Le 12 avril dernier, le Président de la République a annoncé la fin du forfait social pour toutes les entreprises de moins de 250 salariés, à compter du 1er janvier 2019. C’est une mesure phare présentée par Emmanuel Macron et il faut reconnaître qu’il s’agit d’une petite révolution fiscale. Explication de Romain Gérardin-Fresse, expert juridique et fondateur du Cabinet GFK Conseils-Juridis.
En somme, l’employeur qui intéressera ses salariés à a la réussite de l’entreprise au sein de laquelle ils exercent, sous forme de primes versées en fonction d’objectifs prédéfinis ou des performances réalisées, ne sera plus assujetti au fameux forfait social. Il s’agit d’une mesure instaurée en 2012, qui vise l’imputation de prélèvements sociaux à hauteur de 20%, avec un taux réduit de 8% pendant 6 années pour les plus petites entreprises.
Et sans surprise, cela refrénait les chefs d’entreprise de TPE-PME, estimant déjà, à juste titre, plier sous le poids de l’écrasement des impositions, taxes et retenues en tous genres. Pourtant, l’esprit louable de la participation collective à la réussite de son entreprise n’est pas neuf. Il a été initié le 17 août 1967 par le Général de Gaulle qui souhaitait instaurer un « ordre social nouveau ».
Aujourd’hui, 11 millions de français sont concernés, soit 60% des salariés du secteur privé. Cela représente une perception annuelle de participation et d’intéressement de 15 à 17 milliards d’euros. La facture va donc considérablement s’alléger pour les entrepreneurs. Cela étant, il va bien falloir récupérer l’incidence fiscale pour l’Etat. Et c’est là qu’il est opportun de remonter quelque peu dans le temps.
Le gouvernement a revu sa copie
En septembre dernier, lors de la présentation du projet de budget de la sécurité sociale, le gouvernement avait souhaité la fin d’une mesure particulière : celle des taux historiques. Cette mesure dérogatoire est en fait la possibilité laissée au salarié qui a placé son intéressement sous forme de plan d’épargne salariale et qui souhaite le récupérer de bénéficier du taux applicable de CSG et CRDS au jour où le gain a été réalisé et non au jour de retrait. Ainsi, avec une augmentation de 10 % du taux de prélèvements sociaux en 20 ans, l’avantage est non négligeable.
Mais devant la levée de boucliers, il a quelque peu revu sa copie. Le 25 octobre suivant a été adopté un amendement au Projet de Loi de Financement de la Sécurité Sociale, disposant comme suit :
Conservation de l’application des taux historiques pour tous les gains réalisés avant le 1er janvier 2018, mais application du taux unique pour ceux réalisés a posteriori, lissé sur le taux de prélèvements sociaux en vigueur. Avec néanmoins une seule dérogation, pour tout versement réalisé entre le 1er Janvier 2013 et le premier Janvier 2017, et ayant potentiellement généré des revenus jusqu’en 2022, les taux historiques perdureront à s’appliquer.
Officiellement, cela ne peut pas être qualifié de hausse d’impôt, s’agissant simplement d’un rebattage des cartes fiscales. Nonobstant, tout porte à croire que le taux des prélèvement sociaux aura tendance à s’accroître au fil des ans, et non l’inverse. Ainsi, au-delà des effets d’annonce, en mécanique des fluides, cela s’appelle le principe des vases communicants. Il y a donc lieu de rester dubitatif sur l’effet réel en termes de croissance.
Romain Gérardin-Fresse est expert juridique et fondateur du Cabinet GFK Conseils-Juridis. Spécialiste des stratégies d’entreprise et conseiller renommé de nombre de dirigeants, il signe chaque mois une tribune autour d’un sujet d’actualité.