La Premier League et les sociétés de paris sportifs, c’est une grande histoire. Les habitués de ce championnat le savent bien, qu’il s’agisse des publicités à la mi-temps, des sponsors sur les maillots ou parfois même du nom de certains stades, le betting est omniprésent. Néanmoins, la donne va ou devrait bien changer très prochainement.
Si vous avez regardé un match de Premier League à la télévision au Royaume-Uni au cours des dernières années, vous aurez sans aucun doute entendu des expressions telles que « bet in play now » (parier en jeu maintenant), « latest live odds » (dernières cotes en direct) ou « £50 free bet » (pari gratuit de 50 £) pendant le match, surtout à la mi-temps. Bien entendu, les jeux de hasard ont toujours été liés au sport, mais l’essor et le développement de la culture moderne des paris dans le football ont été particulièrement intéressants à observer.
La récente affaire Sandro Tonali et Nicolò Zaniolo, milieux de terrain italiens évoluant respectivement du côté de Newcastle et Aston Villa, est sans l’ombre d’un doute l’élément déclencheur ayant poussé tout un championnat à tirer le signal d’alarme. Les deux joueurs se sont vu accusés d’avoir réalisé de nombreux paris sportifs, ce qui est totalement interdit pour des raisons assez évidentes de conflit d’intérêts.
Un sondage YouGov auprès des fans de football révèle que la plupart pensent que les joueurs (88 %), le personnel d’entraîneurs (85 %) et les propriétaires de clubs ne devraient pas être autorisés à parier sur des matchs impliquant leur propre équipe.
Résultat, prendre des mesures s’est avéré nécessaire afin de limiter l’hémorragie, et surtout le poids de cet industrie en Premier League. Les différents clubs ont devancé les institutions, et sont parvenus de leur côté à un gentlemen’s agreement, visant à ne plus faire appel à des sociétés de paris sportifs pour le sponsor principal des maillots et ce, à partir de la saison 2026/2027, en attendant que le gouvernement se penche à son tour sur la question.
Le problème étant que cette pratique est particulièrement répandue depuis maintenant dix ans, en particulier dans ce championnat. Si l’on remonte à la saison 2013/2014, à l’époque seules trois équipes avaient pour sponsor principal une société de paris sportifs, sauf que l’affaire devait être particulièrement intéressante car à peine trois ans plus tard, pas moins de dix clubs avaient cédé aux sirènes du betting.
Le 13 avril 2023, la Premier League a annoncé avoir conclu un accord avec les clubs pour « retirer le sponsoring des sociétés de betting sur leurs maillots ». Cela en fera la première ligue sportive du Royaume-Uni à le faire.
À l’heure actuelle, le nombre a été légèrement revu à la baisse car ils ne sont plus que huit : West Ham (Betway), Newcastle (Fun88), Everton (Stake.com), Brentford (Hollywood Bets), Fulham (w88), Leeds (SBOBET), Bournemouth (Dafabet) et Southampton (Sportsbet.io). Un chiffre d’autant plus démesuré quand on sait que parmi l’ensemble des clubs du Big Five – hors Premier League – seuls trois d’entre eux disposent actuellement d’une société de paris sportifs comme sponsor de maillot.
Néanmoins, des questions vont devoir se poser durant les mois à venir, à commencer par celle de la compétitivité économique des clubs de Premier League, les plus touchés par cet accord faisant majoritairement parti des plus modestes, surtout si l’on exclue Newcastle de la liste. En effet, les sponsors des clubs les plus aisés du championnat proviennent d’autres secteurs d’activités, tels que les finances, l’aviation ou encore l’IT.
L’autre risque serait de voir la mise en place de mesures en trompe-l’œil. Le betting étant aussi ancré dans la culture britannique qu’omniprésent dans le football, qu’il est légitime de se demander si les récentes décisions prises sont le fruit d’une réelle bonne volonté de la part des clubs, ou bien s’il s’agit d’un simple effet de manche, dans le but de faire taire la récente polémique. Les paris sont ouverts.
Mathieu Sauvajot
Crédit photo : Statista, YouGov
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