L’application des technologies de l’information et de la communication (TIC) à l’ensemble des activités en lien avec la santé est en passe de modifier substantiellement les pratiques et plus globalement le système de santé.
L’e-santé renvoie non seulement à l’évolution technologique de la médecine mais également à une évolution des modes de pensée et des mentalités. Les praticiens et acteurs de la santé sont désormais plus sensibilisés aux contraintes économiques et aux opportunités induites par la technologie, les patients étant quant à eux moins passifs, plus ouverts et très largement connectés.
L’e-santé connaît un développement exponentiel sous des formes multiples et variées : télémédecine, prise en charge et accompagnement des patients, nouveaux systèmes d’informations déployés dans les hôpitaux, processus liés à des séquences administratives…
Les défis à relever
Vivre et vieillir en bonne santé constitue l’un des enjeux de demain auquel l’e-santé peut contribuer à répondre. La médecine doit en effet relever de multiples défis : vieillissement de la population, raréfaction des médecins en zone rurale, engorgement des cabinets de ville et des urgences, démultiplication des maladies chroniques, renforcement de l’automédication et de la télé-médication, nécessité d’une meilleure organisation structurelle, territoriale et de proximité…
« Il existe des moyens sous tension qu’il faut pouvoir utiliser plus intelligemment dans un souci d’efficacité et d’optimisation, explique Emmanuel Carli, Directeur Général d’Epitech, école spécialisée dans l’innovation et l’expertise informatique, membre de IONIS Education Group, qui atteste d’une forte compétence sur l’e-santé sur son campus de Strasbourg. Il devient vital de mettre en place des solutions techniques permettant d’optimiser la demande et le temps de travail des acteurs de la santé, mais également d’améliorer les soins sur le plan local et global. »
La médecine doit donc se réinventer dans un contexte d’économie du partage et du service en devenant plus participative, personnalisée, préventive et prédictive.
La technologie au service d’un enjeu sociétal fort
Les nouvelles technologies constituent un formidable levier permettant de repenser la médecine à la lueur des enjeux d’aujourd’hui et de demain, mais elles demeurent un moyen et non une fin.
« Les étudiants ne font pas de l’innovation pour de l’innovation, précise Axelle Ziegler, directrice des études d’Epitech. Ils réfléchissent à l’utilité pratique, l’innovation mais aussi à la manière dont elle s’insère au sein de la société. »
Les évolutions technologiques dans le domaine de la santé ouvrent un large champ des possibles : les systèmes d’information permettent une meilleure coordination au sein des établissements de santé, la télémédecine offre la possibilité de soins à distance, et la télé-santé intègre des services de suivi et de prévention dans un objectif de bien-être.
L’e-santé participe aussi à la consolidation des liens entre les praticiens et les patients qui peuvent échanger entre les consultations traditionnelles. Cette médecine « en continu » est de nature à rassurer les patients et à les responsabiliser en faisant d’eux des acteurs de leur santé.
Les réflexions pour l’avenir sont multiples.
Comment imaginer des objets et des services grâce à l’intelligence artificielle ? Comment capitaliser sur le potentiel des données qui sont agrégées pour proposer des soins de santé plus intelligents, efficaces et centrés sur le patient ? Quel est le potentiel en termes d’aide au diagnostic et à la prévention ? Autant de questions auxquelles les acteurs de l’e-santé devront apporter des réponses.
Former et initier les étudiants pour répondre aux enjeux de demain
Epitech a imaginé un processus d’accompagnement de ses étudiants leur permettant de se familiariser avec des domaines divers, dont la santé, et de décupler leur créativité autour de projets réels. « Nous leur donnons le framework (le cadre, en français – ndlr) dans lequel ils vont développer leurs compétences et exploiter leur potentiel afin de devenir un expert technique ou un entrepreneur, précise Emmanuel Carli. Nous leur ouvrons l’ensemble de notre écosystème : l’agence régionale Ile-de-France, des entrepreneurs, des décideurs, des investisseurs et des associations afin qu’ils puissent développer leurs solutions et lancer leur entreprise. »
L’Epitech Innovation Hub est un espace dédié aux expérimentations, au prototypage et au développement de projets innovants. Simultanément projets mentorés et propulseur de start-up, cet espace est ouvert à tous les étudiants. Dès leur 3ème année, les étudiants d’Epitech fourmillent d’idées pour des projets de santé connectée dont Médicision et AHIO sont l’illustration. Destiné aux médecins, Médicision est un compagnon d’aide au diagnostic. Lors de la rédaction du compte-rendu, Médicision analyse les symptômes décrits afin de proposer au médecin une liste des maladies potentielles, accompagnés des symptômes supplémentaires à vérifier. Cette solution apporte, en quelque sorte, un second regard au praticien.
AHIO, quant à lui, est un assistant personnalisé à destination des personnes autistes dont l’objectif est d’aider ses utilisateurs au moment de leur intégration en entreprise et dans leur vie quotidienne.
L’Epitech innovative project : de la phase de prototype à celle du projet concret
L’EIPestlerésultatd’untravailenéquipe de deux années dont l’objectif consiste à passer d’une phase de prototype à celle d’un projet-produit qui peut être mis en marché de façon viable, voire aboutir à la création d’une entreprise.
A l’occasion du forum Epitech Experience 2019, au cours duquel plus de 100 projets ont été présentés devant un jury externe, deux projets liés à l’e-santé ont été primés. Les étudiants d’Epitech Paris sont arrivés en tête du classement avec leur projet AVM, une solution de suivi clinique des patients atteints de mucoviscidose visant à améliorer leur qualité de vie en permettant à leur médecin de réagir au plus vite en identifiant une variation des constantes respiratoires en fonction de seuils d’alerte prédéfinis.
Cette solution permet de réduire la boucle de rétroaction et donc se soigner au plus tôt en proposant un suivi personnalisé. Ces étudiants, qui ont été financés par une fondation américaine à hauteur de 100 000 dollars, ont noué un partenariat avec une société suédoise qui leur a fourni des spiromètres connectés.
La seconde place est revenue aux étudiants d’Epitech Nancy avec leur solution d’assistance (Vibear), destinée aux personnes sourdes et malentendantes.
Une volonté forte de résoudre les vrais problèmes de la vie
La mobilisation des étudiants d’Epitech sur les questions d’e-santé se traduit par des actions très concrètes qui dépassent le simple cadre des apprentissages théoriques : l’organisation de séminaires en partenariat avec des hôpitaux ou encore la participation au Hacking Health Camp, un événement international dédié à l’innovation en santé.
Depuis quatre ans, le Salon Cité Santé de Nancy dévoile les dernières innovations dans le monde de la santé connectée. En 2019, le campus d’Epitech Nancy était partenaire de l’événement et des étudiants ont eu l’opportunité d’y présenter leurs projets EIP : la grande marche connectée mise en place par les étudiants d’Epitech Nancy et Les Parcours du Cœur. Depuis septembre, neuf étudiants ont travaillé sur cette application qui fait office de podomètre.
Ce type d’happening est une première, initiée par Axel Kahn, éminent scientifique, médecin, essayiste français et président de ce salon, qui a lancé cette première grande marche connectée pour sensibiliser à l’importance de la marche pour rester en forme. Les étudiants d’Epitech conduisent spontanément des projets en parallèle de la pédagogie. Ils ont ainsi lancé l’association POC (Proof Of Concept) dont l’objectif est de favoriser l’innovation portée par une responsabilité sociétale en se demandant comment faire avancer la société positivement grâce à la technologie.
Ils ont travaillé en collaboration avec des étudiants de Polytechnique sur une solution visant à réduire les acouphènes grâce à l’utilisation d’appareils pratiquant des encéphalogrammes pour stimuler certaines parties du cortex cérébral.
Isabelle Jouanneau