Implantations aux USA, contrats géants, nouvelle marque Deauville, rien n’arrête Armor-Lux, le roi du pull breton !
« Je suis un Breton de la pointe du Raz… le bout du bout de la Bretagne ! Après, il n’y a rien, que l’océan. Cela nous forge un caractère particulier. Nous sommes travailleurs et attachés à nos racines», affirme Jean- Guy Le Floch pour justifier la réussite de l’entreprise textile dont il est le président, rachetée en 1993 pour 30 millions de francs (environ 6 M€) avec son associé et ami d’enfance Michel Gueguen, directeur général. à écouter cet entrepreneur passionné de 61 ans, ex directeur général de Vincent Bolloré, l’air et le dynamisme bretons y seraient donc pour beaucoup dans la forte croissance de la PME textile quimpéroise : de 18 M€ en 1993, son CA est passé à 95 M€ en 2014.
En 7 decennies d’existence, Armor-Lux, petite bonneterie armoricaine créée par un Suisse, Walter Hubacher, en 1938, est ainsi devenue une référence avec ses marinières et ses nombreuses collections. 5 millions d’articles siglés Armor-Lux s’écoulent ainsi chaque année dans la soixantaine de boutiques, un vrai symbole du made in France.
Armor-Lux : l’international en ligne de mire
A l’exception d’une boutique à New York, la marque est distribuée à l’international, notamment en Europe (Espagne, Allemagne, Belgique, Luxembourg, Suisse, Angleterre, Scandinavie…), en Amérique du Nord (États-Unis, Canada) et en Asie (Japon, Corée du Sud).
« La France reste un marché porteur. Ici, tout le monde connaît Armor-Lux, c’est une marque de référence. Nous allons donc continuer à développer notre savoir-faire, acquis grâce à l’énergie bretonne», plaisante Jean-Guy Le Floch. « Mais depuis la nouvelle orientation du dollar, qui nous est très favorable, nous mettons le paquet sur l’Amérique du Nord, avec de grandes perspectives sur ce marché. Pour l’instant, nous réalisons environ 10 M€ de CA à l’export. Notre objectif sous 2-3 ans est de tripler ce chiffre pour atteindre 30 M€ . Pour cela, nous avons beaucoup recruté. Alors que notre priorité a été pendant des années les grands marchés nationaux, notre ambition est désormais de faire d’Armor-Lux une marque internationale».
Armor-Lux : un créeau lucratif
Depuis plus de 10 ans, Armor- Lux occupe en effet un créneau lucratif, la PME habillant les grandes entreprises nationales françaises comme La Poste (depuis 2004), la SNCF (depuis 2007) ou, plus récemment, Carrefour pour ses métiers de bouche.
« C’est partie d’une histoire simple ! à la fin des années 90, face à la mondialisation galopante, nous avions besoin de faire tourner nos usines en proposant de nouveaux produits. Nous avons alors cherché à identifier de nouveaux besoins. C’est ainsi que nous avons signé avec La Poste pour la fourniture de milliers de chemises et tee-shirts chaque année. Les grands mouvements d’externalisation ont suivi. Grâce à ces nouveaux partenariats, environ 40% de notre CA, nous avons pu alimenter nos usines, détaille le Breton . La plupart des vêtements pros ne sont pourtant pas fabriqués à Quimper mais au Maroc, en Tunisie, en Bulgarie, en Roumanie et en Inde. Armor-Lux cherche toujours à séduire «d’autres grands groupes français».
Armor-Lux : 720.000 vêtements dans 20 pays européens
La marque vient d’ailleurs de signer un contrat de 3 ans avec GeoPost, filiale Express du groupe La Poste. Entre mars et juin 2015, plus de 720.000 vêtements seront livrés dans 20 pays européens. De quoi sécuriser l’emploi de toutes les petites mains qui travaillent pour Armor-Lux !
Armor-Lux : un ancrage breton essentiel
Si la Bretagne reste bien la colonne vertébrale de ce fleuron textile, c’est que sans cette terre promise, jamais Jean-Guy Le Floch n’aurait mis les pieds dans l’entreprise. « En 1993, j’habitais Paris. Et à 40 ans, je ne voulais pas y finir ma carrière ni y passer ma retraite. Je souhaitais rentrer en Bretagne», raconte cet ancien dirigeant du groupe Bolloré (il en a été le directeur financier puis le directeur général). « Surtout, je voulais être mon propre patron. Armor-Lux, une marque d’une extrême qualité, 100% bretonne, était à vendre alors je me suis lancé… La Bretagne est un pays soudé, avec une vraie solidarité. Ici, on se bat tous ensemble. Lorsque j’ai repris l’entreprise, il était très important pour moi de préserver les emplois».
Jean-Guy Le Floch décentralise toutefois une partie de sa production, jusqu’ici intégralement basée à Quimper. Mais pas question pour lui de parler de délocalisation ! La problématique est toute autre : « Depuis mon arrivée, le CA a été multiplié par 5 ! Nous n’avons pas délocalisé, nous avons simplement organisé notre croissance pour faire face à la concurrence des pays à bas coûts. Notre implantation à Quimper ne suffisait plus à absorber toute notre activité. Et il était impossible d’assurer toute la production en Bretagne. Nous nous sommes donc étendus sur d’autres zones d’activité éthiques : le Maroc, la Tunisie et la Bulgarie», détaille-t-il.
Éthique et qualité
L’éthique, le cheval de bataille d’Armor-Lux. « Pour nos créations, nos stylistes rédigent tous les 6 mois des cahiers des charges précis, dans lesquels on retrouve toujours un attachement féroce à 2 valeurs : la qualité et l’éthique. Cela concerne particulièrement la part de notre fabrication réalisée à l’étranger : nous sommes extrêmement exigeants en ce qui concerne les conditions de travail et les effets sur l’environnement, tout en étant très attentifs à la qualité des produits. Il faut qu’ils aient la même qualité que ceux fabriqués à Quimper», rappelle ainsi Jean-Guy Le Floch.
Pour lui, c’est ce qui fait la plus-value de son entreprise par rapport à ses concurrents : « La marque a été fondée par un Suisse fou de qualité. C’est pourquoi nous avons notre propre laboratoire accrédité pour vérifier la qualité de tous nos produits. C’est essentiel ! Nous sommes l’une des seules marques en France à avoir notre propre labo. Nous avons également été les premiers dans le textile à nous lancer dans le développement durable, dès les années 2000. Nous sommes aussi le premier distributeur de coton équitable en France, porteur du label Max Havelaar, avec un contrat signé dès 2005 ! Et nous sommes très fiers», sourit Jean-Guy Le Floch. « Parmi nos atouts, le fait d’être breton est également un puits de culture inépuisable, une véritable source d’inspiration pour nos clients», rappelle celui pour qui ce territoire reste un sujet de conversation favori.
« Notre histoire, notre terroir plaît beaucoup. D’ailleurs, ce n’est pas un hasard si la collection qui fonctionne le mieux s’appelle “Héritage” . Ce côté “racines” plaît à nos clients à la recherche d’authenticité face aux difficultés du moment», estime le président d’Armor-Lux, fier de ses vêtements qui s’adressent à tous les âges, des enfants aux seniors. « Notre marque, universelle, habille tout le monde. Dans notre grande boutique de Quimper, les gens viennent en famille».
L’usine Armor-Lux installée depuis une décennie à l’Quimper
Une fierté pour les 350 salariés qui travaillent au quotidien dans l’usine Armor-Lux installée depuis une décennie à l’entrée principale de Quimper, la ville chère à son ami Jean-François Garrec, l’actif président de la CCI. Mais un casse-tête pour les stylistes qui imaginent les nouveaux modèles, « un véritable travail de création », indique le patron qui vient de signer avec Deauville, la station balnéaire la plus huppée de Normandie, pour la création d’une ligne de vêtements.
« Deauville est une très belle marque. Particulièrement pour conquérir des marchés étrangers». Une pierre aussi dans le jardin de son concurrent, le normand St James ! Entre le Festival du cinéma américain, les courses hippiques… la collection « Deauville par Armor-lux» devrait bientôt rayonner à l’international. « La marque Deauville est une arme pour conquérir les marchés américains, japonais et moyenorientaux », se réjouit l’entrepreneur breton, peu pressé de passer la barre, même si plusieurs de ses enfants travaillent désormais dans l’entreprise familiale. »
Montebourg, bonnets rouges : les bons coups de pubs
Le 19 octobre 2012, Arnaud Montebourg pose en Une du Parisien Magazine en marinière Armor-Lux. Un coup de pub incroyable pour la marque, dont Jean-Guy Le Floch garde un souvenir doux-amer : «L’affaire a été montée sans que nous soyons informés… Nous avons donc subi… Cela nous a apporté de la visibilité, la marque a eu soudainement beaucoup plus de travail, les gens ont appris qu’il y avait une usine à Quimper», raconte, souriant, l’entrepreneur.
D’ailleurs, le modèle porté par Montebourg représente ainsi 90% des ventes de marinière de la marque ! Quasiment 1 an plus tard, Armor-Lux fait de nouveau les gros titres : le Mouvement des Bonnets rouges, qui s’oppose à l’éco-taxe en Bretagne, sollicite l’enseigne pour obtenir les fameux bonnets. Jean-Guy Le Floch assume : «Pour moi, c’était un acte de solidarité. Nous étions concernés par l’éco-taxe : notre matière première arrive par la route. Si cette taxe était appliquée, notre coton aurait été payé deux fois, à l’aller et au retour. Pour les bonnets rouges, j’ai été sollicité par des amis et je leur ai donné. C’était normal». Ce sont ainsi des milliers de bonnets rouges «Tréguier» d’Armor-Lux qui sont arborés pendant les manifestations d’octobre et novembre 2013. Une belle leçon de placement de produits !