En mai 2023, une équipe d’investigation composée par des membres de l’Université de Pékin et du Centre de conservation et d’élevage Xizijiang a découvert un arbre géant dont la hauteur s’élève à 102,3 mètres dans le district de Pome 波密县au Sud-est du Tibet. Il s’agit du plus haut arbre en Asie et du deuxième plus haut dans le monde, derrière un arbre Sequoia sempervirent aux Etats-Unis, long de 115, 85 mètres.
« Lorsque je me plaçais sous l’arbre, je ressentais un choc sans pareil. J’avais le sentiment qu’une personne serait infiniment rétrécie et le sentiment que la personne était comprimée comme une fourmi », décrit Li Cheng, chercheur sur la biodiversité et l’un des découvreurs du plus haut arbre de l’Asie. Il a eu cette sensation après s’être mis sous cet arbre appartenant à l’espèce Cupressus austrotibetica藏南柏木.
En 2013, Li Cheng a pensé à l’existence des arbres géants au Sud-est du Tibet. Et dès lors, il a mené près de vingt investigations dans cette région, en espérant de mieux savoir sur la situation des arbres géants en Chine. La découverte d’un arbre Cupressus austrotibetica qui mesure 102, 3 mètres lui donne le sentiment de réaliser un rêve.
« J’avais fait une conjecture : Existe-t-il des arbres dont la hauteur dépasse 100 mètres en Chine ? Combien serait leur diamètre à hauteur de poitrine ? Appartiennent-ils à quelle espèce ? Finalement, nous l’avons trouvé et nous nous mettions sous cet arbre géant, comme si certaines scènes du rêve étaient devenues réalité, et c’était donc particulièrement inoubliable », a raconté Li Cheng.
Début août, les recherches approfondies menées par l’Université de la sylviculture de Beijing sur place révèlent plus d’informations : le plus haut arbre de l’Asie a déjà totalisé 1.841 ans ; il pèse 183,1 tonnes et stocke 100,3 kg de carbones sur son corps. Pour cela, Li Cheng a expliqué à CGTN Français que l’existence des arbres géants est un signe indiquant le bon état de l’écosystème local. « Ce n’est que dans les forêts vierges avec le moins de perturbation humaine que les arbres peuvent atteindre leur pic de croissance, car dans ces lieux existent les conditions les plus propices à la croissance des arbres », a-t-il expliqué.
Les investigations antérieures, ainsi que celles menées par Li Cheng et ses partenaires pointent l’existence des arbres géants dont la hauteur s’élève à plus de 70 mètres dans la région sud-est du Tibet, notamment au Canyon du Fleuve Yarlung Zangbo. Depuis deux ans, plusieurs équipes d’investigation ont découvert des arbres géants dans cette zone, en employant des moyens et innovations scientifiques dans les recherches sur la biodiversité. La hauteur de ces arbres a battu successivement le record du plus haut arbre de la Chine.
En avril 2022, Li Cheng et les équipes de l’Université de Pékin ont réussi à mesurer, à l’aide de la numérisation Lidar, la hauteur d’un arbre de Pinus bhutanica dans le district de Mêdog, au Sud-est du Tibet. Avec 76,8 mètres de hauteur, cet arbre a été considéré comme le plus haut de la partie continentale de la Chine. Mais ce record a été battu à 83,2 mètres, quelques jours après, par un autre arbre situé dans le district de Zayü, à quelque 300 km de Mêdog. Cet arbre a été mesuré par une équipe de l’Académie des Sciences de Chine faisant usage de la corde suspendue à un drone.
L’existence des arbres géants fait preuve de l’authenticité et de l’exhaustivité de l’écosystème au Sud-est du Tibet, surtout au bassin du Canyon du Fleuve Yarlung Zangbo. Les conditions géographiques particulières donnent naissance à ces arbres géants : d’immenses chaînes de montagnes telles que l’Himalaya et Nyenchen Tanglha bloquent l’air froid venant du nord, le flux d’air chaud et humide de l’océan Indien transporte en continu la mousson vers le plateau Qinghai-Tibet en hiver en passant par la région du Yarlung Zangbo, de fortes précipitations se produisent au cours de ce processus, ce qui est favorable à la pousse des plantes. « Faible influence du grand vent ou de la vague du froid, associée à l’abondance de pluie et d’humidité, toutes ces conditions sont propices à l’apparition d’arbres géants dans le Canyon du Yarlung Zangbo », fait remarquer Li Cheng.
Au bassin du Canyon du Yarlung Zangbo, au lieu de disséminer en point, les arbres géants se répandent de manière verticale. « Des forêts tropicales humides de basse altitude aux forêts humides de montagne, en passant par les forêts de feuillus à feuilles persistantes et les forêts de conifères, un grand nombre d’arbres géants poussent à plus de 60 mètres. Ce qui montre que cette zone est vraiment productrice, les conditions écologiques sont excellentes et bien développées. C’est aussi une preuve que le bassin du Canyon du Yarlung Zangbo est véritablement un point chaud en matière de biodiversité », a précisé Li Cheng.
Le Sud-est du Tibet est également abondant en diversité animalière. D’après les surveillances par infrarouge effectuées par le Centre de conservation et d’élevage de Xizijiang et le Centre de conservation Shanshui, cette région est le seul endroit abritant quatre espèces de grands félins dans le monde, soit le tigre, le léopard, le léopard des neiges et la panthère nébuleuse. Ils sont tous des animaux protégés essentiellement au niveau de l’Etat. « Il arrive dans cette région qu’une espèce du même genre se divise en différentes espèces à basse altitude et à haute altitude. Sur la rive est du fleuve et sur la rive ouest du fleuve, elle se divise également en différentes espèces. La complexité du climat et de la géographie de la région du Canyon a donc contribué à la diversité des espèces sauvages dans cette région », a-t-il ajouté.
Li Cheng est l’un des partisans de l’établissement du Parc national du Yarlung Zangbo. Les enquêtes et surveillances scientifiques qu’il a menées montrent que le climat vertical dans cette région nourrit d’énormes plantes et animaux, « la biodiversité au bassin du Canyon du Yarlung Zangbo fait de la région la zone qui dispose de la bande la plus complète en matière de répartition verticale des espèces. C’est un endroit idéal à montrer au monde avec ces caractères primitifs et complets de l’écosystème de la Chine», a-t-il fait savoir.
Selon Li Cheng, la découverte de nouvelles espèces de la région se classe toujours au premier rang du pays, ce qui montre également que les connaissances acquises sur les espèces locales restent encore très insuffisantes. « Nos études sur le Sud-est du Tibet sont quand même préliminaires et brutes. J’espère que notre travail va jouer un rôle éclairant, de sorte à attirer plus de chercheurs dans les recherches sur les valeurs écologiques de cette région », a-t-il conclu.