Tout est possible ! En 20 ans, L’Occitane, petite entreprise provençale est devenue un géant planétaire avec 2.375 boutiques dans 90 pays. Récit d’une réussite.
Un concept, des valeurs bien ancrées et des produits 100% naturels produits en France… tels sont les atouts de L’Occitane, qui connaît depuis 1976 une fabuleuse ascension. Quarante ans après sa création, la marque de cosmétique «made in France», qui célèbre le bien-être de la Provence, a séduit le monde entier.
Aujourd’hui, elle dispose, en effet, de 2.375 boutiques dans 90 pays, et compte plus de 7.000 collaborateurs. Avec sa devanture ocre, ses tommettes au sol et un mobilier en bois et fer forgé, cette boutique aux couleurs de la Provence encense le monde de ses senteurs. Et pourtant, dans les années 90, ce développement a bien failli être tué dans l’oeuf et la marque disparaître. C’est Reinold Geiger, investisseur autrichien téméraire, qui a vu grand pour la petite PME et l’a propulsée parmi les plus grandes marques de cosmétiques au monde. Convaincu du potentiel des produits naturels, il a réussi en 20 ans à exporter le concept et à vendre les senteurs de la Provence au-delà des frontières de l’Hexagone.
Genèse provençale
L’aventure de L’Occitane débute il y a 40 ans, dans le sud de la France. Olivier Baussan, jeune diplô mé de lettres de 23 ans acquiert un vieil alambic pour distiller de l’huile essentielle de romarin et la vendre sur les marchés locaux. En 1976, il achète une ancienne usine de savons afin d’étendre sa production. Sur le site, il fabrique alors de l’huile essentielle de cade, de lavande et d’olivier. La même année, il s’associe au chimiste Yves Millou et crée la marque L’Occitane. Seulement 1 an plus tard, une première boutique, Le Relais Occitane, s’ouvre à Manosque.
Quand L’Occitane périclitait…
On y trouve évidemment des savons et des cosmétiques à base de produits naturels. Pour la petite entreprise provençale s’ensuivent rapidement la création d’une première usine, dans les anciens fours à chaux de Volx (Alpes-de-Haute-Provence), et l’ouverture de plusieurs points de vente dans l’Hexagone, dont la boutique parisienne du VIème arrondissement.
En 1992, si L’Occitane affiche alors un CA de 29,5 millions de francs et une centaine d’employés, elle est aussi criblée de dettes ! Elle n’a d’autre choix que d’accepter une entrée dans son capital des investisseurs de Natural, un filiale d’Indosuez, et du Crédit Agricole. Avec un apport de 40 millions de francs, Natural obtient 90% des parts, Olivier Baussan conservant 6% et son poste de P-DG. Une aubaine pour les investisseurs qui raflent une pépite ! Hélas, pour assurer une rentabilité financière à court terme, la gestion de l’actionnaire majoritaire est catastrophique. Olivier Baussan est écarté et L’Occitane périclite.
Renaissance autrichienne
L’arrivée de Reinold Geiger marque un tournant décisif et salvateur pour L’Occitane. En 1992, l’entrepreneur autrichien qui vient de vendre AMS Packaging, son entreprise spécialisée dans l’emballage de luxe, investit pas moins de 15 millions de francs dans la marque provençale. Convaincu du potentiel des produits naturels et de la marque, il entend bien s’ouvrir à l’international. «Je suis entré dans l’entreprise 20 ans après sa création. L’Occitane était alors au bord du dépôt de bilan, avec des pertes de 20% du CA. Les actionnaires n’avaient absolument pas la culture d’une PME et la dirigeaient comme une grosse entreprise. En revanche, j’ai demandé à Olivier Baussan de revenir comme directeur artistique.
Serial entrepreneur
Cette personnalité très créative a d’ailleurs beaucoup contribué au succès de la marque par la suite. Ensemble, nous avons essayé de la développer car, il y a 20 ans, personne ne croyait aux produits naturels », raconte Reinold Geiger, 67 ans. Le serial entrepreneur qui a passé beaucoup de temps aux États-Unis, pays de la surconsommation et énorme producteur de déchets, mise sur un vrai changement de comportement des consommateurs.
L’Occitane devient L’Occitane en Provence
«Selon moi, les produits naturels de qualité, comme ceux que produisaient L’Occitane, disposaient d’un fort potentiel un peu partout dans le monde. Mon intuition s’est révélée payante ». S’il entend bien exporter la marque, l’investisseur souhaite d’abord l’ancrer dans l’Hexagone. En commercial de choc, il va intelligemment vendre la Provence, ses champs de lavande, ses grillons, ses oliveraies… : L’Occitane devient L’Occitane en Provence. L’homme d’affaires aguerri réorganise aussi la distribution. «Nous nous sommes concentrés sur les boutiques françaises pendant 3 ans avant de nous attaquer à l’international ».
New York et Hong Kong
Mais dès 1996, deux magasins sont inaugurées, l’un à New York, l’autre à Hong Kong. Si la boutique américaine remporte un vif succès, celle d’Asie peine à décoller, tout comme le magasin de Tokyo ouvert l’année suivante, ce qui ne décourage guère Reinold Geiger, persuadé que l’Asie est un marché d’avenir. «À l’international, il a fallu se faire connaître pays par pays. Les ventes de la boutique à Hong Kong n’ont décollé qu’au bout de 3 ans. Il a fallu beaucoup de travail et de persévérance pour s’implanter », explique celui qui a laissé le temps à son concept de s’installer. «L’Asie est le continent du futur. Mais nous avons eu l’inconscience de vouloir démarcher le marché asiatique nous-mêmes. À l’époque d’ailleurs, un des plus grands cabinets d’audit m’a affirmé que j’allais couler l’entreprise à m’acharner de la sorte. Heureusement, au bout de 3 ans, les ventes ont décollé ».
De quoi convaincre l’homme d’affaires de développer activement son réseau de boutiques en propre et en concession à l’international, dès 2000. L’Occitane devient ainsi le fournisseur de plusieurs gros distributeurs dans les gares et les aéroports asiatiques. Sa politique export consiste également à ouvrir des filiales et des partenariats, parfois sous forme de joint-venture comme en Russie ou au Brésil.
En 2007, Reinold Geiger organise un LBO (Leverage Buy Out ) afin de racheter les 13% des parts de l’entreprise à Clarins et les 12% à un investisseur privé. L’entrepreneur autrichien a gagné son pari : L’Occitane compte alors 900 magasins pour un CA de 416 M€ . Mieux encore, l’année suivante, la marque à la devanture ocre rachète Melvita, une PME ardéchoise (250 salariés) spécialisée dans les cosmétiques bio. Et pour chapeauté le tout, L’Occitane Holding est créée en 2009 au Luxembourg.
L’entrée en Bourse
En 2010, le groupe est introduit à la Bourse de Hong Kong, avec 316 millions d’actions à la vente, devenant la première entreprise française cotée sur cette place. «Nous avons souhaité être côtés à la Bourse de Hong Kong car l’Asie représente 50% de notre CA, dont 25% uniquement au Japon, contre 20% pour l’Europe. Nous souhaitions nous installer durablement sur le marché asiatique, Hong Kong s’est donc imposé par rapport à notre stratégie de pénétration en Asie. D’autant que, pour conquérir ce marché et convaincre des investisseurs, il est très important de créer de la notoriété », souligne le P-DG. Une belle opération qui permet au groupe de lever 532 M€, dont 50 millions du fonds d’investissement chinois China Investment Corporation.
Côté cour, cette stratégie vise également à contrer les contrefaçons chinoises Camenae et Occitown qui grappillent des parts de marché de L’Occitane.
Côté scène, la levée de fonds permet d’ouvrir un nouveau laboratoire de R&D sur la cosmétique remporte un vif succès, celle d’Asie peine à décoller, tout comme le magasin de Tokyo ouvert l’année suivante, ce qui ne décourage guère Reinold Geiger, persuadé que l’Asie est un marché d’avenir. «À l’international, il a fallu se faire connaître pays par pays. Les ventes de la boutique à Hong Kong n’ont décollé qu’au bout de 3 ans. Il a fallu beaucoup de travail et de persévérance pour s’implanter », explique celui qui a laissé le temps à son concept de s’installer. «L’Asie est le continent du futur. Mais nous avons eu l’inconscience de vouloir démarcher le marché asiatique nous-mêmes. À l’époque d’ailleurs, un des plus grands cabinets d’audit m’a affirmé que j’allais couler l’entreprise à m’acharner de la sorte. Heureusement, au bout de 3 ans, les ventes ont décollé ».
De quoi convaincre l’homme d’affaires de développer activement son réseau de boutiques en propre et en concession à l’international, dès 2000. L’Occitane devient ainsi le fournisseur de plusieurs gros distributeurs dans les gares et les aéroports asiatiques. Sa politique export consiste également à ouvrir des filiales et des partenariats, parfois sous forme de joint-venture comme en Russie ou au Brésil. En 2007, Reinold Geiger organise un LBO (Leverage Buy Out ) afin de racheter les 13% des parts de l’entreprise à Clarins et les 12% à un investisseur privé.
L’entrepreneur autrichien a gagné son pari : L’Occitane compte alors 900 magasins pour un CA de 416 M€ . Mieux encore, l’année suivante, la marque à la devanture ocre rachète Melvita, une PME ardéchoise (250 salariés) spécialisée dans les cosmétiques bio. Et pour chapeauté le tout, L’Occitane Holding est créée en 2009 au Luxembourg. L’entrée en Bourse En 2010, le groupe est introduit à la Bourse de Hong Kong, avec 316 millions d’actions à la vente, devenant la première entreprise française cotée sur cette place. «Nous avons souhaité être côtés à la Bourse de Hong Kong car l’Asie représente 50% de notre CA, dont 25% uniquement au Japon, contre 20% pour l’Europe. Nous souhaitions nous installer durablement sur le marché asiatique, Hong Kong s’est donc imposé par rapport à notre stratégie de pénétration en Asie. D’autant que, pour conquérir ce marché et convaincre des investisseurs, il est très important de créer de la notoriété », souligne le P-DG.
Une belle opération qui permet au groupe de lever 532 M€ , dont 50 millions du fonds d’investissement chinois China Investment Corporation . Côté cour, cette stratégie vise également à contrer les contrefaçons chinoises Camenae et Occitown qui grappillent des parts de marché de L’Occitane. Côté scène, la levée de fonds permet d’ouvrir un nouveau laboratoire de R&D sur la cosmétique naturel à Manosque et d’engager une centaine de chercheurs, et d’engranger des acquisitions stratégiques, comme en 2012 la petite entreprise francocoréenne Erborian, spécialisée dans les cosmétiques naturels. Et le fringant sexagénaire ne compte pas s’arrêter en si bon chemin.
«Il y a 20 ans, il fallait être un peu fou pour tenter l’aventure L’Occitane. Mais aujourd’hui, nous sommes une multinationale florissante… Nous sommes cependant bien loin d’avoir atteint le stade de saturation géographique, même avec nos 2.500 magasins répartis sur 90 pays ! Surtout, il ne faut pas oublier la révolution digitale. Pour nous, c’est une opportunité fantastique », se réjouit Reinold Geiger, qui n’a visiblement pas l’intention de «rater le coche ». L’Occitane continue de tisser sa toile. Une formidable saga qui devrait vous inspirer ![FIN]