Ne pas oublier le passé pour mieux imaginer l’avenir, c’est la philosophie du groupe Bel, devenu un fleuron de l’industrie agroalimentaire française à l’international. Dernier coup de maître de la fromagerie du Jura : se lancer avec succès dans le végétal.
Le Jura et le merveilleux fromage de Comté font bon ménage. C’est ce que devait penser Jules Bel, dans son commerce d’affinage et de négoce de ce fromage en plein Jura à la fin du XIXe siècle.
Jules, Léon et tous les autres
Son fils Léon reprend l’affaire en 1904 et va développer une idée, qui va s’avérer fabuleuse. Après-guerre, il voit que la consommation du fromage augmente rapidement et décide de fabriquer un fromage pratique, peu encombrant, qui se conserve aisément. Les Fromageries Bel voient le jour en 1922 pour produire ce nouveau fromage fondu porté sur les fonts baptismaux sous le nom de Vache qui rit®. L’idée est belle, le concept très au point : une recette élaborée avec soin, des machines permettant de fractionner, une présentation en portions individuelles sous forme de triangle, l’apport de l’illustrateur Benjamin Rabier qui finalise un produit, devenu une légende du secteur de l’agroalimentaire.
L’histoire d’un succès
Depuis 1924, le succès ne se dément pas et la saga continue. La famille reste présente aux rênes de l’entreprise, allant de l’avant à force d’innovations internes, et de croissance externe. L’idée a beau s’être s’avérée géniale, s’endormir sur ses lauriers peut être fatal. Le petit fromage fondu est donc parti à la conquête du monde et se fabrique jusqu’en Asie tout comme un autre produit phare, le mini-Babybel® produit aux Etats-Unis depuis six ans pour ce marché. A l’est comme à l’ouest, ces prises de marché à l’international ne sont que le prolongement d’une direction donnée par Léon Bel qui s’imposait de par les caractéristiques du produit. L’industriel avait déjà installé des usines en Europe dès les années 30. Aujourd’hui, le marché français ne représente d’ailleurs que 20% du chiffre d’affaires sur une gamme de produits de plus en plus large. Le succès de ce fromage déjà ancien doit aussi beaucoup à sa communication, résolument moderne et qui ne se prend pas au sérieux.
Bel voit l’avenir en vert
Antoine Fiévet, le PDG actuel a fait une annonce ces dernières semaines qui prouve que le groupe fromager reste toujours à la pointe des tendances de consommation. Si la croissance future du groupe doit continuer à s’asseoir sur la rentabilité, elle reposera également sur une transformation en profondeur, durable, dans le souci d’une alimentation saine et éco-responsable. Un placement de 125 millions d’euros a été réalisé pour étayer cette stratégie en faveur de filières de production laitière durables respectueuses des « bonnes pratiques », selon le terme consacré, en matière de bien-être animal et de prix d’achat. En parallèle, le biologique poursuit son essor et se décline sur les produits du groupe. Une nouvelle marque est née, une première depuis des années, le Fromage de Margot® est bio, met en avant des bêtes en pâturage, nourries sans OGM. Le groupe fait également un travail en profondeur pour réduire sel, matières grasses, et s’autorise de nouveaux ingrédients.
Une révolution : l’innovation par le végétal
Pour prouver son implication, la direction n’hésite pas à impliquer ses produits emblématiques. Le groupe teste ainsi des recettes de Vache qui rit, moitié lait, moitié végétales. Des résultats de cette démarche dépendra la généralisation du concept, qui pourrait même se décliner avec des références au lait d’amande pour les vegans. La transformation de la Fromagerie Bel est profond, la R&D travaille sur chaque recette, sa teneur en sel, arômes, colorants, dosant vitamines et apports en fonction des marchés. La démarche s’est déjà élargie aux emballages, biodégradables ou recyclables avec un objectif ambitieux pour 2025 : la neutralité carbone. E.S.