À 57 ans, Alexandre Ricard, PDG du groupe Pernod-Ricard, Pdg depuis 7 ans, remet le numéro 2 mondial des vins et spiritueux sur la voie d’une croissance record. Le petit-fils du fondateur Paul Ricard, qui a relocalisé le siège social à Marseille, réalise une croissance record avec 10,7 milliards d’euros de chiffre d’affaires, une hausse de 21 %.
Après des études franco-américaines centrées sur le commerce international et la finance (ESCP Europe, Wharton Business School, université de Pennsylvanie), Alexandre Ricard semblait programmé pour intégrer le monde des affaires, et plus particulière-ment le groupe familial. Rien d’étonnant lorsque l’on porte un nom aussi connu, celui du numéro 2 mondial des vins et spiritueux.
Ce n’est pourtant qu’en 2003 qu’il rejoint l’entreprise familiale où il occupe diverses fonctions jusqu’en février 2015 lorsqu’il en devient le dirigeant, succédant à son oncle Patrick Ricard, dé-cédé brutalement et à Pierre Pringuet qui prend sa retraite. Il sera embauché dans le groupe sept années plus tard, des an-nées qu’il met à profit en se formant aux finances, notamment chez Accenture et Morgan Stanley, se familiarisant entre autres avec les fusions-acquisitions.
TOUT CHANGER OU PRESQUE
Lors de son départ, Pierre Pringuet v-nait d’entamer une nouvelle phase dans la vie du groupe, qui devait engendrer de profondes transformations. En prenant le poste, Alexandre Ricard va concrétiser cette politique et modifier en profondeur l’organisation en l’orientant résolument la vie du groupe sur le consommateur. Tout doit être pensé pour anticiper ou créer le désir chez les clients.
Il a lancé quelques chantiers qui lui tiennent particulièrement à cœur, comme la mue digitale du groupe, une tendance naturelle pour « Alex », fan de technologie. Il sait qu’il faut aller vite sur ce secteur, qui impacte directement les ventes et le chiffre d’affaires, mais aussi les ressources humaines. Le second chantier qu’Alexandre Ricard met en avant est la poursuite de l’internationalisation du groupe, deuxième axe stratégique. Le troisième pilier de sa politique d’accélération est d’aller plus loin sur le haut de gamme, un segment qui ne cesse de progresser au niveau mondial.
PERNOD RICARD EN 2022
Le nom ne fait pas tout. Il peut d’ailleurs être trompeur si l’on considère l’activité actuelle du groupe, qui ne tourne plus autour du fameux Ricard, même si la marque reste un fleuron historique français au même titre que Pernod. Pour illustrer le changement, il suffit de rappeler qu’en 1975, quasiment 90% de l’activité du groupe se faisait sur le territoire français. Aujourd’hui, la situation s’est totalement inversée. Plus de 90% du chiffre est réalisé ailleurs qu’en France grâce à un portefeuille de marques internationales extraordinairement large, dont GH Mumm, Perrier-Jouët, Jacob’s Creek, Campo Viejo, Absolut Vodka, Chivas, Ballantines, Malibu, etc.
Par ailleurs, le réseau de distribution de Pernod-Ricard est reconnu par les professionnels comme étant l’un des meilleurs, et ce, depuis des décennies. Être passé par cette entreprise est pour un commercial un gage de professionnalisme. Autant dire que ce groupe du CAC 40 semble être au sommet de sa gloire, mais Alexandre Ricard poursuit son action sur la piste de l’innovation et de la croissance, tout en regardant de près certaines questions impactant le présent et l’avenir, comme le réchauffement climatique et la protection des données numériques.
LE MANTRA DE LA CONVIVIALITÉ
Le créneau sur lequel se situe Pernod-Ricard connaît une belle progression, le très précieux moment de l’apéritif est plus que porteur, et totalement associé à un mot : convivialité. Ce mot est l’un des mantras d’Alexandre Ricard, dans la droite ligne de Paul Ricard qui avait coutume de dire que « chaque jour naît une nouvelle amitié ». Il vient d’ailleurs d’inaugurer la « Conviviality Platform », un nouvel outil résolument ancré dans la révolution digitale du groupe. Il a pour objet de proposer au bon client le bon produit au bon prix en exploitant les bases de données maison.
Le rêve absolu de tout producteur, commerçant et professionnel du marketing. Le système utilise l’intelligence artificielle. Des algorithmes sont développés à partir des données détenues par le groupe, et ce au niveau mondial, par des experts recrutés spécifiquement dans ce but. Le déploie-ment de cette solution est en cours et prendra encore plusieurs années.
LE ROSÉ, NOUVELLE MODE
Sous l’égide d’Alexandre Ricard, le groupe vient de prendre une participation majoritaire dans Château Sainte-Marguerite en Provence. Le groupe est déjà dans le vin, et vient d’ailleurs de racheter un vignoble dans la région de Sonoma en Californie. Pourtant la part du chiffre d’affaires du vin reste assez négligeable à ce jour. Le choix du rosé s’est imposé, car il est de plus consommé dans les lieux de prédilection du groupe, ceux où sont déjà distribués ses marques de champagnes, whiskies, vodkas et tequilas, des lieux à la mode dans le monde entier où le rosé prend peu à peu sa place, et plus particulièrement en France et aux Etats-Unis. Et en plus, il colle parfaitement aux origines provençales du groupe.
FAMILIAL, OUI ET ALORS ?
« La tyrannie du court-termisme », voici un défaut qui n’existe pas dans ce groupe familial, une caractéristique revendiquée par Alexandre Ricard qui met en avant la liberté d’action dont il dispose par rapport à certains autres grands noms du CAC 40.
« Créer les conditions d’une grande famille bien au-delà des liens du sang », telle est son ambition, ce qu’il concrétise symboliquement en installant son nouveau bureau dans un open space afin d’illustrer le non-formalisme et la facilité d’accès du dirigeant. Une façon de faire vivre sa vision de convivialité au sein du groupe. Ce principe a trouvé son symbole dans « the Island », le tout nouveau siège parisien et lieu de rassemble-ment des différentes entités du groupe.
LA VOLONTÉ DU LEADERSHIP
Aujourd’hui numéro 2 mondial, le groupe Pernod-Ricard a pour ambition de devenir le leader, en s’appuyant sur les valeurs du groupe, en particulier l’incontournable convivialité, l’esprit d’équipe, le savoir-faire, le respect des terroirs, l’innovation. Un beau défi pour Pernod-Ricard, mais l’année qui vient de s’écouler met en avant une croissance de chiffre d’affaires de 21% !
Anne Florin