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Ces entreprises familiales qui durent  


En France, plus de 80% des entreprises sont familiales. Quel est le secret de ces PME qui portent la croissance française à bout de bras ?

Entreprendre - Ces entreprises familiales qui durent  

En France, plus de 80% des entreprises sont familiales. Quel est le secret de ces PME qui portent la croissance française à bout de bras ?

Modèles dominants, les entreprises familiales s’imposent aussi bien en Europe où elles représentent plus de 60% qu’en France (83%). Avec un modèle économique et managérial loin d’être dépassé, comme on pourrait le croire, elles affichent des résultats souvent meilleurs que celles qui ne sont pas «incarnées», en raison notamment d’une vision à long terme.

«Ce modèle domine en Europe et dans les pays développés. Pourtant, au début du XXème siècle, des experts n’hésitent pas à déclarer la fin programmée des sociétés familiales», s’amuse Miruna Radu, titulaire de la Chaire Entrepreneuriat Familial et Société. Cette annonce prophétique est restée lettre morte. La raison ? La capacité de ces entreprises à affronter les crises et les difficultés.

Des entreprises plus résilientes

«Ces sociétés perdurent car elles ont une plus grande résilience. Toutes les études le prouvent ! Par rapport à leurs concurrentes non familiales, elles sont plus performantes sur leur marché, affichent une rentabilité moyenne supérieure, ont un endettement moins important, une meilleure capacité d’autofinancement et distribuent plus faiblement les dividendes… souvent réinvestis dans l’entreprise.

Elles bénéficient également d’une plus grande stabilité financière et managériale», détaille la spécialiste. Par leur forme et leur organisation, ces entreprises sont peu soumises à la pression des actionnaires, permettant une vision à long terme et une plus grande flexibilité.

Surtout, elles affichent des valeurs fortes, piliers de leur développement. «Ces PME/ETI ont une tout autre idée du management, l’équipe dirigeante étant dans une logique de pérennité, de la famille et de l’entreprise, pour qui elles ont une affection significative. Elles portent aussi une reconnaissance particulière aux collaborateurs, qui participent souvent activement au développement. On entend ainsi parfois parler de “grande famille”».

Cette stabilité, dans la gouvernance et l’actionnariat, la cohésion et une plus forte solidarité permettent une plus grande stabilité, y compris de l’emploi ! Dans les entreprises familiales, la formation est souvent une priorité : supérieure de 40% à celle mise en place dans les PME non familiales. Autant de facteurs qui cimentent les équipes, rendent solides les fondations de l’entreprise… et rassurent clients et fournisseurs.

Faire sauter le plafond de verre

Si les PME familiales sont majoritaires dans l’Hexagone, les ETI sont, hélas, peu nombreuses, à peine 4.600 contre 10.500 en Angleterre et 12.000 en Allemagne. «En France, il existe un plafond de verre dans la croissance des entreprises à partir de 75-100 M€ de CA. Le peu d’ouverture financière pèse sur ces structures familiales, à la différence des entreprises non familiales qui acceptent plus facilement d’ouvrir leur capital».

Autre problème de taille : le cadre juridique et fiscal français défavorable à ce modèle. À partir de 1983, les droits de succession des entreprises ont été doublés, un vrai coup de poignard pour les familles. «Entre 1990 et 2004, pas moins de 500 entreprises ont été vendues, faute de pouvoir être transmises à la nouvelle génération ! Une véritable hémorragie», déplore Miruna Radu.

À cela s’ajoute un dispositif d’imposition qui privilégie l’endettement, et qui ne bénéficie pas aux entreprises familiales adeptes de l’autofinancement. De même, l’ISF représente un véritable frein. «L’ISF fait peser une charge financière énorme sur les actionnaires familiaux, qui n’ont parfois pas d’autres revenus que les dividendes de l’entreprise, d’ailleurs souvent réinvestis.

Acculés, ces derniers sont obligés de revendre leurs actions, ce qui déséquilibre l’entreprise». La Commission européenne émet d’ailleurs des préconisations allant dans le sens de ces structures, prônant l’allègement des charges sur la transmission. Pour soutenir le développement des entreprises familiales, il est impératif de simplifier et d’assouplir la législation fiscale et sociale. Et il faut faire vite car, d’ici 2020, quelque 27.000 PME seront «transmises» chaque année.

«Ces questions devraient être une priorité politique au regard du poids économique des entreprises familiales !», rugit Miruna Radu. Le constat est clair : il y a urgence à soutenir ces structures qui portent notre croissance.

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