Vous ne la connaissez peut-être pas, mais elle vous connaît probablement ! Grâce à sa technologie d’analyse du comportement, cette future licorne permet aux e-commerçants d’améliorer leurs résultats.
Ce fils et petit-fils d’entrepreneurs aurait pu rejoindre la société familiale d’import-export de fruits et légumes secs ou devenir trader. Il a choisi une autre voie. À moins de 30, Jonathan Cherki, jeune Marseillais qui a créé son entreprise dès sa sortie de l’ESSEC, est à la tête d’une pépite parisienne qui multiplie les bons points.
Classée dans le palmarès Technology Fast 50 de Deloitte, distinguée par l’Institut Gartner comme proposant l’une des 4 technologies les plus innovantes au monde dans l’e-commerce et, cerise sur le gâteau, bénéficiaire d’une levée de fonds de 20 M$ (18,9 M€) qui va lui permettre de se lancer aux États-Unis avec l’ambition de créer rien de moins que le leader mondial de l’UX (pour User eXperience ou expérience utilisateur), ContentSquare est une réussite totale.
Améliorer la performance du e-commerce
«Sur 100 personnes qui entrent dans un magasin, 20 y achèteront quelque chose. Sur 100 internautes qui visitent un site, moins de 2 y font un achat», explique simplement le jeune entrepreneur.
Parmi les nombreuses raisons qui expliquent cette différence, il en est une à ne pas perdre de vue : «Les vendeurs du monde réel s’appuient sur de bonnes pratiques consolidées au fil d’années d’expérience. L’observation directe des consommateurs leur permet d’affiner continuellement la sélection, la disposition et la présentation de leur boutique et de leurs produits. Depuis toujours, sans le dire, ils optimisent l’expérience utilisateur de leurs clients, et ça marche !».
Jusqu’à présent, les commerçants ont largement misé sur le nombre en s’attachant à développer le traffic. Mais dans un contexte extrêmement concurrentiel, le coût d’acquisition ne cesse de croître, et cette stratégie rencontre ses limites. Il est donc indispensable d’améliorer le taux de conversion.
«Les e-commerçants disposent de trois atouts essentiels : l’information, la capacité d’analyse et la souplesse. Et alors que l’expérience utilisateur d’une boutique physique est nécessairement identique pour tous ses visiteurs, celle d’un site peut être personnalisée en temps réel par type de clientèle, voire au niveau individuel. Une bonne compréhension des attentes des visiteurs peut aider les e-commerçants à délivrer à chacun une expérience qui soit un vrai vecteur de conversion et ainsi lever les freins à l’achat», ajoute Jonathan Cherki. En fait, il s’agit de comprendre comment un internaute achète ou non, et d’adapter l’offre à ses attentes.
Un outil intelligent
Pour cela, les solutions proposées par ContentSquare permettent de recueillir facilement une information précise et abondante sur le comportement, le parcours, les hésitations de l’internaute. Le logiciel enregistre les mouvements de souris, le temps de consultation, les clics… Au total, ce sont plus de mille milliards de mouvements de souris et d’autres comportements utilisateurs qui sont enregistrés chaque mois en temps réel.
Les outils et les méthodes du big data permettent ensuite de déchiffrer, croiser et interpréter ces données, et d’approfondir l’analyse en les confrontant à d’autres types d’informations. Et ça marche ! Non seulement des augmentations de plus de 20 % du taux de conversation ne sont pas rares, mais le e-commerçant développe un savoir-faire extrêmement précieux pour améliorer ses développements Internet et mobile.
«Quels sont les visuels, les terminologies ou les fonctionnalités les plus efficaces ? Quels sont les éléments clés à faire apparaître sur l’interface restreinte d’une application mobile ? Dans la perspective d’une expansion internationale, quels sont les usages locaux dont il faut impérativement tenir compte ? Mieux vaut savoir, par exemple, qu’un internaute allemand sur 5 lit les conditions générales de vente, qu’un Chinois regarde 20 photos avant de se décider, contre 3 en moyenne pour un Français», illustre Jonathan Cherki.
Le succès est incontestable : depuis 2012, la jeune pousse a conquis plus d’une centaine de clients de toutes tailles et de tous secteurs, avec de belle référence comme Accor, TagHeuer, Made.com, Kering, L’Occitane, Lacoste et Unilever.
Une levée de fonds de 20M$
«En 4 ans, notre CA a été multiplié par 20. Nous sommes rentables, avec 100% de croissance tous les ans et nos effectifs ont doublé chaque année pour atteindre 110 personnes aujourd’hui. Notre force réside dans notre capacité à proposer une solution performante, utilisable par tous et opérationnelle en quelques clics, sans nécessiter de longue formation. Chaque commercial peut rapidement ajuster les éléments d’un site pour augmenter le taux de conversion, ce qui autonomise les équipes et leur donne le réflexe de mesurer leur performance», se félicite le fondateur, qui précise qu’à part les 450.000 € levés en amorçage en 2012, le développement a été entièrement auto-financé.
Et le marché mondial est énorme : il pourrait peser plus de 5 Mds$ (4,7 Md€) en 2020. Mais pour s’attaquer à l’international, il faut des moyens importants. ContentSquare a donc bouclé une levée de fonds de 20 M$, un tour de table mené par le fonds Highland Europe (qui compte en portefeuille WeTransfer, NEXThink ou Malwarebytes).
Tony Zappala, associé en charge de l’opération, est vraiment convaincu : «Nous avons été impressionnés par la qualité des technologies développées par ContentSquare, par le talent de son équipe dirigeante, et ravis de contribuer au développement et à l’expansion internationale d’un acteur d’ores et déjà leader en Europe. ContentSquare illustre par l’exemple ce que sera le futur du marché de l’UX».
« Etre présent aux États-Unis est indispensable pour construire un leader mondial »
Ces fonds serviront d’abord à financer la croissance en Europe (déjà présente à Londres, ContentSquare ouvrira un bureau en Allemagne en 2017), mais surtout aux États-Unis. Car si la jeune pousse réalise déjà 80% de son CA à l’international, Jonathan Cherky souhaite accélérer.
«Nous sommes déjà présents aux États-Unis via les clients que nous accompagnons, mais c’est de loin le plus grand marché au monde et c’est maintenant que se prennent les positions. Les clients sont là-bas, y être présent est indispensable pour construire un leader mondial. Nous avons 12 à 18 mois d’avance au niveau de notre technologie, mais il faut aller vite».
Le chef d’entreprise a donc décidé non seulement d’ouvrir un bureau à New-York, qui comptera une dizaine de personnes dès janvier, autant qu’à Londres, mais également de s’y installer avec sa famille. D’ici la fin 2017, l’effectif devrait doubler et ContentSquare se déployer vers l’Asie, une priorité dès 2018. Le future licorne va également investir dans la R&D, notamment en intelligence artificielle.
ContentSquare a ainsi lancé, Mr. Robot, un outil d’aide à la décision qui recommande au client des solutions, selon les données analysées afin d’anticiper les besoins des utilisateurs. L’aventure, qui n’est pas sans rappeler celle d’un autre petit frenchy devenu grand, Criteo, est donc loin d’être finie. Tout le mal qu’on peut souhaiter à Jonathan Cherki, c’est de connaître le même succès.
Un succès plus que prometteur
CA : 4 M€ en 2015
110 salariés à Paris et à Londres, dont une moitié d’ingénieurs
Clients : Accor, Best Western, Kering, L’Occitane, L’Oréal, Modani, Unilever
Actionnaires : Jonathan Cherki, investisseurs privés dont Eric Boustouller (vice-président Microsoft Europe), Patrick Bertrand (DG Cegid), François Bourdoncle (cofondateur d’Exalead), Highland Europe
Concurrence : Adobe, Google, Clarizen…