Une loi examinée aujourd’hui au Sénat vise à renforcer les garde-fous encadrant le démarchage téléphonique, au risque de pénaliser les entreprises en situation de « challengers » sur certains marchés très concurrentiels et au détriment du pouvoir d’achat des consommateurs.
Votée en janvier dernier par l’Assemblée nationale, la proposition de loi du député Christophe Naegelen visant à encadrer davantage le démarchage téléphonique doit être débattue aujourd’hui en séance plénière devant le Sénat. Un texte déjà remanié par la commission des lois de la haute assemblée, qui est déjà revenue sur un amendement voté au Palais Bourbon interdisant la vente directe dans le domaine de la rénovation énergétique afin de ne pas créer de rupture d’égalité devant la loi entre professionnels. Mais aussi de ne pas interdire l’utilisation de cette pratique de vente directe pour l’ensemble du secteur, à cause de l’existence de certaines brebis galeuses.
Ces précautions n’ont pas convaincu plusieurs associations de consommateurs à l’instar de la CLCV, de Familles de France ou encore de l’UFC-Que Choisir qui se sont émues du rejet de cette disposition, en raison de l’ampleur qu’aurait pris le phénomène. Dans un communiqué publié hier, celles-ci affirment ainsi que 9 Français sur 10 seraient « victimes » du démarchage téléphonique. Un chiffre qui serait cependant surévalué selon une étude IPSOS, qui précise quant à elle que 34% des Français interrogés déclarent ne jamais recevoir d’appels de prospection sur leur téléphone fixe et 26% jamais sur leur mobile.
Bloctel, un service largement connu des Français mais sous-utilisé
Les débats parlementaires ont par ailleurs remis en lumière le service Bloctel, et donné l’occasion d’évaluer l’efficacité de ce dispositif destiné à protéger les consommateurs des dérives du démarchage téléphonique en mettant en place des garde-fous. Selon la même enquête d’IPSOS, 65% des Français ont connaissance de ce service, mais seuls 29% à s’y être inscrits.
Lancé il y a quatre ans, à la suite du vote de la loi Hamon en 2014, ce service entièrement gratuit permet aux Français d’inscrire jusqu’à 8 numéros de téléphone pour lesquels ils ne souhaitent plus être contactés par des services commerciaux.
De leur côté, les entreprises qui ont recours à la vente directe sont, pour leur part, tenues de déposer leurs fichiers avant toute campagne de prospection, mais également une fois par mois. En cas de contact par une entreprise commerciale, les consommateurs peuvent grâce à ce dispositif remonter tout appel de prospection à la DGCCRF.
Le démarchage téléphonique, une pratique de vente
Dans de nombreux marchés règlementés et très concurrentiels, le démarchage téléphonique s’est imposé comme un levier d’acquisition de clients indispensable pour les entreprises en situation de « challengers », capables de faire baisser les prix. Pour ces dernières en effet, la vente directe auprès des consommateurs permet de combler rapidement leur déficit de notoriété ou d’adresser certaines catégories de prospects dans le cadre de stratégies commerciales ciblées. La meilleure connaissance par les consommateurs des offres existantes constitue dans le même temps un levier essentiel pour faire baisser les prix. En particulier ceux de certains biens et services, accessibles par le biais de marchés en situation monopolistique de fait, où le défaut d’information des consommateurs limite leurs possibilités de faire jouer la concurrence