Une décision technique en apparence, mais explosive dans les faits. Désormais, les indépendants et auto-entrepreneurs devront facturer la TVA dès 25 000 € de chiffre d’affaires annuel, contre 37 500 € auparavant. Une claque pour 200 000 petites structures, qui voient leur modèle économique remis en cause. Officiellement, il s’agit de rétablir une forme d’équité entre entrepreneurs, mais sur le terrain, la pilule passe mal.
Une réforme sous tension
Le principe est simple : la TVA est un impôt indirect sur la consommation. Les entreprises la collectent pour l’État. Jusqu’ici, les petites structures en étaient exonérées sous un certain seuil. Ce seuil va donc être abaissé, et avec lui, l’obligation pour de nombreux auto-entrepreneurs de collecter cette taxe. Résultat : leurs prestations vont mécaniquement coûter plus cher, à moins qu’ils ne décident d’absorber le choc dans leur marge.
Le ministère des Comptes publics assume. La mesure rapportera 400 millions d’euros et mettra fin à ce que Bercy qualifie de « distorsion de concurrence ». En clair, les micro-entrepreneurs bénéficiaient jusqu’ici d’un avantage fiscal par rapport aux petites entreprises soumises à la TVA. Mais sur le terrain, l’argument ne convainc pas.
Des indépendants sous pression
Les premiers concernés sont nombreux : consultants, prestataires informatiques, artisans, professionnels du bien-être, professions libérales… Tous ceux qui flirtent avec le seuil fatidique risquent d’y laisser des plumes. Certains se retrouvent face à un dilemme : répercuter la TVA sur leurs tarifs et risquer de perdre des clients, ou absorber le coût et voir leur marge fondre.
Les syndicats d’indépendants montent au créneau. L’Union des auto-entrepreneurs (UAE) fustige une « usine à gaz qui va pénaliser les plus précaires ». La CPME, de son côté, parle d’un « signal désastreux » envoyé aux petits entrepreneurs. Le Syndicat des indépendants et des TPE (SDI) enfonce le clou : cette réforme, couplée à d’autres hausses de charges, alourdit encore le poids fiscal des petits acteurs économiques.
Un impact direct sur les consommateurs
Si les indépendants trinquent, les consommateurs ne seront pas en reste. L’ajout de 20 % de TVA sur des prestations qui en étaient jusqu’ici exonérées risque d’alourdir la facture pour les clients. Un consultant qui facturait 100 € devra désormais afficher un tarif de 120 € s’il répercute intégralement la TVA. Problème : tous les clients ne pourront pas récupérer cette TVA, notamment les particuliers et certaines associations.
Une réforme sous le feu des critiques
Derrière cette décision, une logique budgétaire implacable. La France cherche des recettes. Mais à quel prix ? Le taux de prélèvements obligatoires atteindra 43,4 % du PIB en 2025, un record. Et la grogne monte. Car cette réforme s’ajoute à d’autres coups de rabot : hausse des cotisations, réduction des aides à l’apprentissage, hausse du coût des complémentaires santé.
Le gouvernement assume, mais les micro-entrepreneurs, eux, encaissent. Et beaucoup redoutent un effet pervers : certains pourraient être tentés de limiter volontairement leur chiffre d’affaires pour rester sous le seuil des 25 000 €.