Portés par les étoiles décernées par le Guide Michelin, les grands cuisiniers deviennent des chefs d’orchestre et des hommes d’affaires.
Si les étoiles Michelin sont l’assurance d’un carnet de réservation rempli, elles ne sont pas gages de rentabilité. Cette dernière avoisinerait en effet les 20% maximum pour les plus chanceux, avant amortissement.
Il est difficile pour un chef de miser exclusivement sur sa seule activité de restaurateur. Depuis une trentaine d’années, les grands chefs étoilés l’ont bien compris, ils sont passés du statut de cuisiners à celui d’entrepreneurs, multipliant les activités : ouvertures de restaurants, d’hôtels, d’écoles de cuisine, voire de PME agro-alimentaires.
Investissement continus pour une Etoile au Michelin
Pour décrocher les précieux macarons ? Une bonne dose de talent, de travail et de rigueur mais aussi des investissements constants et élevés. «Pas de performance sans les investissements qui vont avec ! Chaque année, l’entreprise investit en moyenne 10% de son CA, ce qui est considérable !
Il faut, en effet, moderniser l’outil de production même lorsque l’affaire fonctionne correctement. Nous avons ainsi transformé l’ancienne cuisine uniquement pour le renouvellement du fourneau, ce qui nous a coûté 150.000 €. Mais nous savons que l’investissement n’est pas vain», témoigne Georges Blanc, le roi de la Bresse, dont le groupe a investi à Vannes il y a 6 ans 3,5 M€ dans la construction et l’aménagement d’un spa.
Bien lui en a pris puisque le CA généré a dépassé l’investissement initial après seulement 2 ans d’exploitation. Un cas d’école !
Une offre élargie
En 1996, Pierre Gagnaire quitte Saint-Étienne et son restaurant triplement étoilé. À l’époque, il estime qu’il est impossible de faire vivre un restaurant 3 étoiles Michelin dans le Forez sans une offre hôtelière associée. Le chef choisit alors de rapatrier ses activités dans la capitale.
Vingt ans plus tard, Gagnaire cumule 12 étoiles, enregistre un CA de plus de 6 M€ avec ses restaurants à Paris, Londres, Berlin, Hong Kong. Gagnaire, comme Ducasse, Frechon ou Savoy, la réussite passe par la multiplication des adresses, notamment dans les plus grandes capitales.
Pour d’autres, comme Georges Blanc, plus que la situation géographique, c’est avant tout le développement d’une offre adaptée qui garantit – ou non – la réussite d’une maison.
«En 1968, lorsque j’ai repris l’auberge de la Mère Blanc créée en 1872 et étoilée depuis 1929, j’ai très vite compris qu’un restaurant fortement étoilé à la campagne devait, pour attirer les clients, offrir un hébergement de qualité. Au fil des années, j’ai donc acheté des maisons alentours pour les transformer en hôtels et restaurants. Aujourd’hui, Vonnas compte un hôtel 5 étoiles, un 4 étoiles et un 3 étoiles, chacun disposant de son propre restaurant. À cela s’ajoutent des boutiques, 4 piscines, 2 spas… Nous sommes passés de 120 m2 à 6 hectares», détaille le chef de Vonnas (Ain) qui a su faire de son entreprise, qui enregistre 30 M€ de CA et emploie 300 personnes, un petit empire de l’art de vivre à la française mondialement connu. Deux stratégies différentes mais tout aussi… payantes.