Fondée en 1797, la vénérable a été reprise en 2019 par deux jeunes entrepreneurs, Pierre-Olivier Claudepierre et David Matheron, qui ont inauguré un nouveau site de production à Boigny-sur-Bionne (45).
Il est presque inutile de spécifier que Martin-Pouret est une Entreprise du Patrimoine Vivant, depuis 2021. Le vinaigre de vin, telle est son affaire. Le vin fermente trois semaines en fût de chêne, puis est mis à vieillir pendant au minimum un an dans d’immenses foudres.
Un produit noble
Le vinaigre est un produit ancien, dans certaines familles, on hérite encore des « mères » pour poursuivre la tradition familiale et garder ce goût si spécifique qui fait la typicité d’un assaisonnement. La production industrielle est cependant largement majoritaire, on retrouve des marques telles qu’Amora, Maille, Clovis et de nombreuses marques distributeurs, mais il n’y a plus que Martin-Pouret pour représenter le vinaigre d’Orléans. Le marché n’est pas simple, car si aujourd’hui les foyers ont tendance à disposer de plusieurs types de vinaigres dans les placards de leurs cuisines, vin, balsamique, citron, estragon et bien d’autres, il ne s’agit pas d’un achat que l’on peut qualifier de fréquent par rapport à d’autres produits alimentaires. Le développement passe donc par une gamme plus étoffée.
Le vinaigre compte chez Martin-Pouret pour la moitié de son chiffre d’affaires, et la moutarde lancée par l’ancien propriétaire s’est vue pousser des ailes, puisqu’elle représente 40 % des ventes. Un mouvement possible, car il n’y a pas eu de pénurie sur la moutarde Martin-Pouret en période Covid grâce au partenariat qui lie l’entreprise à des agriculteurs locaux qui produisent les graines.
Diversification
Martin-Pouret propose déjà de nouveaux produits tels que moutardes, cornichons, pickles, et a décidé d’innover il y a six mois avec le lancement de sauces froides. Leur particularité ? Elles sont faites à partir d’ingrédients 100 % français et le vinaigre d’Orléans est l’un d’eux. Ces sauces ne sont pas segmentantes, puisqu’il s’agit de deux ketchups en bocal (classique et fumé) et de trois mayonnaises en pot (onctueuse, à l’estragon, aux morceaux de cornichons). Une offre qui semble plaire puisqu’elle représente déjà 10 % du chiffre d’affaires global. Paul-Olivier Claudepierre (DG) et David Matheron (Président) préparent l’avenir. Les deux hommes ont racheté l’entreprise en septembre 2019 aux descendants des fondateurs, souhaitant réveiller « la belle endormie ». Ces princes charmants et férus de gastronomie sont à l’origine de bien des changements.
En un laps de temps très court, ils ont réussi à doubler le chiffre d’affaires, augmenter le nombre de salariés, référencer la marque dans de nouvelles enseignes de distribution, lancer de nouveaux produits et ce n’est pas terminé. Paul-Olivier Claudepierre connait bien l’univers auquel il s’attaque, il a travaillé pendant des années dans le monde du retail, chez Carlsberg, Illy ou Eurial. Quant à David Matheron, il est le financier et RH du duo après avoir exercé dans l’automobile et chez DCNS.
7,5 millions investis
Les deux associés portent en ce moment même un projet d’ampleur, le déménagement de l’entreprise de Fleury-les-Aubrais pour Boigny-sur-Brionne, à une vingtaine de minutes d’Orléans. Le Loiret garde donc son vinaigrier le plus ancien. Ce changement d’air inclut une nouvelle usine de 5 000 m² qui doit être prête en septembre et permettra de multiplier par 2,5 la capacité de production. En 2019, environ 600 000 produits étaient fabriqués, aujourd’hui, ce sont 1,3 million, et il est prévu de doubler ce dernier chiffre. Pour financer ce projet de 7,5 millions d’euros, une part minoritaire du capital a été ouverte au profit du fonds Sofiprotéol (société d’investissement du groupe Avril, spécialiste de l’agriculture et agro-alimentaire). Le process traditionnel restera respecté comme pourront le constater les visiteurs qui souhaitent en savoir plus sur les process de fabrication ou effectuer des achats dans la boutique. Ce projet prévoit également une dizaine de recrutements.
Ce n’est pas tout, Martin-Pouret souhaite à nouveau doubler son chiffre d’affaires et s’attaquer à de nouveaux marchés, notamment à l’export. Les produits sont déjà vendus au Japon, en Scandinavie, mais pourquoi pas la grande Amérique ? Après tout, les dirigeants ont tous deux déjà vécu et travaillé à l’étranger et sont familiarisés avec l’export. Or, les États-Unis représentent plus de 40 % du marché mondial des condiments, de quoi trouver une petite place pour Martin-Pouret, qui a également lancé ses moutardes.