L’arrivée de Benoît Romac aux commandes de Porsche Consulting France lui permet de combiner son métier de conseil et sa passion pour le sport automobile.
Pourquoi avoir accepté ce nouveau challenge ?
Benoît Romac : Ma décision s’est faite avant tout sur la base d’une gestion de carrière et d’une opportunité professionnelle. Ce nouveau job avec Porsche, c’est clairement et avant tout l’opportunité de mettre à profit l’expérience que j’ai acquise précédemment dans des fonctions préalables dans le conseil et le secteur automobile, dans le cadre d’un projet intrapreneurial avec le support d’un grand groupe, qui s’appuie sur le succès d’une marque fantastique, qui dans le monde du conseil est fortement différenciante. Le fait d’être en plus passionné par la marque et de pratiquer assidument cette passion dans le cadre de courses automobiles, c’est un peu la cerise sur le gâteau !
Quelle est la spécificité de Porsche Consulting France dans une structure de conseil de 670 professionnels œuvrant dans 12 bureaux à travers le monde ?
B.R. : Notre spécificité est très claire. Nous sommes le seul cabinet de conseil qui soit filiale d’un grand groupe automobile et en capacité de fournir à des clients externes tout le savoir-faire de ce constructeur, en l’occurrence Porsche, qui est probablement le constructeur automobile le plus performant et le plus rentable au monde. Souvent, le secteur automobile est cité comme une référence dans le monde industriel, parce que c’est une industrie extrêmement structurée, compétitive et innovante. Toutes les méthodes de travail, les process, les outils qui sont développés dans le monde automobile intéressent beaucoup les autres secteurs industriels. Avec Porsche Consulting, nous apportons ces savoir-faire du monde automobile à nos clients, au sein d’un constructeur qui est considéré comme un Benchmark dans un secteur industriel qui est lui-même un Benchmark.
Peut-on réellement appliquer les recettes du succès de cette marque emblématique à tous les secteurs industriels ?
B.R. : Cette question nous est souvent posée par nos clients. Il y a plusieurs facteurs qui me permettent de vous répondre positivement. Le premier facteur, c’est le fait que le secteur automobile aujourd’hui est très différent de ce qu’il était il y a 10 ans. Un constructeur, ce n’est plus seulement une société qui développe, produit et vend des voitures. C’est une entreprise qui développe un nouveau business-modèle, de nouveaux services autour de la mobilité. C’est aussi une entreprise qui a dû faire face à des disruptions règlementaires extrêmement violentes (notamment sur les émissions, ce qui a fait émerger rapidement les véhicules électriques) et qui a donc dû se transformer en profondeur.
Le 2e facteur est spécifique à Porsche, car ce n’est pas un constructeur de volume comme Toyota ou Renault. C’est un constructeur qui mixe à la fois du très haut de gamme produit en très faible nombre d’unités (comme le 918 Spyder ou la Carrera GT) et en même temps des milliers d’unités de taille moyenne (le Cayenne ou le Macan), soit à peu près 280 000 voitures vendues dans le monde. Par rapport à d’autres secteurs industriels, les caractéristiques intrinsèques du système industriel créé par Porsche nous permettent beaucoup plus de flexibilité, puisque toute Porsche qui est produite et configurée est unique.
Cette méthode est donc très intéressante à appliquer dans d’autres secteurs comme le spatial notamment. Le 3e facteur, c’est qu’on a intégré de manière spécifique beaucoup d’automatisations qui ont du sens dans nos processus, quasiment dans une logique de production continue, ce qui est également intéressant pour d’autres secteurs économiques. D’où l’intérêt de la méthode Porsche pour d’autres secteurs industriels.
La pandémie a-t-elle compliqué et impacté vos activités ?
B.R. : Effectivement, le timing n’était pas voulu, puisque j’ai signé mon contrat fin 2019 et suis devenu CEO en janvier 2020, avec une feuille blanche et donc tout à faire. Quand la pandémie est arrivée trois mois plus tard, c’était évidemment compliqué, puisque dans l’activité de conseil, il se passe en général entre 6 et 9 mois entre le premier contact et le moment où le premier projet va démarrer. On a pu constater dans notre métier que toutes les missions des cabinets qui étaient en cours ont été prolongées et maintenues. En revanche, tous les projets nouveaux ont été stoppés.
Chez Porsche Consulting, notre activité a donc vraiment démarré en septembre 2020, mais de façon très forte, puisqu’en 2021, nous avons clôturé notre premier exercice en dépassant tous nos objectifs en termes de croissance, et les perspectives pour l’année à venir sont très positives, avec une équipe pour qui est déjà de 20 personnes. Nous venons d’ailleurs d’installer nos bureaux à Paris dans le 16e arrondissement, à côté de la place du Trocadéro.
Votre méthode privilégie donc l’humain également ?
B.R. : C’est en effet aussi ce qui caractérise la méthode Porsche. Voici une entreprise familiale mais aussi un champion qui pèse aujourd’hui plus d’un milliard de chiffre d’affaires mais qui a démarré dans un garage dans les années 50, avec un pionnier, Ferdinand Porsche, qui a lancé son activité en disant : « j’ai regardé autour de moi les voitures qui existaient, je n’en ai pas vu une qui correspondait à ce que j’avais envie de faire, donc je l’ai créée moi-même. » Il a fait de sa vision initiale un rêve international qui continue de perdurer avec plein d’innovations technologiques, mais ce qui est remarquable, c’est que le concept initial est toujours présent.
Porsche est une entreprise très innovante, mais c’est aussi une entreprise qui s’appuie sur ses employés qui stimulent en permanence sa performance, avec un esprit de famille très fort et des valeurs entrepreneuriales très fortes également. Et c’est cet état d’esprit que l’on apporte aussi à nos clients. On souhaite avant tout que notre intervention soit pérenne et qu’on devienne non-indispensable le plus vite possible, en mettant nos clients en capacité d’acquérir en interne nos savoir-faire par le transfert de compétences entre nos équipes et les leurs. On s’appuie sur les talents et les compétences de nos clients pour les mettre en capacité de performer, en les aidant à acquérir les méthodes Porsche.
Made in France, réindustrialisation, relocalisations, sont aussi des mantras pour Porsche Consulting ?
B.R. : Oui, puisque Porsche est une entreprise dont l’ensemble des activités industrielle est toujours présente en Europe. La 911, le 710, le Macan, ce sont des véhicules qui sont produits à Zuffenhausen. Le savoir-faire d’ingénierie et de production réside surtout en Allemagne, même si l’on a également une plateforme d’assemblage en Europe de l’Est. Cette entreprise partie de rien est devenue un champion industriel européen qui prouve qu’on peut être performant en gardant des activités industrielles fortes en Europe. Cependant, pour nous, réindustrialiser l’Europe n’est pas une fin en soi lorsqu’on conseille une entreprise. Ce qu’on va chercher à faire, c’est lui fournir la solution la plus adaptée dans son marché, dans son environnement et les circonstances qu’elle traverse à l’instant T.
On cherche avant tout à apporter les bonnes réponses à nos clients. Ceci dit, le contexte industriel est très différent aujourd’hui, les écarts de coûts de production entre la Chine et la France se sont réduits, la productivité française est également très intéressante. Les risques d’approvisionnement deviennent de plus en plus importants et rentrent en compte également. Quand à la responsabilité sociétale et environnementale, elle est particulièrement clé dans le secteur automobile. On a, là aussi, un temps d’avance par rapport à bien d’autres secteurs industriels.
Sur toutes ces thématiques, notre vitesse d’analyse donne un temps d’avance à nos clients. Porsche vient encore de le prouver, en matière d’innovation avec le Taycan électrique, meilleure voiture de l’année. Dès que Porsche lance quelque chose, ça marche, cela devient immédiatement une référence.
Propos recueillis par Valérie Loctin