’est stratégique et prioritaire »
L’Afrique est un confettis composé de 54 pays aux situations très différentes. Mais ils ont un point commun : la plupart voient leur classe moyenne grandir rapidement. « Il s’agit d’une source essentielle pour la croissance du secteur privé – et au niveau national, pour la diversification des économies », juge Arnaud Floris, responsable régional pour l’Afrique de l’Ouest, du Centre et du Nord de Bpifrance. Certains secteurs regorgent de belles opportunités : l’agro-industrie, les transports, la construction routière ou encore l’accès à l’électricité.
« Des milliers d’entreprises réussissent à l’export en Afrique, estime Franck Riester, ministre délégué auprès du ministre de l’Europe et des Affaires étrangères, chargé du Commerce extérieur et de l’Attractivité. Notre économie ne peut rebondir et retrouver une forte prospérité qu’en se déployant à l’international, et notamment sur ce continent, du fait de notre histoire commune, de notre proximité et de ses potentialités. On a envie de s’y implanter dans une démarche gagnant-gagnant et inclusive. Pour nous, l’Afrique, c’est stratégique et prioritaire. »
Le contexte politique et économique, ainsi que le climat des affaires, s’étant grandement amélioré en Afrique, les conditions sont plus favorables à l’établissement des PME françaises. « De Rabat à Johannesburg, il est de moins en moins risqué de faire des affaires, détaille Arnaud Floris. Il y a une amélioration générale de la gouvernance, de la transparence, de la qualité des institutions et de l’état de droit dans de nombreux pays. Les gouvernements sont de plus en plus compétents et plus orientés vers le secteur privé. » Enfin, le Covid-19, qui a mis à genou les économies occidentales, a moins impacté le continent africain. Voici une autre raison de se lancer. D’autant que la reprise économique sera plus soutenue et plus rapide en Afrique, et ce quelque soit le secteur.