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Comment rendre attractive la France post-pandémique ?


Par Benoît Panel, CEO de l’entreprise Yescapa Tribune. Première destination touristique mondiale, la France a connu, comme les autres pays, de fortes perturbations dans le secteur du tourisme depuis 2020, année où 61 milliards de recettes touristiques ont manqué. Malgré les atouts naturels de l’hexagone, cette industrie, qui représente 7...

Entreprendre - Comment rendre attractive la France post-pandémique ?

Par Benoît Panel, CEO de l’entreprise Yescapa

Tribune. Première destination touristique mondiale, la France a connu, comme les autres pays, de fortes perturbations dans le secteur du tourisme depuis 2020, année où 61 milliards de recettes touristiques ont manqué. Malgré les atouts naturels de l’hexagone, cette industrie, qui représente 7 % du PIB, est confrontée à une baisse des réservations internationales et à une mutation des attentes des vacanciers français. Si elle souhaite conserver sa place de leader, la France doit définir une nouvelle stratégie touristique afin de continuer à promouvoir son image. L’intégration du virage numérique doit impérativement être considérée dans la diffusion de ses offres de même qu’une palette de propositions disponibles sur l’ensemble des territoires, des plus discrets aux plus touristiques.

Une des conséquences de la crise sanitaire est l’évolution des attentes et des pratiques de voyage des Français pendant leurs vacances. Le tourisme de masse semble laisser la place à une recrudescence des activités de plein air, au cœur d’espaces ouverts et loin de la foule. En avril 2021, 72% des Français affirmaient chercher des vacances davantage tournées vers la nature. Les espaces naturels et la diversité des climats qui caractérisent notre pays ont, depuis deux ans, retenu l’attention d’une large partie des français. Cette même année, la France est à nouveau restée une destination de prédilection pour nos compatriotes, puisque plus de 83% d’entre eux sont restés dans l’hexagone, ce qui prouve l’intérêt retrouvé pour le tourisme de proximité.

Selon un sondage Ifop, en 2022, 55% des Français sont certains de partir pendant la période estivale, et 52% d’entre eux réservent leurs vacances entre 3 et 5 mois avant leur départ. Dans un même temps, les réservations de « dernière minute » sont de moins en moins plébiscitées. Le pourcentage de personnes réservant moins d’un mois à l’avance est passé de 52% à 23% en deux ans. D’après la même étude, dans le cadre d’un prochain voyage, 58% des Français souhaitent faire le choix d’un tourisme durable, et 44% des sondés sont prêts à payer plus cher leurs vacances si celles-ci sont éco-responsables. Une alternative que proposent les campings, où 19% des français ont passé leurs vacances en 2021, et les voyages itinérants en véhicules de loisirs. Avec plus de 7 500 campings et plus de 870 000 emplacements, la France possède le 1er parc de campings d’Europe et le second au monde derrière les Etats-Unis. Le camping reste alors la première forme d’hébergement touristique du pays. Ce succès s’explique par l’offre de proximité abondante ainsi que par les tarifs abordables proposés dans ces lieux de villégiature qui ont su, en parallèle, se moderniser et proposer une large palette de services d’hébergement.

Les Français eux-mêmes ont pris conscience lors des confinements successifs de l’importance du tourisme pour notre économie autant que pour leur bien-être. 68% se disent même prêts à favoriser des destinations nationales pour soutenir ce secteur. Le hashtag #jeredecouvrelafrance lancé à partir de 2020 par Atout France invite les français à redécouvrir les trésors des destinations tricolores et à soutenir les territoires et les secteurs durement impactés par la crise sanitaire. Cette campagne s’inscrit dans le fait que le Slow Tourisme – ou “Tourisme Doux”- et les vacances durables continuent de connaître un regain d’intérêt. Pour cela, 58% des français envisagent de réaliser un road trip en van ou camping-car en 2022.

Tous les acteurs du secteur doivent désormais être engagés dans cette transformation et apporter des propositions adéquates. Les vacanciers attendent des professionnels du voyage d’être force de proposition dans l’adaptation de l’offre de séjours proposés. Limiter l’impact du voyage sur l’environnement et privilégier le retour au local sur l’ensemble des territoires nationaux plutôt que sur les seuls bords de mer et les sites iconiques font aujourd’hui partie des attentes prioritaires des consommateurs. Cet appel a été entendu par exemple par le fondateur d’EasyVoyage qui propose de combiner voyage et digital, tout en limitant l’impact écologique des utilisateurs de l’application.

En effet, selon Jean-Pierre Nadir “les territoires se réinventent autour de nombreuses initiatives : préservation de l’environnement, définition de cahiers des charges architecturaux, mise en place de mobilités douces, valorisation des produits du terroir, aides aux filières traditionnelles, et surtout développement sans modération de toutes formes d’animations, englobant les outils de digitalisation. Toutes ces actions positives permettent de revaloriser l’ensemble des composantes locales en redonnant le goût de l’authenticité et en favorisant les initiatives des acteurs locaux. Ces derniers œuvrent effectivement chaque jour à bonifier leur région et attendent juste des pouvoirs locaux qu’ils accompagnent leurs créations, leurs animations. De fait, pour réenchanter nos régions, il suffit de surfer sur toutes les mobilisations qui sont autant de bonnes intentions, et dont les bénéfices profitent au final à toutes les populations, quel que soient leurs horizons.”

Alors que le tourisme reste un puissant moteur de notoriété et d’attractivité pour l’ensemble des territoires, les acteurs publics et privés doivent se mobiliser pour permettre à ce secteur essentiel de l’économie française de rebondir et se reconstruire y compris sur le long terme. C’est notamment vrai pour les Offices de Tourisme, qui permettent de repenser l’offre locale et de gérer les flux des touristes tout au long de l’année. La crise du Covid a bien évidemment affecté ces structures, mais beaucoup ont utilisé leur temps de fermeture pour réorganiser leurs missions et s’adapter d’une part au nouveau contexte économique post-pandémique mais aussi aux nouvelles tendances recherchées par les touristes. Tel fut le cas pour l’Office de Tourisme des Cévennes par exemple qui a su faire preuve d’habileté pour relancer sa destination en écoutant les acteurs locaux et en faisant évoluer les codes de l’accueil classique en présentiel. Les Offices de Tourisme redoublent à nouveau de créativité et d’efforts dans leur offre pour réussir la saison estivale 2022 qui marque le retour de la clientèle internationale dans l’hexagone.

Il est crucial qu’une nouvelle relation de confiance avec ces structures de terrain se crée afin de faire émerger une consommation intelligente des activités touristiques dans les départements et de parvenir à un objectif partagé : valoriser tous les territoires du pays.

Pour lutter contre les conséquences destructrices du tourisme de masse et revenir à un modèle durable, nous appelons les pouvoirs publics et les acteurs privés à repenser main dans la main l’avenir de ce secteur essentiel à notre pays par la prise en compte des enjeux environnementaux et par le renforcement de l’attractivité de l’ensemble des nos régions grâce à des investissements ciblés. En effet, avant la pandémie, plus de 50 000 places de campings avaient déjà été détruites en près de 20 ans, particulièrement dans les petits campings municipaux. Pourtant c’est l’effet inverse que nos régions doivent connaître, avec la construction et l’entretien d’infrastructures adaptées à l’accueil de vacanciers qui sont à la recherche d’espaces adéquats au « slow tourisme ».

Si des efforts ont été initiés par le gouvernement après la pandémie sur ces chantiers, nous pouvons autant que nous devons les mener à bien pour nous adapter aux évolutions des modes de vacances et pour que la France demeure une destination touristique de référence.

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