A mi chemin entre l’autopartage et le convoyage, DriiveMe permet à des particuliers de louer une voiture ou un utilitaire pour un euro. Le chiffre d’affaires de la PME au capital 100 % familial double chaque année (5 M€ en 2019, 10 M€ en 2020). En 2021, les deux fondateurs, Alexandre et Geoffroy Lambert, visent 20 M€.
Que propose DriiveMe ?
Nous livrons des voitures partout en Europe. Si vous avez un certain nombre de voitures à déplacer d’un point A à un point B, vous pouvez choisir entre deux formules. Une première avec des chauffeurs particuliers (DriiveMe en compte plus de deux millions en Europe – ndlr) à qui l’on propose de louer des voitures pour un euro en aller simple. On facture le transport une centaine d’euros au professionnel. C’est le concept de base de DriiveMe. C’est ce qui en fait la solution logistique la plus économique du marché. Dans la seconde formule, le trajet est assuré par l’un de nos 10 000 chauffeurs professionnels. Ils sont auto-entrepreneurs. On les rémunère, on les forme et on les note après chaque prestation.
Quel type de client fait appel à vos services ?
Des constructeur, des professionnels, des loueurs, des flottes de sociétés, des particuliers… Nous avons 30 % de loueurs, 30 % de distributeurs, concessionnaires et constructeurs et 25 % de marchands et mandataires. Le reste concerne les flottes de société (Canon, Bouygues…).
« Avec le Covid, on a gagné entre 5 et 10 ans sur la digitalisation »
Comment s’est déroulé cette année 2020 marquée par la pandémie de Covid-19 et deux confinements ?
Comme beaucoup d’entreprises, on a perdu plus de 70 % de notre activité. On a utilisé les différents dispositifs, dont le chômage partiel et le PGE (DriiveMe a obtenu un prêt d’un million d’euro – ndlr). On a très vite repris car on a eu une vraie traction. On a été très pro-actifs dans la mise en place de protocole : livraisons sans contact, parcours totalement digital… On a notamment proposé ce service à nos gros clients comme Aramis ou PSA.
Le Covid a-t-il changé la trajectoire de l’entreprise ?
On a gagné entre 5 et 10 ans sur la digitalisation de la livraison de voitures. Avant le Covid, sur 100 ventes, 10 étaient livrées à domicile. Aujourd’hui, on tourne autour de 20-25 voitures. Le Covid a été un accélérateur sur la manière de vendre une voiture et de concevoir les points réseau, qui sont des structures de charges très importantes et pas forcément viables dans le long terme.
Pourquoi ?
Il y aura de moins en moins d’agences de location. Que ce soit pour un achat, une location ou un leasing, on livrera le client à son domicile. Il n’aura plus besoin de venir en agence ou en concession. A la fin de l’usage, quelqu’un viendra récupérer la voiture chez lui. DriiveMe est l’acteur qui permet de répondre à cette évolution de l’usage en prenant en charge les derniers kilomètres. On est l’UPS de la voiture. On vient chez vous, on prend votre voiture, on l’amène pour son entretien. Si vous avez acheté une voiture, on va la chercher en concession et on la ramène chez vous.
Avez-vous réussi à retrouver votre niveau d’activité d’avant Covid ?
Oui. Tout s’est même accéléré pour DriiveMe durant cette période, car nous avons remporté un très gros appel d’offres chez PSA portant sur la livraison de véhicules d’occasion labellisés Spoticar dans plusieurs pays (France, Espagne, Portugal et Belgique). DriiveMe est le partenaire européen de PSA sur ce segment.
« On veut être les rois de la livraison de voiture »
Avez-vous prévu de changer le positionnement de l’entreprise dans les années à venir ?
Au départ, nous étions des loueurs de courte durée, mais ce segment représente désormais moins de 30 % de notre activité. Notamment parce que nous avons intégré les loueurs de moyenne et courte durée. Plus globalement, la part des loueurs courte durée va continuer à baisser, car la croissance est plus soutenue chez les vendeurs de voitures que chez les loueurs.
Quelle est votre ambition au niveau européen ?
Bien que la France regroupe l’essentiel de notre activité (70 % – ndlr), nous avons une véritable ambition européenne. On veut devenir l’acteur numéro un du e-commerce de la logistique automobile. On va donc aller chercher du business dans les sept pays où nous sommes présents (Espagne, Portugal, Italie, Royaume-Uni, France, Allemagne, Belgique). On veut être les rois de la livraison de voiture.
Vous avez développé l’entreprise sans recourir à des levées de fonds. Pourquoi ?
On n’a jamais eu besoin de lever d’argent. Je ne dis pas qu’on ne le fera jamais, mais ce n’est pas dans nos plans pour le moment. La boîte est saine, elle a du cash. Elle a bien tenu pendant la période du Covid. On a juste pris un PEG parce qu’on nous a conseillé de le faire.
C’est une société assez familiale. En plus de Paris, nous avons des bureaux à Madrid et Londres. A la tête de ces bureaux, nous avons nommé des membres de la famille. Notre petit frère, Constantin, gère l’Espagne, le Portugal et l’Italie depuis Madrid. Notre cousin, Trevor, gère notre bureau à Londres.
Vous êtes en quelque sorte à la tête d’une start-up familiale…
Tout à fait. Nos parents sont entrepreneurs. On gère DriiveMe comme une PME familiale, tout en ayant l’obsession de la rentabilité. Dès la première année, on gagnait de l’argent. On a toujours géré comme de bons pères de famille, tout en conservant notre ambition de créer un acteur européen de premier plan. Au fond, on a du mal à comprendre l’idée consistant à gérer une boîte non rentable…
« Nous sommes les seuls à être sains financièrement, car ils perdent presque tous de l’argent »
Hiflow, votre principal concurrent, a lui aussi été créé en 2012 et a levé 4 M€ en 2019. Cela vous inquiète-t-il ?
Il n’existe aucun acteur européen proposant deux formules comme nous. Hiflow n’est présent qu’en France et en Belgique. C’est un beau concurrent en France, qui a levé plusieurs millions d’euros. Mais c’est une autre mentalité, très HEC, dont l’ambition est de lever très vite de l’argent…
Ils ont démarré comme nous avec la location à un euro, mais ils ont très pivoté vers les chauffeurs professionnels. Chez nous, la location à un euro représente 40 à 50 % de notre marge. On est resté pendant quatre ans sur ce créneau pour essayer de percer, de créer de vrais communautés… Nous sommes les seuls à avoir ce modèle en Europe. En Allemagne et au Royaume-Uni, quelques acteurs font du convoyage pro. Enfin, nous sommes les seuls à être sains financièrement, car ils perdent presque tous de l’argent.