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Cécile Limal (Mobilis Pro) : « La voix fait partie des données sensibles du RGPD »


Cécile Limal, CEO de Mobilis Pro, ingénieur et chanteuse lyrique, gère deux plateformes qui interviennent dans le secteur du doublage. À la fois en amont, via une solution juridique de mise en conformité des bases de données audio, mais également en aval via un outil de casting.

Entreprendre - Cécile Limal (Mobilis Pro) : « La voix fait partie des données sensibles du RGPD »

Cécile Limal, CEO de Mobilis Pro, ingénieur et chanteuse lyrique, gère deux plateformes qui interviennent dans le secteur du doublage. À la fois en amont, via une solution juridique de mise en conformité des bases de données audio, mais également en aval via un outil de casting.

Vous intervenez sur un secteur un peu particulier…

En effet, Mobilis Pro, créée en 2014 par des professionnels de l’audiovisuel et du doublage, s’occupe de la voix. C’est un marché de niche, mais très transversal, qui touche un grand nombre d’activités : le cinéma, le broadcast, les jeux vidéo, la publicité, l’animation ou le documentaire pour ne citer qu’eux.

Quelles sont les plateformes que vous avez développées ?

Il y a tout d’abord Voxing Pro qui met en relation les comédiens et les producteurs via un outil de casting ultra précis. Cette solution de casting/booking référence près de 1 400 voix pour plus de 700 producteurs. Pour 75 % en langue française, le solde se répartissant entre l’allemand, l’anglais et les pays latins. Nous nous assurons de la qualité et de l’expérience de chaque comédien.

Je crois aussi que vous avez créé une plateforme à vocation juridique ?

Exactement ! Baptisée Mediartis, cette dernière répond aux besoins de conformité RGPD [règlement général sur la protection des données] de l’Industrie Audiovisuelle. Vous le savez, les différents intermédiaires stockent des extraits de voix pour leurs futurs castings, puis les partagent à leurs clients, qui les repartagent, etc. Or il s’agit de données biométriques, donc sensibles.

Comment intervenez-vous exactement ?

Nous avons mis en place un outil Saas qui automatise la recherche du consentement légal des comédiens. Car il faut savoir que ce consentement doit être renouvelé tous les deux ans et à chaque modification. Lorsque vous avez une base de 2 000 comédiens et devez passer 1h30 par an et par comédien pour bien faire les choses, vous imaginez vite combien peuvent être chronophages ces démarches.

D’autant qu’il faut éviter les accidents ?

C’est tout à fait cela. La voix, comme toute donnée personnelle, ne doit pas se balader sans surveillance sur le net. Notre solution, implantée dans le cloud, permet à toutes les parties prenantes, agents, studios, directeurs artistiques ou encore producteurs, de repartager les voix sélectionnées et conformes au RGPD, sans risquer de faire fuiter les données qui pourront ainsi circuler dans une boucle totalement imperméable. Cela sécurise les sous-traitants et les clients.

C’est un sujet sensible ?

Particulièrement pour les clients. Si fuite il y a, ou défaut de consentement des comédiens, la loi prévoit une coresponsabilité partagée entre les clients et leurs sous-traitants. Et dans ce cas, l’amende peut aller jusqu’à 4 % du chiffre d’affaires mondial. Imaginez l’impact financier et en termes d’image pour les grands groupes du broadcast, du cinéma ou du jeu vidéo.

Comment parvenez-vous à évangéliser sur les bonnes pratiques ?

Nous avons réussi à sensibiliser la principale association américaine de localisation EGA dont font partie les grandes majors américaines du cinéma et du Broadcast. Mais aussi la Ficam, représentant en France les intérêts des industries du cinéma, de l’audiovisuel et du multimédia. Elles alertent maintenant leurs membres de cette évolution règlementaire. Je m’attends à ce que les majors réagissent avec fermeté une fois qu’elles auront mesuré les risques encourus si leurs sous-traitants n’ont pas fait évoluer leurs process.

A.R.

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