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Cryptomonnaies : ces entreprises françaises qui brillent grâce au bitcoin


Avec l’envolée récente du cours du Bitcoin, le secteur des cryptomonnaies est sous le feu des projecteurs. S’il est encore loin de son homologue américain, l’écosystème français, dont les deux figures de proue sont les licornes Ledger et Sorare, reste l’un des plus dynamiques d’Europe.

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Hausse des cours depuis six mois, valorisation globale approchant les 4 000 milliards de dollars, levées de fonds records, prise de fonction de Donald Trump, premier président pro-crypto de l’histoire des États-Unis : l’industrie des cryptomonnaies profite d’un alignement des planètes sidérant depuis quelques mois.

Forcément, cette euphorie profite à l’industrie dans son ensemble, et notamment aux entreprises françaises qui voient affluer de nouveaux clients au gré de la hausse des cours. Il faut dire que les acteurs tricolores évoluent dans un environnement relativement favorable : un vivier d’ingénieurs de haut niveau, une appétence des fonds de capital-risque américains pour les start-up françaises, de nombreux dispositifs de financement privés et publics (Bpifrance a déjà accompagné près de 200 start-up du secteur), une législation avant-gardiste avec le statut PSAN (prestataire de services sur actifs numériques), et un taux d’adoption significatif (entre 12 et 18 % des Français détiendraient des cryptos).

Cette confluence de facteurs a donné naissance à deux leaders mondiaux : Sorare et Ledger. La plateforme d’échange de cartes de foot virtuelles Sorare, qui a levé 680 millions de dollars en 2021, compte aujourd’hui plus de 3 millions d’utilisateurs dans 180 pays. De son côté, Ledger, premier fabricant de portefeuilles de cryptos au monde, sécurise près de 20 % de tous les actifs numériques en circulation. La firme de Vierzon, fruit de la fusion en 2014 de trois sociétés (La Maison du Bitcoin, BTChip et ChronoCoin), a écoulé plus de sept millions d’unités en dix ans. La valorisation de l’entreprise créée par Eric Larchevêque (lire interview en page 12), Joël Pobeda et Nicolas Bacca a atteint 1,3 milliard d’euros. Un succès industriel auquel a notamment contribué Bpifrance lors des premières levées de fonds de Ledger.

Depuis 2022, la banque publique soutient d’ailleurs une initiative lancée par Ledger et Cathay Innovation : un fonds doté de 100 millions d’euros pour financer les futures licornes du secteur. Il a notamment pris part au dernier tour de table – 50 millions d’euros levés en 2024 – de la pépite tricolore Flowdesk, acteur majeur de la fourniture de liquidités sur le marché crypto, en particulier aux États-Unis.

Des historiques et des petits nouveaux

À l’image des fondateurs de Ledger, d’autres pionniers se sont lancés au début de la décennie 2010, lorsque le secteur en était à ses balbutiements. Certaines de ces entreprises ont survécu, comme Paymium (2011) et Coinhouse (2014). Créé deux ans après la création du protocole Bitcoin, Paymium fut l’une des premières plateformes d’achat et de vente de cryptos de l’histoire. De son côté, Coinhouse fut longtemps une filiale de Ledger avant de prendre son envol et d’atteindre le cap des 500 000 clients en Europe.

Parmi les réussites plus récentes, on retrouve Meria (ex Just Mining). Fondée par l’entrepreneur Owen Simonin — connu sous le pseudonyme « Hasheur », du nom de sa chaîne YouTube aux 733 000 abonnés —, la PME propose plusieurs outils d’investissement et revendique 150 millions d’euros d’actifs sous gestion. Permettre à monsieur ou madame Tout-le-Monde d’investir de manière sécurisée, c’est également ce que proposent d’autres acteurs répartis aux quatre coins de l’Hexagone : Stackinsat (Pyrénées-Atlantiques), Bitstack (Bouches-du-Rhône), Deskoin (Moselle) et Mon Livret C (Rhône). Le dernier-né est la néo-banque Deblock, qui a levé 12 millions d’euros lors de son lancement en avril 2024.

Fondée par d’anciens cadres de Revolut et Ledger, l’entreprise basée à Lille propose un portefeuille crypto directement intégré à un compte courant.

La France, reine de la finance décentralisée ?

L’accélération de l’adoption des cryptos a conduit à l’émergence d’une myriade d’acteurs positionnés sur différentes verticales. La France est notamment en pointe dans la finance décentralisée (Angle, Morpho, Mangrove, Kiln), le développement d’infrastructures (Acinq, Ternoa, Massa, Nomadic Labs), les portefeuilles (DFNS), le minage de cryptomonnaies (BigBlock, Feel Mining, Startmining), l’analyse des transactions (Bubblemaps), l’immobilier tokenisé (KryptoStone, Fraktion), la décarbonation (Carbonable) ou encore l’éducation (Alyra, BBS).

Côté investissement, de nombreux gestionnaires de patrimoine (Montaigne Patrimoine, Tobam, Melanion Capital, White Loop Capital) et d’incubateurs (Cube3, PyratzLabs) se sont spécialisés dans le financement de projets cryptos. Les entreprises proposant des services ont également le vent en poupe. C’est le cas des cabinets d’avocats spécialisés qui ont fleuri ces dernières années (Waltio, ORWL, Hashtag Avocats). Le développement du secteur a aussi été accompagné par l’essor de médias spécialisés, à l’instar de The Big Whale créé par d’anciens journalistes des Echos et de Capital.

La réglementation, un atout ou un boulet ?

Si l’industrie des cryptomonnaies reste largement dominée par les géants américains et asiatiques, la France ne joue pas, pour autant, les seconds rôles. L’attrait des investisseurs étrangers pour les start-up hexagonales en est la preuve. Mais tout n’est pas rose. Les entreprises du secteur sont très dépendantes du cours du Bitcoin et de ses fluctuations souvent brutales. Conséquence directe : elles doivent être capables de survivre durant les longues périodes de baisse qui peuvent durer jusqu’à deux ans…

Les entrepreneurs français doivent tenir compte d’un autre paramètre : la régulation. Nombre d’entre eux ont récemment fait part de leur inquiétude suite à la mise en place de la nouvelle réglementation européenne (MiCA), entrée en vigueur en décembre dernier et censée assainir le secteur. D’autant que de l’autre côté de l’Atlantique, le virage outrageusement pro-crypto initié par la nouvelle administration américaine, sous l’égide de Donald Trump, pourrait créer un appel d’air vers les États-Unis dans les mois à venir, incitant les investisseurs à privilégier les acteurs américains au détriment de l’Europe et de la France…

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