Je m'abonne

« Après l’aide de l’État, l’industrie doit accélérer sa transformation digitale »


Par Jean-Baptiste Clouard, co-fondateur de Flowlity Tribune. À l’heure où les pénuries de matières premières se généralisent jusqu’à impacter directement les consommateurs, un sentiment d’impuissance se propage dans l’industrie face à l’ampleur de ce phénomène. Pour y remédier, l’État se dit toutefois prêt à soutenir l’économie en atténuant les effets...

Entreprendre - « Après l’aide de l’État, l’industrie doit accélérer sa transformation digitale »

Par Jean-Baptiste Clouard, co-fondateur de Flowlity

Tribune. À l’heure où les pénuries de matières premières se généralisent jusqu’à impacter directement les consommateurs, un sentiment d’impuissance se propage dans l’industrie face à l’ampleur de ce phénomène. Pour y remédier, l’État se dit toutefois prêt à soutenir l’économie en atténuant les effets de l’inflation causée par ces difficultés d’approvisionnement. Cependant, dans une économie mondialisée et interconnectée, est-ce bien là une façon de lutter efficacement contre cette problématique macroéconomique ? Certes, l’influence de l’État peut être salutaire dans une certaine mesure, mais elle sera loin d’être suffisante pour résorber durablement cette tension qui pèse sur les chaînes logistiques.

Dommage collatéral de la crise sanitaire, l’industrie a dû faire face à une inflation importante des matières premières. Acier, composants électroniques, PVC, verre, les prix de ces matériaux ont flambé ces derniers mois pour aboutir à un risque de pénurie et de rupture de stock généralisé. BTP, industrie métallurgique et automobile, et bien d’autres, sont autant de secteurs touchés par cette tension d’approvisionnement. Alors que l’économie est à un point de bascule pour amorcer la relance après une crise sanitaire sans précédent, cette situation ne doit pas devenir un point de non retour pour les PME les plus fragilisées.

Conscient de la situation, l’État français est bien décidé à mettre en place une série de mesures pour atténuer les effets de ces pénuries. Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée chargée de l’Industrie, a annoncé vouloir faciliter l’acheminement des conteneurs pour maintenir les industriels français en tête de liste sur les carnets d’ordres étrangers. Elle a également appelé les entreprises à faire preuve d’indulgence auprès de leurs fournisseurs en prenant en compte cette problématique qui les dépasse complètement. Autre levier plus long-termiste, la relocalisation. Depuis septembre 2020, l’État a financé 273 projets de relocalisation dans des secteurs critiques tels que la santé, l’électronique et les intrants essentiels de l’industrie.

Toutefois, dans une économie mondialisée, la question de l’approvisionnement dépend d’une multitude de facteurs interconnectés et la moindre perturbation peut avoir un effet boule de neige. Dès lors, il devient compliqué d’intervenir à la seule échelle étatique sans chercher à fluidifier la supply chain dans son ensemble.

La France, un mauvais élève en matière de digitalisation

Pour atténuer ces tensions sur la chaîne d’approvisionnement, il est nécessaire de mettre en place des outils de communication et de collaboration pour permettre aux entreprises de s’adapter aux moindres fluctuations. Aujourd’hui, le progrès technologique et la numérisation des outils de suivi offrent cette possibilité grâce à un partage d’informations en temps réel. Avec une telle configuration, grâce à une vision d’ensemble de la chaîne d’approvisionnement, les entreprises ont la possibilité d’anticiper la moindre perturbation et de fiabiliser leurs prévisions auprès de leurs fournisseurs.

Cependant, beaucoup d’acteurs se reposent encore sur des tableurs Excel pour suivre leur stocks, sans communiquer à leur partenaires (fournisseurs ou clients). Selon le rapport “The Digital Economy and Society Index (DESI)” publié en 2019, la France fait partie des mauvais élèves en matière de digitalisation comparée à ses voisins européens, elle est située en 16ème position en matière de transformation digitale sur les 28 pays membres. Il s’agit donc d’offrir aux entreprises les moyens d’entamer cette transition numérique afin que la mondialisation des marchés d’approvisionnement (même si elle doit rester résiduelle) ne devienne plus une source de crispation.

L’État, dans sa volonté d’épauler les industries dans cette épreuve, doit aussi prendre en considération cette dimension technique en les accompagnant dans cette transition. Car si ces processus anachroniques n’évoluent pas au sein des entreprises, à mesure que la chaîne d’approvisionnement se complexifie, ces situations de pénuries risquent bien de se reproduire à la moindre perturbation. Crise sanitaire, canal de Suez bloqué par un porte-conteneurs, les exemples récents ne manquent pas, il est urgent de moderniser et digitaliser nos chaînes d’approvisionnement.

À voir aussi