La couleur, la soie, les dessins si reconnaissables de la marque Léonard réjouissent ses clients depuis 1958. Le succès ne s’est jamais démenti grâce à l’inventivité de son fondateur, Daniel Tribouillard, qui a tracé la voie pour ses filles, Nathalie et Virginie.
Dès la création de la célèbre maison, Daniel Tribouillard était déjà bien présent en tant que directeur général et artistique. Son talent innovant le conduit dans diverses directions, signant des dessins exclusifs pour les grandes marques de luxe françaises, créant la section parfums, puis la première boutique de la marque en 1970 avant le lancement des accessoires. En toute logique, l’homme devient PDG du groupe et rachète même l’entreprise en 1987.
Une profusion orale
Léonard est réputé pour ses dessins délicats autour de bouquets d’orchidées (fleur emblématique de la marque), de camélias ou d’arums. Daniel Tribouillard a réussi à créer un style propre à Léonard, reconnaissable entre tous, la marque des vrais artistes. Ce point fort est l’ADN de la maison et lui permet de traverser le temps. Sans identité forte, la longévité est parfois problématique, même si cela impose également des contraintes aux designers qui travaillent ensuite pour une maison de ce type. Maison de luxe, la Maison Léonard utilise la soie et le cachemire avec bonheur. C’est cependant le jersey de soie qui a fait sa réputation. Utilisé dès 1968 par Daniel Tribouillard, le slogan de l’époque fait mouche : « La robe Léonard, 150 grammes de bonheur ».
Fières de leur héritage
La maison Léonard est française et toujours indépendante. Dirigée aujourd’hui par Nathalie Tribouillard-Chassaing, PDG depuis 2017, et Virgine Tribouillard-Bienvenu, elle poursuit sur sa ligne stratégique, notamment grâce à l’extraordinaire trésor de 5000 dessins exclusifs disponibles et au savoir-faire des usines italiennes. La mission donnée lors de la succession était claire pour la nouvelle PDG : « Innover tout en respectant l’histoire de notre maison et ce, en collaboration avec ma sœur Virginie ».
Aller de l’avant…
Si l’héritage constitue une véritable force pour la marque, il convient aussi de pouvoir aller plus loin. L’image de la femme créée par le fondateur ne peut pas être identique à celle de ses filles. Là est le cœur du concept, respecter des fondamentaux sans censurer l’innovation et la nouveauté indispensables au progrès. Il s’agit d’un travail d’équipe ; chacun apportant sa contribution sur un projet commun, difficile parfois à mener en période pandémique, d’autant que de nombreuses boutiques ont été fermées.
… dans un contexte compliqué
Les périodes difficiles sont prétexte à créativité, cela s’est confirmé à de très nombreuses reprises par le passé. Pour Léonard, la fermeture de ses boutiques fut l’occasion de repenser la stratégie. L’offre actuelle est concentrée sur les robes, habillées, aux prix relativement élevés, à partir de 1500 euros. La plupart des clientes achètent en boutique, prenant plaisir à essayer, à être conseillées. Or, du fait des restrictions ces clientes ne pouvaient plus venir, et elles ne sortaient plus, faute de soirées et d’événements.
Des choix pour le futur
Nathalie Tribouillard a donc fait des choix afin de préserver le futur de l’entreprise. Le premier pas relativement facile est d’accentuer les ventes d’accessoires, tels foulards et parfums, plus facilement vendus y compris sur le net. Le second, nettement moins évident, est de se lancer dans un nouveau segment de marché, la décoration maison, sous diverses formes et en collaboration avec d’autres noms, afin de séduire une cible plus jeune, grâce à des prix plus accessibles (dans les 300 euros) et des produits qui sont également vendus sur la boutique en ligne. Avec Oli Paris, Léonard propose depuis quelques mois une gamme de coussins grâce à des tissus de soie qui étaient stockés dans la maison, des produits faciles à imaginer dans son intérieur. Avec la designer Maryam Mahadavi, ce sont par ailleurs des tabourets qui sont nés, recouverts sur leur assise de magnifiques imprimés Léonard.
En ligne tu seras
Le tournant pris par Léonard semble avoir attiré une nouvelle cible. Intéressant, mais aussi et surtout indispensable. En effet, les clientes fidèles ont vieilli avec la marque, une évolution logique. Le temps est donc venu de penser à un rajeunissement de la clientèle. Cela passe par le digital, les réseaux sociaux et les prix. Chacun s’impatiente donc de voir la collection 2022 qui, selon l’annonce de sa dirigeante, devrait mettre en avant une collection capsule permettant de recruter de nouveaux acheteurs.
De belles perspectives
Nathalie Tribouillard-Chassaing a des idées extrêmement claires sur les capacités de survie des entreprises familiales du luxe. Elle se désole de voir de grands noms français connaître de vrais déboires, car la gestion a pris le dessus sur le côté artisanal. La notion de patrimoine n’est pas pour une entreprise celle que l’on peut avoir pour d’anciens bâtiments. Si l’on restaure des châteaux à l’ancienne, les compétences artisanales, quant à elles, se doivent de survivre en restant vivantes, car elles font partie des fondations du savoir-faire. C’est ce tout que les clientes achètent. La PDG, formée par son père dès l’âge de 22 ans, entend bien garantir l’indépendance future de l’entreprise. Elle a entamé la transformation de la société et compte également sur de nouveaux marchés, comme la Corée du Sud ou la Chine. Une stratégie globale qui permettra à Léonard Paris de retrouver son chiffre d’affaires de 2019 de 150 millions d’euros.
A.F.