A contrario, il existe des pays peu démocratiques dont la République est l’appellation officielle. On a aussi connu dans l’histoire des Républiques patriciennes, à l’instar de celle de Venise, que l’on peut assimiler avec le recul à des oligarchies. Mais il n’y a jamais eu officiellement de régime oligarchique. Comme pour les libertés « formelles » et « réelles » qu’aimaient distinguer les marxistes-léninistes, l’on pourrait ainsi parler de Républiques formelles et de celles ou le partage du bien commun est une réalité. Le critère de l’authenticité est finalement le degré de ce partage. Si ce dernier n’est pas assuré, on ne peut parler de République. Sans celle-ci où une relative harmonie sociale est assurée, il n’y a pas de démocratie véritable.
Le débat en France sur les améliorations du fonctionnement démocratique porte de manière récurrente sur l’aménagement des institutions. C’est une particularité française de « numéroter » les Républiques, comme s’il y en avait plusieurs possibles. Les trois dernières sont nées de profonds bouleversements historiques: les effets différés de la guerre franco-prussienne de 1870 pour la IIIème, l’après-seconde guerre mondiale pour la IVème et la guerre d’Algérie pour la Vème. Certains évoquent une VIéme République mais parlent-ils véritablement de République ou ce terme n’est-il que le paravent d’autres ambitions visant à de profondes ruptures ?
Quoi qu’il en soit, au regard de la pratique des institutions des vingt dernières années et des processus électoraux au cours de la même période, le débat a fini par se concentrer sur quelques points tels que la durée du mandat présidentiel, le rôle du Parlement et la loi électorale. La réduction du mandat présidentiel de sept à cinq ans, par le référendum constitutionnel de septembre 2000, a altéré non seulement l’esprit mais aussi la pratique des institutions de la Vème République.
La coïncidence actuelle des mandats présidentiel et parlementaire prive le pays d’une « respiration » démocratique en cours de mandat du chef de l’Etat, alors que ce dernier s’efforce de demeurer un « monarque républicain » tout en perdant son rôle d’arbitre en voulant gouverner au jour le jour. Dans ce contexte – et faute du rétablissement du mandat présidentiel à sept ans ou du passage à un régime parlementaire à l’allemande -, la cohabitation a des effets pervers mais le mérite de refléter l’état politique du pays et de contraindre au compromis une société n’y étant pas naturellement encline.
Patrick Pascal
Patrick PASCAL est ancien ambassadeur et président du Groupe ALSTOM à Moscou pour la Russie, l’Ukraine et la Biélorussie. Il est fondateur et président de « Perspectives Europe-Monde ».