Par Julien Niquet, président d’Epsor
Tribune. La crise sanitaire que nous traversons montre l’importance de la culture d’entreprise dans son adaptabilité et la protection de ses collaborateurs. Propulsée sur le devant de la scène, la RSE devient un critère incontournable d’attractivité et de rétention des talents. Si l’émergence de la responsabilité sociétale des entreprises (RSE) s’est faite au fil d’initiatives disparates ; la pandémie qu’affronte actuellement le monde vient brusquement de lui donner une dimension incontournable et urgente.
L’histoire de la RSE est celle de la prise de conscience progressive de l’impact que les entreprises ont, tant par leurs actions externes que leur culture interne, sur la société. En effet, dans les années 90, les entreprises se contentaient de créer des fondations ou de faire du mécénat, et il a fallu attendre le début des années 2000 pour assister à une véritable prise de conscience, et au lancement de gammes de produits “verts”.
Si le mouvement s’est ensuite accéléré dans les années 2010, avec l’apparition de nouvelles entreprises, désireuses d’avoir un impact positif sur la société à travers leurs salariés et consommateurs, l’entrée dans les années 2020 et la crise qui l’inaugure va faire de la RSE un facteur d’impact sur la société, d’attractivité des talents et même de création de valeur sans précédent.
Une démarche multiforme
La RSE comprend d’innombrables initiatives, qui peuvent être distinguées en trois grands piliers. Le premier – et le plus mis en avant aujourd’hui, car il est au cœur des problématiques mondiales – est environnemental. Le deuxième comprend tout ce qui a trait au social – engager des profils différents, former et accompagner les collaborateurs afin qu’ils s’épanouissent au sein de l’entreprise. Le troisième, enfin, est économique, et concerne la gouvernance des entreprises, leur positionnement et l’impact de leur proposition de valeur sur la société.
La mise en place de la RSE au sein d’une entreprise est en effet aussi diverse que les entreprises qui, justement, composent la société. Jusqu’à présent, elle restait encore un domaine relativement flou et trop peu encadré pour imposer de réelles normes contraignantes à l’ensemble des entreprises. Dans un contexte de pandémie qui interroge sur la responsabilité des entreprises, ce flou ne peut plus demeurer car les clients vont devenir de plus en plus soucieux de l’impact des marques avec lesquelles ils s’engagent.
Une démarche interne et externe à l’entreprise
Mais, plus encore, les collaborateurs vont se sentir plus que jamais concernés par la RSE de l’entreprise dans laquelle ils travaillent ou prévoient de travailler. Parmi les actifs « millenials », 79 % considèrent déjà la RSE comme un critère majeur de leurs recherches d’emploi, et 76 % que la mise en place d’une démarche RSE passe avant le montant du salaire**. Des chiffres qui devraient encore sensiblement augmenter dans le « monde d’après ».
Quelles mesures concrètes une entreprise mettait-elle en place avant la crise, comment a-t-elle su y répondre pour garantir la sécurité de ses collaborateurs et quelles évolutions de sa politique de RSE prévoie-t-elle à l’avenir ? Telles sont les questions que se poseront, légitimement, les collaborateurs. Pour préserver leur image de marque et donc leur attractivité, il est donc essentiel pour les RH de mettre l’accent sur la stratégie RSE de l’entreprise, et de communiquer sur leurs engagements – ou nouveaux engagements – auprès des collaborateurs.
La RSE : nouvel outil d’attractivité et de rétention des talents
La période qui s’ouvre s’annonce difficile pour le marché du travail. Dans ce contexte, les entreprises qui voudront attirer des talents devront redoubler d’efforts et mettre en avant la vertu de leur politique RSE, pour convaincre des personnes déjà en poste de prendre le risque de le quitter. Attractivité allant de pair avec fidélité, il sera également essentiel que la démarche RSE de l’entreprise soit sincère et fasse à part entière partie de sa stratégie de création de valeur. À défaut, les entreprises ne parviendront pas à retenir les talents car ceux-ci disposeront toujours d’un choix sur le marché du travail, et iront donc chercher ailleurs les valeurs qu’ils n’ont pas trouvées à leur poste.
Vouloir faire de la démarche RSE la quintessence de l’attractivité agirait au contraire comme un levier de performance, car c’est en définitive ce qui permettra de retenir les talents : 70% des salariés seraient plus loyaux envers une entreprise qui engage des actions responsables**. Les entreprises qui l’ont compris sont celles qui attirent les talents qui leur permettront de prendre un avantage compétitif dans les années à venir. Si ces actions de RSE concrètes ont souvent trait à la gouvernance des entreprises – transparence des salaires, implication de tous dans la prise de décisions stratégiques ou parité au sein du conseil d’administration, elles s’expriment aussi dans le recrutement, en choisissant des profils atypiques ou en réinsertion, par la mise en place d’un vrai congé parental pour le 2ème parent, ou par un format souple incluant du télétravail – qui devrait enfin s’imposer largement.
Pour que le monde de demain ne ressemble pas au monde d’hier, les entreprises doivent prendre davantage de mesures pour avoir un impact positif sur la société : il en va du bien commun comme de leur propre performance. Impliquer la RSE dans toutes les dimensions de la création de valeur suppose que les problématiques soient portées par la direction elle-même : c’est la seule manière d’assurer une réelle cohérence entre la stratégie de l’entreprise et les nouvelles exigences RSE.