D’ici la fin de la décennie, 85% des interactions avec le client ne nécessiteront plus l’intervention humaine. Si nous n’en sommes pas encore là, les agents conversationnels prennent de plus en plus de place dans notre monde numérique.
Connaissez-vous Anna, Yoko, Tim, Inès ou Céline ? Ces assistants «travaillent» pour Ikea, Toshiba, Airbus Helicopters, Nespresso, Meetic et même Pôle Emploi. Et il ne s’agit pas de salariés, mais de robots conversationnels ou, pour être plus tendance, de «chatbots», capable de dialoguer de manière plus ou moins «intelligente» avec leurs interlocuteurs humains.
Leur existence n’est pas franchement nouvelle puisque tous sont les héritiers d’Eliza, un programme qui a vu le jour… en 1960 ! Mais les progrès de l’intelligence artificielle et l’essor des messageries instantanées changent la donne. C’est, une fois de plus, à Mark Zuckerberg, que l’on doit l’explosion du phénomène, en annonçant en avril dernier la grande arrivée des robots sur Facebook Messenger, affirmant : «Vous devriez être à même de discuter avec une entreprise de la même manière que vous discutez avec un ami».
Désormais, chaque entreprise peut publier son propre assistant virtuel pour informer les consommateurs et les clients, en touchant plus de 900 millions d’utilisateurs (et 2 milliards d’utilisateurs en ajoutant WhatsApp).
La mort des applications ?
Le principal intérêt des chatbots est économique. Assurer une relation commerciale à distance est coûteux en ressources humaines. Des solutions logicielles capables de comprendre les questions exprimées en langage naturel et d’y répondre dans la majorité des cas permet d’envisager de substantielles économies d’échelles.
Il faut tout de même relativiser. Les robots actuels ne sont pas franchement capables de faire croire aux utilisateurs qu’ils communiquent avec de vrais humains. La plupart des chatbots, basiques, reposent sur l’association de questions/réponses prédéfinies.
Le problème, c’est qu’il est pratiquement impossible de configurer toutes les requêtes possibles. Les vrais robots conversationnels intelligents, eux, font appels à des algorithmes complexes et à des mécanismes d’auto-apprentissage. Mais le but n’est pas de remplacer les humains. L’utilité des chatbots est avant tout fonctionnelle, comme les applications.
Avec plusieurs avantages : nul besoin de téléchargement, d’installation, d’inscription… Ils offrent une expérience utilisateurs beaucoup plus fluide et satisfaisante que les applications, en transformant les messageries en platesformes multi-services.
Un canal supplémentaire
Jean-David Benichou, P-DG de l’agence ViaDialog, les voient comme un «canal de communication instantané créateur de proximité avec le client et un canal de vente supplémentaire incontournable». Les agents conversationnels sont incroyablement efficaces dans la prise en charge de requêtes de premier niveau, en déchargeant les opérateurs humains des requêtes à faible valeur ajoutée, leur permettant de se concentrer sur les problèmes complexes nécessitant une capacité d’analyse importante.
Ils permettent de proposer une assistance réactive et personnalisée sur de grandes plages horaires. Actuellement, pour la plupart des marques, les demandes simples, qui constituent 20 à 30% des flux, pourraient être traitées par un dispositif automatique. Mais il faut savoir accepter les limites de la machine et passer le relais à l’humain quand le robot ne peut plus répondre.
«Dialoguer avec un chatbot, c’est un peu comme discuter avec un enfant de 10 ans : la compréhension et la restitution des questions sont correctes, mais les réponses sont stéréotypées et automatiques. Aucun problème pour obtenir une information précise à une demande telle que »Quelle heure est-il ?’’ ou »Quel temps fera-t-il à Paris dimanche prochain ?’’. Mais des équipes techniques en support restent encore indispensables à la réussite des bots et à la satisfaction finale des clients. Aujourd’hui, on peut automatiser 20% des interactions pour les sujets grand public, tels que la banque et l’assurance, ou la gestion client des abonnements à l’eau ou à l’électricité. Et d’ici 10 ans, nous en serons à 50%», ajoute Jean-David Benichou.
Il s’agit en tout cas d’un tournant majeur dans la relation entre les entreprises et leurs clients. Et, comme l’affirmait Mark Zuckerberg, «c’est en jouant sur la créativité des services que les marques pourront se différencier et faire émerger leurs bots». Tout reste donc à inventer.