Le confinement a eu pour effet d’accélérer la croissance de l’e-commerce en France. Cette période atypique peut-elle avoir des conséquences à plus long terme sur l’avenir du secteur ? Les explications de Jonathan Vidor, président fondateur de l’agence d’e-marketing JVWEB.
Le virage digital et « la fièvre de la livraison » se sont-ils poursuivis depuis la fin du confinement ?
Après avoir atteint des sommets pendant le confinement, la « fièvre de la livraison » s’est atténuée. Toutefois, les ventes en ligne restent plus élevées qu’avant le confinement. Le virage digital est enclenché pour de nombreuses sociétés qui n’avaient pas franchi le cap. Toujours plus d’entreprises vendent leurs produits ou services en ligne, soit directement sur leur site web ou via les places de marchés. L’e-commerce a gagné 2 à 3 ans de croissance avec la crise sanitaire. Même les micros-entreprises, comme les commerces de bouche, s’y mettent ! Si on prend de la hauteur sur le sujet, davantage qu’une dématérialisation du commerce, c’est le parcours client qui devient omnicanal en intégrant des points de contact via Internet.
Quels sont les secteurs de l’e-commerce qui surperforment « grâce » au Covid ?
Ce trimestre, ce sont les ventes des enseignes des Grandes Surfaces Alimentaires et des Grandes Surfaces Spécialisées qui ont explosé avec +83% par rapport à l’année dernière. La répartition des ventes entre produits et services profite à la vente de produits, qui représente 57% du chiffre d’affaires global cette année. Depuis le mois d’août, les ventes par Internet ont été multiplié par deux en alimentation spécialisée (boulangeries-pâtisseries, boucheries-charcuteries, commerces de primeurs…), loisirs, culture et jouets.
En revanche, en raison des contraintes de déplacement liées à la crise sanitaire, les achats de transports, voyages et billetterie, ont fortement chuté : la baisse des ventes s’établit à moins 75% au 2ème trimestre 2020 par rapport à l’année dernière, d’après le bilan e-commerce de la Fevad.
Le recrutement dans l’e-commerce peut-il « absorber » les pertes provenances des commerces physiques ?
Oui, le recrutement dans l’e-commerce peut absorber une grande partie des pertes, à la nuance que les profils sont différents. D’un côté, la majorité sont des employés dans le commerce traditionnel, et de l’autre, des cadres à haute valeur ajoutée et des livreurs et des logisticiens dans le numérique.
L’augmentation de la vente de produits en ligne est également accompagnée de besoins en manutention. Dans le secteur du commerce traditionnel, les services de livraison se sont développés et avec eux le besoin en salariés ou en intérimaires.
D’ailleurs, en prévision des ventes des fêtes de fin d’année, l’e-commerce recrute des milliers d’intérimaires.
Black Friday, Noël, soldes de janvier : peut-on prévoir un rush cette année ?
Des records sont attendus pour Noël et le Black Friday. Cette année, le chiffre d’affaires de l’e-commerce en France devrait dépasser les 22 milliards d’euros durant cette période. Avec la crise sanitaire, on ne peut pas prévoir exactement l’impact sur les achats de fin d’année, mais elle va favoriser le numérique. L’année dernière, la croissance était de +12% dans les secteurs du retail, de la maison et jardin ou encore du jouet. Cette année, nous nous attendons à +20%.
L’e-commerce peut-il remplacer les commerces physiques ? Quels secteurs sont les plus concernés ?
Non. L’e-commerce ne peut pas et ne doit pas remplacer les commerces physiques. Ce n’est pas souhaitable. L’idée, c’est d’avoir une offre online et offline complémentaires. Le parcours client est devenu omnicanal. Dans le secteur de la mode, les consommateurs essaient les vêtements en magasin et si la taille n’est plus disponible, ils commandent sur le site Web.
Aujourd’hui, le vendeur en magasin se concentre sur le conseil client et beaucoup moins sur la “vente”. Les offres « click and collect » se sont aussi développées. Les consommateurs font leurs courses en ligne et se font livrer en magasin, ce qui donne au magasin la possibilité de faire des ventes de complément. D’après une enquête de la Fevad, 38% des internautes français utilisent déjà le « click and collect » comme moyen de livraison. Il représente entre 10% et 15 % du volume des chiffres d’affaires dans certains secteurs comme la mode, le sport, l’alimentaire ou le bricolage.