Créé en 1984, Epita forme des ingénieurs en informatique en 5 ans après le Bac. Des profils très recherchés avec la digitalisation de l’économie. Entretien avec Joël Courtois, directeur de l’école.
L’EPITA a pour vocation de former des étudiants ayant fait le choix d’une carrière d’ingénieur avec des compétences de très haut niveau dans le domaine du numérique. L’école s’emploie également à développer les compétences mentales et comportementales des étudiants en les entraînant à gérer les situations de stress et de pression, à renforcer leurs compétences relationnelles et leur aptitude à travailler en équipe.
Le projet pédagogique dépasse donc le cadre de la simple transmission de données scientifiques et techniques. L’ouverture sur la recherche, l’innovation et l’entreprenariat font également partie de l’ADN de l’école.
«Nous essayons de leur donner un projet de vie en leur démontrant qu’une journée compte 24 heures, déclare Joël Courtois, Directeur de l’EPITA, c’est un concept que la majeure partie des lycéens qui intègrent l’école n’ont jamais envisagé dans toutes ses potentialités.» Sur une journée de 24h, on peut en effet travailler 12h en se faisant plaisir, tandis qu’il reste encore le temps nécessaire pour se divertir et profiter d’autres activités.
Le travail d’équipe avant tout
L’EPITA cultive une philosophie du savoir- faire et du savoir-être et entend faire naître et se développer une sorte de prédisposition et de reflexe au travail d’équipe chez les étudiants. Tout se fait en travail d’équipe. La transmission du savoir est quelque chose d’essentiel au sein de l’école. «Dans le domaine du numérique, la complexité est telle qu’un individu aussi brillant puisse-t-il être ne peut jamais tout savoir», précise le Directeur de l’EPITA.
Le flux de données existant dans tous les domaines associés au numérique (sécurité, réseaux, Télécoms, intelligence artificielle, multimédia) ne permet pas à une personne isolée d’absorber la totalité des évolutions. Être performant et se maintenir au meilleur niveau dans ce domaine en pleine effervescence nécessite donc de travailler en équipe dans une logique de transmission et de partage.
Cette philosophie de l’EPITA transparaît également dans la gestion de projets : les équipes, bien que concurrentes, doivent échanger des informations et communiquer leurs bonnes idées afin de créer une émulation collective positive. Une idée partagée a le mérite d’en faire émerger beaucoup d’autres et d’alimenter une spirale vertueuse. «Il faut échanger, communiquer et ne jamais laisser quelqu’un sur le bord du chemin», argumente M. Courtois.
L’EPITA est à l’opposé de la philosophie de certaines formations où chacun doit se battre et écraser son voisin afin d’être le meilleur. «C’est impossible dans le numérique, ajoute-t-il. Raisonner ainsi est une erreur fondamentale, on ne peut mener de grands projets qu’en travaillant avec les autres et non contre les autres. »
L’EPITA dispose de trois laboratoires de Recherche et d’un accélérateur de projets, Startup42, qui a pour vocation de valider la faisabilité technique et business de projets jusqu’à la création de startups. Par ailleurs, le groupe Ionis a récemment lancé l’incubateur d’entreprises IONIS 361.
«Il est essentiel de faire travailler les étudiants au contact de la recherche et de faire le lien vers l’innovation. Il est ainsi naturel pour nous d’avoir des créateurs de startups, confie Joël Courtois. Avec 4 à 5% de créateurs d’entreprises, c’est l’un des plus fort taux parmi toutes les écoles.»
«L’école de l’intelligence informatique»
Être dans l’intelligence informatique suppose une posture d’ouverture où l’on est en état d’écoute, où l’on observe en per manence de quelle manière le numérique peut transformer le monde.
Pour l’EPITA, l’enjeu consiste à appréhender le monde dans sa complexité économique et technique mais aussi à travers le prisme des relations humaines et de la communication dans les médias et les réseaux sociaux. La question est de savoir en quoi le numérique, et donc l’introduction d’outils informatiques, produit une société numérique dans laquelle une certaine intelligence se dégage.
La valeur ajoutée de l’EPITA
Au-delà de la transmission de compétenceset de connaissances, l’EPITA a la volonté d’apprendre à chaque étudiant à se connaître en l’aidant à mieux appréhender ses capacités intellectuelles, sa capacité à travailler en équipe et sa résistance physique.
Durant leur formation au numérique, les étudiants sont confrontés à des épreuves de “rush” car gérer des situations d’urgence fait partie du métier. «En situation d’urgence, précise Joël Courtois, il existe une pression psychologique et physique à laquelle nous préparons nos étudiants, apprendre à gérer ce type de contrainte étant assez original et singulier pour une école d’ingénieur.»
Les impacts de la génération Y et le défi de l’adaptation des cursus
«Cela nécessite une adaptation permanente, précise le directeur de l’EPITA, car, chaque année, nous découvrons une population un peu différente et des comportements qui ont évolué.»
L’EPITA atteste d’une réelle avance sur certains sujets. Cette génération Y éprouve un besoin névralgique de compréhension de son environnement, elle a besoin de comprendre pourquoi elle est là, ce qu’elle fait et comment le faire avec les autres. La génération Y refuse un pouvoir unique central, raisonne de façon beaucoup plus distribuée et s’inscrit dans une logique de partage des connaissances.
«Nous étions déjà dans ce schéma-là, explique Joël Courtois, par notre philosophie de partage et de travail collaboratif.» . Un autre challenge pour l’école est de faire évoluer les mentalités pour attirer les jeunes filles vers les carrières du numérique L’EPITA est très impliquée dans des actions de sensibilisation en collèges et en lycées. «Le monde numérique qui se crée ne peut fonctionner, explique Joël Courtois, sans l’implication forte des femmes.» . Les jeunes filles doivent massivement s’orienter vers le numérique pour répondre aux attentes de notre société.
L’international comme un axe de développement fort
L’EPITA fut la première école d’ingénieur à rendre obligatoire une expérience à l’étranger d’un semestre pour tous les étudiants en 2007 et elle s’y était engagé devant la Commission des Titres d’Ingénieur. La CTI aujourd’hui fait passer le message pour rendre obligatoire cette expérience internationale pour tous les ingénieurs, mais force est de constater que toutes les écoles n’ont pas encore atteint cet objectif.
«Le fait d’être parti très tôt sur cette voix est lié à notre domaine d’expertise, explique le directeur de l’école. Dans le numérique, on utilise les mêmes outils partout dans le monde, contrairement à ce qui se passe dans d’autres domaines d’expertise. À titre d’exemple, on ne construit pas de la même façon en Chine qu’en France et on n’y pratique pas la même médecine.»
Les projets portés par l’école ?
Concernant l’école en général, l’EPITA poursuit son développement international mais avec un nouvel axe sur l’implantation de campus à l’étranger. La formation continue constitue un second axe de développement. L’école a créé en mars 2015 SecureSphere by EPITA, une entité dédiée à la formation continue et positionnée sur le thème de la cyber sécurité.
L’école s’intéresse également aux problématiques liées à la responsabilité sociétale de l’entreprise (RSE). Elle prépare et sensibilise ses étudiants à la dimension éthique et sociétale du métier d’ingénieur, en particulier dans le domaine du numérique, et le met en oeuvre au sein même de l’école.
«Nous associons les étudiants à des projets d’aménagement de l’école et à l’organisation de programmes dans cette optique de RSE afin d’améliorer leur bien-être, explique Joël Courtois. En entreprise, ils auront nécessairement à réfléchir à cette problématique.»