Au plan européen, ce conflit fait ressortir en pleine face toutes les ambiguïtés d’un couple franco-allemand en panne, et qui ne peut pas repartir tant que Berlin ne clarifiera pas sa position sur l’industrie d’armement. Tant que l’administration allemande continuera de privilégier ouvertement et en sous-main le recours à la technologie et aux industries de défense américaines au détriment notoire des savoir-faire français (Naval Group, Dassault Aviation, Nexter, Thales, Safran, Airbus Group, Eutelsat, Exail, MBDA, Arquus…), l’industrie de défense européenne restera un vœu pieux.
L’heure de vérité est imminente. À l’heure d’un trumpisme débridé, mirobolant et désinvolte, les Européens choisiront-ils la solution continentale pour leur industrie de défense en s’appuyant notamment sur une coopération renforcée et prioritaire des principaux producteurs : Allemagne, France, Italie, Pologne et Espagne ? Un directoire pourrait même être créé à l’occasion pour accélérer et faciliter la mise en commun stratégique de ces filières.
C’est une question capitale et pleinement politique. C’est le grand chantier qui s’ouvre à nous. Le président Macron serait bien inspiré de s’en saisir à bras ouverts. Ce peut être un axe essentiel pour boucler son quinquennat.
L’Amérique de Trump bousculant toutes les règles du droit international, la France et l’Europe ont tout intérêt également à reprendre l’initiative et à renforcer leurs coopérations avec la Chine ou l’Inde afin d’installer un minimum de rééquilibrage dans les relations internationales.
Quant à Moscou, il reste un partenaire incontournable à long terme. Et la France ou l’Europe ne pourront pas rester longtemps à quai des discussions avec le partenaire russe, qui partage avec nous de nombreux pans culturels, excepté bien sûr son régime non démocratique.
Robert Lafont
