Selon la SNCF, la fraude coûte 300 millions d’euros par an. Est-ce une raison pour se rattraper sur des voyageurs qui ont bien payé leur billet ? La rédaction d’Entreprendre reçoit de nombreuses plaintes d’usagers désabusés et interloqués face aux pratiques parfois abusives de la SNCF. Témoignage.
L’histoire de Charles G., père de 2 enfants, est révélateur de dérives qui se multiplient chez le transporteur.
Sur un trajet TGV Paris – Lyon n°6624, le 29 avril 2023, le père de famille (Ref TFVZRC) écope d’une amende de 128 euros. Motif : il n’a pas la carte d’identité de son fils. Du moins, pas physiquement, car il dispose bien d’un scan de la carte d’identité de son fils sur son smartphone. Mais cela est jugé il non recevable pour l’Agent Contrôleur (AS087), Emmanuel, qui exige une pièce d’identité physique de l’enfant de 13 ans car un scan peut être falsifié.
Excès de zèle
L’enfant, comme son père, sont choqués par la situation. « Je prends le train très souvent avec mes enfants, je venais même d’être contrôlé 2 fois sur mes correspondances précédentes, jamais on ne m’a demandé la carte d’identité de mon fils… » déclare le père de Sylvain. Et pourtant, le contrôleur de la SNCF est en droit de la demander. Et c’est ce que fait son collègue auprès d’une autre famille assise dans le carré suivant. Même défaut de présentation de carte d’identité de la fille de 14 ans, même sentence. « La fille était en pleur, et sa tante qui l’accompagnait était indignée. Comme moi, elle avait acheté son billet et disposait aussi de sa carte avantage et avait une photocopie de la carte d’identité de sa nièce. »
Cette situation soulève plusieurs questions : les mineurs sont-ils obligés de voyager avec leur carte d’identité ? A quoi cela sert de dématérialiser ses cartes Avantages et d’avoir des photos de leurs titulaires ? La SNCF dit une chose et son contraire : sur son site, elle indique qu’une fois la carte dématérialisée, « Plus besoin, à ce moment-là, de montrer votre pièce d’identité ». Dans ses conditions générales d’utilisation, elle stipule que tout voyageur doit pouvoir présenter sa carte d’identité et qu’à défaut son billet sera considéré comme non valable.
En cas de litige, la contestation auprès de la SNCF est possible et si elle échoue, il reste la possibilité de saisir le médiateur.
L’image de la SNCF écornée
Mais au-delà de l’amende le plus dur reste l’expérience vécue par les enfants selon le père de famille: « Le contrôleur a dit devant mes enfants que j’étais en situation de fraude, ma fille de 5 ans m’a ensuite demandé si je risquais d’aller en prison… Mon fils m’a dit qu’il pouvait m’aider à payer l’amende. ». Une situation vécue comme injuste et traumatisante pour la famille qui avait pourtant des billets en règle…
Du côté de la SNCF, c’est le silence radio. Pourtant, Didier L. , agent contrôleur depuis 1998, confesse que ces pratiques sont fortement encouragées : « Depuis plusieurs mois, notre hiérarchie insiste pour que nous soyons tres fermes, quitte à être parfois injustes. Dans les faits, présenter un scan de sa carte d’identité ne devrait poser aucun souci. Pourtant, nous sommes poussés à verbaliser. C’est un vrai souci, d’autant plus que cela génère souvent des conflits avec les passagers qui s’estiment lésés et injustement sanctionnés. Cela nuit à l’image de la SNCF. »
A. Bodkine
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