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Hollywood made in France


La France dispose de lieux de tournage privilégiés, de grandes productions et des films à succès ont déjà été séduits par l’offre française, de nombreuses séries ont investi les villes de province. Mais face à la concurrence européenne, de nouveaux moyens ont été mis à disposition pour ne pas se laisser distancer.

Provence Studios, dans une ancienne raffinerie, à Martigues, près de Marseille.

« La grande fabrique de l’image »

Voici le titre de l’appel à projets de France 2030 qui a attiré de nombreux candidats. La volonté du gouvernement est de renforcer les capacités de tournage en France dans des territoires différents. Nos voisins européens sont déjà bien armés, notamment la Grande-Bretagne et l’Italie qui investissent beaucoup sur le secteur. Il convient de relever ce défi grâce à une enveloppe de 350 millions d’euros qui sera gérée par la Caisse des Dépôts et Consignations et le Centre National du Cinéma.

La demande est forte sur ce marché, il convient d’être à même d’y répondre et renforcer la filière. L’une des motivations du gouvernement en dégageant cette enveloppe budgétaire est l’attractivité du pays mais aussi la rentabilité dégagée par ce type de service à condition de proposer des lieux et des services à la hauteur. Lors du dernier Festival de Cannes, la ministre de la Culture, Rima Abdul Malak et le Secrétaire général pour l’investissement, Bruno Bonnell, ont annoncé la liste des lauréats.

175 candidatures ont été déposées, 68 dossiers retenus, dont 11 studios de tournage, 12 studios d’animations et 5 studios d’effets spéciaux et post-production. Sur les onze studios de cinéma, cinq lauréats sont en Île-de-France, deux en PACA, deux en Occitanie, un dans le Grand Est et un dans les Hauts-de-France. Des régions qui savent qu’une série à succès attire également les touristes, la preuve la plus flagrante de ces dernières années est probablement « Bienvenue chez les Ch’tis », qui a fait redécouvrir le « Noooord » à bien des personnes.

Tourcoing et les Studios de l’Union/Union Studios

Les premiers tournages sont prévus en fin d’année. Avoir été sélectionné est une victoire pour la ville de Tourcoing où huit plateaux de tournage seront déployés sur une surface totale de cinq hectares. Cette zone était occupée par une usine textile, comme souvent dans les Hauts-de-France. Désaffectée, l’usine Caulliez va revivre pour le cinéma, créant au passage des emplois supplémentaires dans une région qui a déjà su attirer des séries, comme Les Petits meurtres d’Agatha Christie, Baron Noir, Tunnel ou encore HPI.

Le projet « Studios de l’Union » inclut toute la filière, ce qui ravit Selim Saïfi, qui mène le consortium qui porte le programme. Il s’agit d’une révolution pour la région qui ne disposait pas jusqu’à présent de grand studio de tournage pour filmer en intérieur notamment. Le fait que le hub « Plaine Image » soit déjà implanté à Tourcoing et Roubaix a joué un rôle, avec son incubateur, son centre de recherche et son école des métiers du cinéma. Les futurs Studios de l’Union incluent huit plateaux de tournage, sept ateliers de construction de décors, sans oublier les espaces de services pour les personnes qui y travailleront. Un atout de plus pour une ville qui était déjà labellisée « Film Friendly ».

Marseille et Provence Studios

Marseille a été particulièrement gâtée avec 5 projets retenus dont les studios de tournage Provence Studios, une structure créée en 2010 qui va pouvoir voir plus grand. Ce groupe basé à Martigues a réussi à décrocher le sésame grâce à son projet d’étendre son activité dans le nord de la cité phocéenne, dans l’ancienne raffinerie de sucre Saint Louis.

Un plan complet a été proposé avec bassin de tournage sous-marin, organismes de formations, espaces de post-production sans oublier l’agrandissement de son site de tournage existant. L’usine était implantée depuis 1857 sur dix hectares et hors service depuis 2015, elle a été rachetée en 2022 par Brownfields. Un peu moins de la moitié doit être occupée par l’activité cinéma, le reste doit entraîner la construction d’un centre de tri postal. Autant dire que ce projet est considéré comme essentiel pour la mairie qui voit ainsi un moyen supplémentaire de redynamiser le nord de Marseille, d’autant qu’une ligne future du tramway doit passer tout à côté qui complétera le dispositif.

La région francilienne et ses 5 studios de tournage labellisés

Les studios de Bry (Bry-sur-Marne), de Bailly (Bailly-Romainvilliers), de la Montjoie (Saint-Denis), TSF Studios 77 (Coulommiers), Dark Matters (Tigery) font partie des heureux élus. Chaque entité dispose de son plan, comme le Groupe TSF qui a proposé un énorme projet sur 50 hectares dont la construction de décors extérieurs (comme des rues de Paris) et d’une douzaine de grands studios.

La Montjoie doit doubler ses surfaces de plateaux de tournage ainsi que les ateliers ce qui lui permettra de répondre à des demandes qui se font de plus en plus nombreuses. Les Studios Bailly ont prévu du neuf sur 30 hectares avec 12 plateaux de cinéma, dont deux immenses unités de 5000 m2 chacun, avec un pôle d’innovation. Le Studio actuel situé à Bry-sur-Marne est particulièrement bien placé et bénéficie de sa proximité avec l’INA (Institut National de l’Audiovisuel). Le budget alloué doit être utilisé pour la modernisation de la structure existante et le doublement de sa capacité de production.

Un espace de 12 hectares sera également exploité sur le thème de l’image avec l’INA. La proposition de Dark Matters est basée sur des plateaux équipés de systèmes LED, associé à un rendu 3D et à un suivi par caméra en temps réel. Son équipe est spécialisée dans la production de films numériques et virtuels. Les années à venir seront porteuses d’avenir pour les zones retenues, avec des centaines d’emplois à la clé. Lorsque l’on voit l’appétence du public pour les séries notamment, on peut penser que la France peut tirer son épingle du jeu. Même s’il sera difficile de rattraper la Grande-Bretagne, déjà leader et qui a investi quelques 2 milliards de livres sterling ces dernières années, notre audiovisuel tricolore peut concurrencer des pays comme l’Italie, la Hongrie et l’Allemagne.

Claudio Flouvat

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