Francois Almaleh, association APIA (Administrateurs Professionnels Indépendants et Associés)
Les statistiques constantes affirmant que des centaines de milliers d’entreprises sont sans successeurs ou seraient à vendre masquent la réalité de taille des entreprises, entre les TPE sur-représentées en France et les entreprises plus grandes. Les dirigeants de PME/ETI sont globalement bien épaulés par leurs notaires, avocats, experts-comptables qui leur présentent les effets du pacte Dutreil, les donations pre-cessions, les mandats de protection future ou à titre posthume, les dispositifs français sont bien structurés et efficaces.
A l’inverse de la transmission des entreprises allemandes où tout se prépare sur le long terme, la particularité française repose, outre la taille des entreprises, sur une part importante des fonds d’investissement en entreprise, des banques privées concurrentielles voulant capter des capitaux post-cession, et une culture pas assez axée sur la gouvernance d’entreprise. Comparaison n’est pas raison, quels sont les principes de gouvernance visant à pérenniser les entreprises en France ? Dans le domaine des PME et ETI, l’expérience pratique de l’association nationale APIA et de ses membres, tous dirigeants, repose sur la performance de l’entreprise par le rôle structurant d’un administrateur indépendant. Apporter de la structuration et de la valeur ajoutée. Celui-ci réussit sa mission par la proximité avec le dirigeant et son conseil d’administration.
Cet administrateur indépendant doit composer en fait dans une alchimie à trois composantes : les volontés du dirigeant, personnelles, financières, patrimoniales et familiales, la pérennité de l’entreprise, créée ou reprise, et une vision centrée sur l’intérêt social et la réduction des risques. Autant les conseils d’administration ou comités stratégiques œuvrent collectivement sur le développement de l’entreprise, autant la réflexion du dirigeant souhaitant partir en retraite est plus confidentielle, dans un cercle restreint.
L’administrateur indépendant, aux côtés du dirigeant, doit être force de proposition pour éviter la rupture économique de l’entreprise, que celle-ci soit cédée à un tiers, ou transmise familialement. La nécessaire vision à 360° requiert aussi des qualités didactiques pour réussir le passage de témoin afin que la phase transitoire entre le départ et la reprise se passe avec le moins de perturbations possibles au niveau des clients, des fournisseurs, du personnel, etc. Les conseils tiers doivent être professionnels, à l’instar de la stratégie d’APIA en ce sens.
Dans le cadre d’une vision globale, deux principes doivent conduire à notre sens l’action d’un dirigeant : réunir spécifiquement ensemble notaires, avocats, experts-comptables pour le projeter post-activité, et un comité plus réduit avec deux personnes a minima : l’une travaillant sur la partie privée, et la seconde sur le volet entreprise. On rappellera la nécessité de préserver avant tout l’intérêt de l’entreprise, surtout 1) quand des fonds de private equity entrent au capital et injectent de la dette car la stratégie doit réussir sans quoi la dette deviendrait contraignante, et 2) quand les enfants repreneurs ont moins d’assurance à diriger, la prise de risque n’est pas toujours l’apanage des nouvelles générations.
On dit également que les dirigeants en France sont ceux qui passent le moins de temps en formation (est-ce dû à la taille de nos entreprises ?). Il y a cependant des actions concrètes sur lesquels un dirigeant souhaitant partir à la retraite peut agir : structurer l’entreprise pour anticiper son départ avec un comex/codir uni et plus autonome, préparer la nouvelle génération en cas de transmission autour de principes assez simples : stratégie, formation et adopter la posture de dirigeant, les coachs ont ici leur intérêt. Mais aussi en amont participer à des clubs d’entrepreneurs, lire des articles ou livres sur ces sujets, connaître et travailler avec les conseils internes et tiers qui l’accompagneront. Le maitre-mot après la confiance est : réflexion-préparation-organisation.
Enfin, en quoi un administrateur indépendant peut aider le dirigeant partant en retraite, dans cette délicate étape, discrète et souvent (trop) confidentielle ? Cela tient en deux idées : il a une expérience d’autres entreprises pour ouvrir les échanges et il œuvre aussi dans un équilibre dual : dirigeant et entreprise. Le départ en retraite est une vraie étape pour un dirigeant, qu’il repousse souvent, parfois trop, et aussi parfois une opportunité les repreneurs en donnant un souffle différent : améliorer ses process, recalibrer la stratégie, sécuriser et se développer. Il faut naturellement que le départ du dirigeant soit le moins possible source de perte de savoir-faire, c’est essentiel. L’administrateur indépendant, rouage dans cette vision à 360°, assurera la cohésion des conseils pour réduire les risques et faire transmettre savoir et compétences.
Francois Almaleh, association APIA (Administrateurs Professionnels Indépendants et Associés)