Par Mathieu Darras, fondateur de Brickmeup
Tribune. La législation immobilière évolue souvent et rapidement et nombre de propriétaires ne sont pas au fait de ces évolutions. Ils s’exposent, par méconnaissance du cadre réglementaire, à des sanctions. Comme le montrent les tableaux de l’économie française 2020 édités par l’INSEE, sur 40% de ménages locataires, un quart environ a signé un bail avec un bailleur privé en 2019. Parmi eux, 3 millions sont des bailleurs particuliers dont les trois quarts ont eu recours à un emprunt pour acheter leur bien immobilier locatif. Et 59% de ces propriétaires sont encore sous le coup de leur emprunt. Ces chiffres témoignent, donc, d’un risque financier accru pour les propriétaires de biens locatifs.
Devenir propriétaire bailleur comporte des risques
Le défaut de paiement du loyer, alors même que le taux d’impayé en France demeure assez faible – 2 à 2,5% -, demeure la première crainte des bailleurs. Outre l’impayé de loyer, d’autres paramètres comme le défaut d’assurance habitation, ou les troubles causés au voisinage, peuvent, à terme, avoir un impact financier. Pour ce dernier point, la responsabilité du propriétaire, en tant que bailleur, peut être mise en cause ! Heureusement, pour limiter ces risques, les propriétaires ont des possibilités.
Ils peuvent, par exemple, intégrer une clause résolutoire au bail de location qui leur permet de résilier légalement, de manière unilatérale et automatique le bail, si le locataire manque à ses obligations. Sont pris en charge par cette clause, les cas de figure suivants : le non paiement du loyer, le non versement du dépôt de garantie, le défaut d’assurance habitation, ou encore les troubles causés au voisinage.
Cette précaution fait, avant tout, figure de sécurité juridique, dans le sens où elle simplifie les actions en justice en cas de litige. Sans celle-ci, il est possible que les propriétaires ne puissent pas résilier le bail, et qu’ils se retrouvent avec un locataire indélicat sur une longue période. On le voit, il existe donc des solutions pour se protéger, mais encore faut-il les connaître !
Une bonne connaissance de la législation immobilière
Les propriétaires font face à des risques, mais doivent, aussi, répondre à des obligations. Des obligations d’ordre urbanistiques notamment : être en conformité avec le Plan Local d’Urbanisme (PLU), et avec le règlement de la copropriété notamment. Dans les faits, cela veut dire qu’ils ne peuvent pas modifier leur façade comme ils le souhaitent, ni faire d’un bâtiment commercial une habitation ou découper leur bien en plusieurs parties sans une autorisation.
Les propriétaires doivent aussi se soumettre à des obligations locatives en assurant le bon état du logement, et en réalisant des travaux si le logement n’est pas décent. Dans les zones où les loyers sont encadrés, les propriétaires ont l’obligation de s’y soumettre. Beaucoup ne le font pas, comme le montrent les chiffres en Île-de-France où 50% des annonces de locations non meublées ne respectent pas l’encadrement des loyers, un chiffre qui monte jusqu’à 54% pour les locations meublées.
Cette proportion s’accentue lorsqu’il s’agit de logements de petite taille. En effet, 78% des logements non meublés de moins de 20m² et 73% des mêmes types de logement meublés ne respectent pas l’encadrement des loyers. En ne respectant pas la loi, les bailleurs privés prennent de gros risques en s’exposant à une amende pouvant aller jusqu’à 5000 euros. À cela peut s’ajouter, après signalement du préfet, une restitution du trop perçu.
Tous ces exemples démontrent que pour être un propriétaire vertueux, il faut avoir une bonne connaissance de la législation immobilière… un savoir qu’il est difficile d’acquérir seul sans passer du temps à se renseigner.
Les locataires ont également des obligations
À l’instar des bailleurs, les locataires ont des obligations. L’entretien courant et les réparations locatives du logement sont, par exemple, à leur charge : entretien de l’extérieur à usage exclusif (jardin, balcon, terrasses) ; entretien et réparation des sols ; remplacement des interrupteurs, des fusibles, du vitrage, etc. Les locataires se doivent également de respecter une obligation de jouissance tel que défini par la loi : “Le locataire titulaire d’un bail d’habitation doit jouir paisiblement des lieux loués comme un bon père de famille, et particulièrement s’abstenir de tout comportement causant un trouble anormal de voisinage, quel qu’il soit”.
Enfin, si le bien vient d’être mis en vente, ou si le locataire pose son préavis, ce dernier ne peut pas s’opposer à la visite du logement. C’est ce qu’on appelle l’obligation de visite. Comme pour les propriétaires, les responsabilités du locataire sont étendues, et parfois méconnues. C’est pourquoi, il semble indispensable que les propriétaires se voient délivrer une certification de location avant de pouvoir mettre leur bien sur le marché. Non pas pour les contraindre, mais bien pour les protéger.
Une certification bailleur qui protège les propriétaires et les locataires
Encadrée par l’État, cette formation obligatoire servirait à protéger les intérêts des propriétaires – tout en garantissant ceux des locataires – et viserait à les informer de la législation, pour leur permettre de louer sereinement et en toute légalité.
Ouverte à tous les propriétaires – actuels et nouveaux – cette formation serait dispensée en ligne ou en présentiel et ne durerait qu’une journée. Le cadre réglementaire évoluant, celle-ci demanderait une réactualisation d’une demi-journée chaque année.
Pour faciliter la mise en place du dispositif, l’État devrait s’appuyer sur les organismes de formation existants, qui dispensent, déjà, des formations obligatoires aux professionnels du secteur. Ceux-ci bénéficieraient d’une certification et d’un agrément pour délivrer, ce qu’on pourrait appeler une “certification bailleur”. Afin de lutter contre d’éventuels abus, l’État doit en encadrer le coût qui serait pris en charge par les futurs bailleurs (maximum 250 euros).
Pour que le système perdure, les propriétaires qui louent sans avoir suivi la formation s’exposeront à des sanctions financières dissuasives. Les propriétaires pourraient enfin signer une charte qui les engage à respecter un certain nombre de bonnes pratiques. Si cette charte n’est pas respectée, le bail pourrait être considéré comme nul à la demande du locataire. Ce système permettrait de lutter mécaniquement contre les marchands de sommeil, et de récompenser les propriétaires de bonne foi, qui parfois, se mettent en faute, par méconnaissance du cadre légal.