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Comment investir avec succès ?


Vincent Guenzi, responsable de la stratégie d'investissement chez Cholet Dupont, partage ses analyses sur le contexte économique, la situation des marchés et les opportunités pour les particuliers.

Entreprendre - Comment investir avec succès ?

Vincent Guenzi, responsable de la stratégie d’investissement chez Cholet Dupont, partage ses analyses sur le contexte économique, la situation des marchés et les opportunités pour les particuliers.

Comment élaborer une stratégie de placement quand les rendements sont aussi bas ?

Vincent Guenzi :

Il faut accentuer l’analyse des besoins.Vérifier que les placements de trésorerie peu rémunérateurs, comme les livrets d’épargne sont au minimum. Quoi qu’on en dise, les fonds euros à moyen terme restent très attractifs, sans risque et bénéficient d’une enveloppe fiscale sans équivalents.

Cela reste un placement attractif pour une épargne dont on sait qu’on n’aura pas besoin dans l’urgence. Ainsi, il est judicieux de placer le montant des droits de succession pour préparer sa transmission. C’est quand même moins dangereux pour les héritiers que de devoir vendre des actions au moment où la bourse perd 50%, ce qui peut toujours arriver.

Dans le contexte actuel, conseillez-vous plutôt la prudence aux investisseurs ?

D’ici la fin de l’année, le message est d’être prudent mais pas attentiste. Sur le fond, nous sommes confiants, mais, en raison de la grande volatilité des marchés, sur 6 à 12 mois, tout peut arriver.

Si nous restons attentistes à court terme, les actions nous paraissent encore sous-évaluées à moyen terme et les investisseurs semblent en reprendre conscience. Nous restons positifs pour la fin de l’année mais la forte volatilité persistante trouble la visibilité. En effet, la remontée des cours du pétrole et des matières premières semble encore fragile. Les fluctuations du baril occasionneront d’autres moments de doute sur les marchés financiers.

Enfin, il n’est pas exclu que la Banque Centrale américaine durcisse à nouveau sa position si l’inflation remontait trop sensiblement.

Pourquoi est-il si difficile d’avoir une vision claire des prévisions ?

On assiste à une lente dégradation de l’environnement économique mondial, calée sur des taux de croissance plus faibles. On ne va pas revenir à un cycle de croissance comme on a connu dans les années 2000-2010.

Cela n’est pas très préoccupant mais, dans ce contexte, soutenu par une inflation très faible, toutes les oscillations prennent de plus en plus d’importance aux yeux des investisseurs, ce qui explique la fébrilité des marchés. En début d’année, au-delà du ralentissement chinois, qui reste modéré, la baisse de revenus liés à la baisse du pétrole pour les pays producteurs et un dollar très fort lié à l’anticipation d’une hausse importante des taux de la FED expliquent la très grande hétérogénéité des prévisions, que ce soit au niveau économique ou des perspectives financières.

Ceux doivent étudier et prévoir des scénarios ne savent plus à quel saint se vouer. Par ailleurs, il y a un excès de pessimisme des analystes, qui ne me semblent pas justifié. En 1998, tout le monde prévoyait une récession et l’explosion du système bancaire, qui n’ont pas eu lieu. Il ne faut jamais sous estimer les capacités des banques centrales.

Vous avez déclaré « ce sont les marchés qui font les tendances ». Que voulez-vous dire ?

Les marchés sont un peu chaotiques. En janvier dernier, la situation était très effrayante, tout le monde pensait que tout s’écrouler. Les choses ont changé le 11 février, même si l’environnement économique ne s’est pas particulièrement amélioré.

Mais quasiment le même jour, plusieurs «bonnes nouvelles» ont été révélées, comme le début des pourparlers entre Russie, Iran et Arabie Saoudite pour stabiliser les cours du pétrole, le discours devant le Congrès de Janet Yelen, présidente de la FED qui s’est montrée moins pressée de monter ses taux et enfin, le rebond des indices boursiers américains.

Le redressement de tous les marchés s’est poursuivi pendant trois semaines, les mêmes causes produisant les mêmes effets, mais en sens inverse: hausse du pétrole, hausse des crédits, hausse des cours des banques, hausse des matières premières et des secteurs associés, hausse des bourses émergentes…

Pourtant, les risques qui effrayaient les investisseurs, évoqués le mois précédent, n’ont pas tous disparu : capacité des Banques Centrales à maintenir une stabilité minimale des prix, évolutions des cours des matières premières, endettement excessif des entreprises américaines ou chinoises, maintien de l’Angleterre dans l’Union Européenne, montée des populismes, crise des migrants en Europe, blocages politiques en Espagne et au Portugal…

Existe-t-il encore des opportunités de performances ? Avec quel niveau de risque ?

Pour l’investisseur qui a une certaine appétence au risque, à côté des entreprises cotées qui affichent de bonnes perspective avec une régularité, mais que tout le monde connaît et qui sont donc plutôt chères, il est possible de cibler des valeurs cycliques, plus dangereuses mais avec un bon potentiel, comme Vallourec, qui fait régulièrement le yoyo.

Ce n’est pas forcément un mauvais choix : quelqu’un qui a acheté du Seb il y a 15 ans ne le regrette probablement pas aujourd’hui ! On peut aussi acheter des valeurs délaissées en ce moment en raison du contexte économique ou géopolitique, comme les pétrolières (Total, Exxon…) ou des entreprises qui sont très engagées dans les pays émergents, comme Edenred au Brésil ou Tarkett en Russie.

Avec les taux d’intérêts actuels, l’immobilier n’est-il pas plus intéressant que les placements financiers ?

L’immobilier doit naturellement faire partie de la stratégie patrimoniale. Et ça commence par l’achat de sa résidence principale. Après, il peut être judicieux de se constituer un patrimoine en bénéficiant des «carottes» fiscales.

L’investissement dans l’immobilier locatif offre des rendements attractifs pour l’instant, entre 4 et 6%. Mais il ne faut pas croire que ça ne peut pas baisser sur le long terme, 10 ou 15 ans, soit l’engagement d’un crédit. On n’a pas une grande visibilité sur la durée du rapport entre les taux et l’inflation.

En France, entre 1985 et 1985, la pierre a baissé de 20%. Dans d’autres pays, ces dernières années, on a enregistré une baisse pouvant atteindre 30%. Cela n’est pas arrivé chez nous… jusqu’à présent. Il y a eu récemment une alerte de l’AMF sur le risque d’une bulle immobilière concernant les immeubles de bureaux

Vous suivez notamment les marchés américains. Quelles sont ses évolutions ?

Je pense que, depuis la crise de 2008, nous sommes dans un nouveau cycle haussier sur 15 à 20 ans, comme on a pu en connaître un sur la période 1982-2000.

Mais une période de hausse sur une telle durée ne signifie pas que tout se déroule comme un long fleuve tranquille. Rappelons-nous le krach de 1987, ou la bourse a perdu plus de 20% en une seule journée et 50% en quelques mois, ou les conséquences de la guerre du Golfe en 1990. Il y a probablement un potentiel de croissance  sur le long terme, mais avec des risques de pertes importantes sur certaines périodes.

Ces périodes difficiles constituent d’ailleurs d’excellentes opportunités pour les investisseurs qui misent sur la durée.

Si vous ne deviez donner qu’un conseil aux investisseurs, quel serait-il  ?

Adopter un comportement modeste. Après 6 à 7 années de hausse, il est possible que les marchés baissent momentanément, même si je reste confiant sur la durée.

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