À Taradeau dans le Var, le château de Saint-Martin, domaine familial depuis trois siècles rachète le domaine de Matourne à Flayosc (30 hectares).
Une pierre à sacrifice a été découverte sur les terres témoignant du passage des humains sur cette terre à l’Antiquité. Mais point de vigne en cette époque reculée. Les ruines en témoignent, ce sont les Romains qui ont établi dans ce lieu l’un des premiers vignobles de Gaule. Un certain Valerius semble avoir été le premier à exploiter cette terre aujourd’hui varoise qui lui avait été offerte par César lui-même il y a plus de 2000 ans. Une tradition qui permettait de récompenser les fidèles soldats et officiers. Pendant 8 siècles, les Romains et leurs descendants ont poursuivi la culture de la vigne en cet endroit. On retrouve ensuite la présence des incontournables moines.
Dans ce cas, il s’agit surtout des moines de Lérins qui ont créé un prieuré viticole et l’ont occupé du Xe au XVIIIe siècle. C’est de cette époque que date la magnifique cave souterraine, encore utilisée à présent. En 1740, le Comte de Villeneuve Bargemon fait construire le Château pour l’offrir à sa fille Anne.
Il s’est transmis au fil des générations jusqu’à aujourd’hui, où Adeline de Barry en a à son tour hérité. Car, fait assez rare, ce sont les femmes qui ont hérité de ce château au fil des siècles. Le seul représentant de la gent masculine fut le grand-père de la propriétaire, le comte Edme de Rohan Chabot.
Le domaine s’agrandit d’un tiers
Adeline et Renaud de Barry portent la lourde responsabilité de cet héritage, et contribuent à leur tour à développer le domaine. Il y a cinq ans, ils ont racheté le Liquoristerie de Provence, une entreprise artisanale spécialiste des alcools locaux qui contribue à présent à hauteur de 1/3 du chiffre d’affaires. Mais cette année, une nouvelle étape a été franchie, le domaine situé à Taradeau dans le Var a procédé à un rachat important. Il est extrêmement difficile de trouver un domaine viticole en Provence, et onéreux.
Mais lorsque l’on est déjà présent sur le terrain et que l’un des vignerons de la zone décède sans successeur désigné, il est possible de se positionner rapidement. C’est ce qui est arrivé pour la propriété de Jurgen Spaethe, propriétaire du domaine de Matourne à Flayosc, à environ 15 kilomètres de celle des Rohan Chabot.
La négociation a porté ses fruits, les 30 hectares de Matourne appartiennent dorénavant à la famille d’Adeline de Barry. Un peu moins de la moitié de la surface est consacrée à la vigne, plus particulièrement pour une vinification en rouge.
Production à la pointe
Le domaine est certifié HVE et labellisé Terra Vitis, et ses propriétaires travaillent déjà depuis longtemps sur les questions de stress hydrique, de gel, d’immunité, explorant des pistes telles que l’homéopathie, la physique quantique, tout comme la génodique qui étudie les effets de la musique sur les plantes et les animaux. Le domaine est d’ailleurs Réserve Nationale, zone Natura 2000.
La propriétaire est accompagnée dans ce travail par l’agronome Mathieu Archambault, qui intervient fréquemment en France en tant que consultant sur le sujet de la conservation des sols. La certification Terra Vitis créée il y a 25 ans permet de s’appuyer sur des pratiques globales durables et de communiquer sur l’écoresponsabilité de la fabrication et l’élevage de vins. On parle souvent du circuit « de la fourche à la fourchette », dans ce cas la démarche s’applique à partir de la vigne pour aller jusqu’au verre. Le travail consiste en l’analyse des méthodes de production biologiques, biodynamiques et autres afin de pouvoir concocter la recette idéale et adaptée à la vision écoresponsable des propriétaires.
12ème génération
Le couple de Barry a quatre enfants, deux fils et deux filles. Un fils, Erwann, est déjà dans le secteur, puisqu’il a fondé le site Twil, qui vend du vin bien entendu. Il l’a cofondé, tout comme le site La belle Collection. Andrane, sa sœur travaille à la communication. Quant à leur mère, elle a annoncé qu’il lui est impossible d’imaginer que le domaine passe en d’autres mains que celles de la famille. L’objectif du couple est donc clair, faire en sorte que le domaine permette à la prochaine génération de vivre du domaine, ce qui explique la politique de croissance externe.
Car la rentabilité d’un domaine viticole est toujours relativement fragile, même si l’œnotourisme et l’événementiel permettent à présent de consolider les bases financières. Les vins sont vendus un peu partout dans le monde et référencés dans des lieux prestigieux, parmi lesquels rien de moins que le Palais de l’Élysée, ou la table de Georges Blanc, le maître triplement étoilé de la Bresse.
Anne Florin