Entrepreneur emblématique, s’il en est, Alain Afflelou lâche les rênes au profit de son fils Anthony, cinquante ans après l’ouverture du premier magasin d’optique à Bordeaux.
À 31 ans, vous voici nommé à direction générale, vous travaillez dans l’entreprise fondée par votre père depuis 2015, était-ce dès le départ une évidence ?
Anthony Afflelou : Plus jeune, il n’était pas évident pour moi de travailler dans l’entreprise. C’est lorsque j’ai commencé à travailler à Madrid dans des magasins Alain Afflelou qu’il s’est produit un déclic, un véritable intérêt ainsi qu’une fierté à travailler dans l’entreprise familiale. J’ai eu différentes opportunités qui m’ont permis d’occuper des postes différents, et je me suis passionné pour ce secteur. À partir de ce moment-là, je me suis vraiment vu continuer dans l’entreprise, mais rien n’était écrit, car nous sommes détenus par un fonds d’investissement à 70%. Il n’était donc pas du tout évident que j’occupe un jour la direction générale.
Quelle est la place d’Afflelou sur le marché français de l’optique ?
Nous sommes le troisième acteur en part de marché, mais nous avons la moyenne de chiffre d’affaires/magasin la plus élevée. Nous avons 780 magasins en France dont 703 en franchise, le reste en succursale, la franchise a été créée dès 1978. Le concept Alain Affelou Acousticien a démarré en 2011 avec aujourd’hui 350 centres audio. Parmi ceux-ci, 100 centres exclusifs et 250 espaces audio intégrés dans des magasins d’optique, où la synergie est évidente. 100% des malentendants sont également des personnes ayant besoin de lunettes. Les perspectives sur ce segment sont énormes.
La communication a toujours été un point fort chez Afflelou…
Nous avons été un pionnier. Dans les années 80, le secteur était assez médicalisé, sans publicité. Chez Afflelou, on a tou-jours considéré que le faire savoir est tout aussi important que le savoir-faire, ceci est dans l’ADN de l’entreprise. Donc, si on pense avoir une bonne idée, une nouvelle solution à un problème, il convient de le faire savoir haut et fort. C’est ce que nous faisons aujourd’hui, avec de l’humour, de façon moderne, joyeuse, afin de présenter une innovation ou un produit.
C’est ce que vous avez pu voir avec notre campagne de rentrée, Magic. Grâce aux Magic clips, il est possible de transformer ses lunettes pour se protéger du soleil ou tout simplement changer de look. Nous passons donc à une communication plus universelle qui concerne 100% des porteurs de lunettes.
Quels sont vos projets en matière digitale ?
C’est un élément clé, dans lequel nous intégrons des notions différentes. Il existe deux piliers forts chez nous : le digital doit nous permettre de varier nos manières de communiquer, c’est un vrai d’huile de ricin biodégradable, 100% de nos magasins collectent les anciennes lunettes et lentilles ramenées par les clients, et nous recyclons les emballages lentilles usagées. Notre collection H2O est fabriquée à partir de bouteilles recyclées (1 monture : 5 bouteilles recyclées), tous les verres de démonstration sont biodégradables, nous avons mutualisé notre logistique, etc. Le RSE est au cœur de nos préoccupations.
Quid de vos intentions en matière de stratégie internationale ?
En dehors de la France, l’Espagne est le vecteur principal, avec 350 magasins. Ensuite, nous sommes présents dans 19 pays, en Afrique du Nord, Algérie et Maroc, avec un développement au Koweït via un master franchisé… Mais une grande partie de notre business se fait en Europe, où nous avons déjà une cinquantaine magasins en Belgique, une vingtaine en Suisse et une trentaine au Portugal.
Vous allez diriger en partie en famille, Laurent Afflelou est directeur du développement et Lionel Afflelou, Directeur des produits, est-ce un plus pour le management ?
C’est évidemment un plus, j’ai grandi dans la maison via différents postes, j’ai travaillé avec mes frères, tout s’est très bien passé. Pouvoir compter sur eux sur des secteurs stratégiques est important. Nous avons reçu une bonne éducation, nous entretenons des relations sincères et sommes très soudés, c’est le principal. Par exemple, nous mettons en place avec la collection Magic une nouvelle façon de travailler le produit.
Sur les collections Afflelou, nous voulons des produits innovants et exclusifs, et pour y parvenir, nous avons verticalisé notre fabrication. L’idée n’est pas de devenir 100% verticalisé bien entendu, car travailler avec toutes les marques est important pour notre in-dépendance en tant qu’entreprise.
En dehors de votre père, certains managers vous inspirent-ils ?
D’un point de vue interne, au fil de mes prises de responsabilité, j’ai rencontré des managers qui m’ont beaucoup appris. Sinon, globalement, je dirais qu’Elon Musk arrive à nous projeter dans une vision loufoque à laquelle tout le monde a l’air d’y croire de plus en plus. Le « déjanté » se concrétise. C’est un visionnaire doublé d’un entrepreneur.
Anne Florin