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Jacques Borel, pionnier visionnaire de la restauration rapide


Jacques Borel, est un entrepreneur né en 1927 à Paris. Diplômé en 1950 de HEC Paris. Il intègre rapidement IBM, ou son père, William Borel, dirige la branche française. Il est formé aux techniques commerciales à « l’américaine » et devient le meilleur vendeur mondial. Par une force de persuasion hors du commun et...

Entreprendre - Jacques Borel, pionnier visionnaire de la restauration rapide

Jacques Borel, est un entrepreneur né en 1927 à Paris. Diplômé en 1950 de HEC Paris. Il intègre rapidement IBM, ou son père, William Borel, dirige la branche française.

Il est formé aux techniques commerciales à « l’américaine » et devient le meilleur vendeur mondial. Par une force de persuasion hors du commun et notamment en préparant des produits -et des présentations- en amont et sur mesure se basant sur les besoins de ses-futurs-clients (principalement en comptabilité pour des entreprises d’assurances).

À la suite de résultats plus que convaincants, il est envoyé en 1952 en Indochine dans la division d’IBM à Saigon dont il devient directeur. Avec trente salariés sous ses ordres, le costume de dirigeant lui convient très bien et prend un grand plaisir à diriger et à piloter son activité avec minutie, engagement et professionnalisme.

Jacques Borel revient en France en 1956 mais s’ennuie ferme. Il a besoin de nouveaux défis qui pourraient stimuler son ambition et sa soif indéniable de réussites. En effet, il doit relancer sa carrière qui est dans l’impasse.

Il pressent l’avènement de la consommation de masse et la modernisation de la société française au cours de ses trente glorieuses et constate l’arrivée massive des femmes sur le marché du travail.

Ce qui a pour lui automatiquement deux conséquences directes :

1-Moins de temps disponible en cuisine pour les femmes.

2-Les deux salaires du foyer pourront permettre -potentiellement- plus de sorties (dont le restaurant par exemple).

Sur ces bases, il décide de se lancer dans la restauration rapide en France, et cela, bien avant l’arrivée de Mac Donald‘s, Burger King ou de Five Guys en France.

Pourvu d’indéniables qualités d’organisation et de vente, ce travailleur infatigable est inspiré par Howard Johnson (dont 200 restaurants sortent de terre dotée d’une organisation « militaire » et d’une rentabilité exceptionnelle).

Il duplique le principe dès juillet 1957, avec son premier restaurant l’Auberge Express (Rue de la Boétie toute proche des Champs-Elysées). Il réduit drastiquement les couts et augmente la fréquentation avec pour objectif un client toutes les 5 secondes.

Fort de ce premier succès, il crée en 1959 la structure intitulée La Générale de Restauration pour développer le concept. Il dote l’ensemble d’une centrale d’achat pour uniformiser et faire baisser les couts de ses restaurants, structure qui deviendra par la suite : Transgoumet.

Il est celui qu’on nomme le mathématicien de la restauration et l’empereur de la table.

Dès 1961, il est déterminé à imposer le Burger en France avec les fast-foods Wimpy (chaine de restauration anglaise créée à Chicago avec qui il fonde un partenariat et qu’il avait testé lui-même en 1949 à New York lorsqu’il était encore salarié chez IBM) dont il décline la version française et compte sur la rentabilité du steak haché et sa facilité de préparation pour maximiser et optimiser ses bénéfices.

Il lance donc le premier fastfood en France, baptisé alors « Le restaurant de l’An 2000 ». Rien que ça.

Au summum, il y en aura jusqu’à 20 (15 à Paris et 5 en Province) à la fin des années 60.

Mais trop pressé et en désaccord profond avec la maison mère, l’affaire tourne court.

En 1962, il souhaite démultiplier la fréquentation de ses restaurants, pour cela il a l’idée d’imprimer des bons de restauration sur d’anciens tickets de cinéma et fait le tour des entreprises du quartier pour les vendre. Le succès est immédiat.

L’année suivante, il peaufine encore son système et son concept qu’il décline sous le nom de Ticket Restaurant. C’est une innovation majeure mais en réalité Jacques Borel a déjà la tête ailleurs : Il est déjà à 300 Km/h sur l’autoroute.

Et importe donc , dès 1969, le concept de « restau pont ». Concept italien qui permet de « récupérer » les automobilistes (et leurs familles) des deux côtés de l’autoroute et donc de multiplier et de convertir cette fréquentation en de juteux bénéfices.

La société nationale des autoroutes donne son feu vert et un premier pont s’étend au-dessus de l’A6 en Bourgogne sur l’aire de Vernoy près d’Auxerre. C’est le carton total !

Sans concurrence à l’horizon, il sert jusqu’à 6000 repas par jour avec une formule de self-service. (4 menus sont proposés à la carte). Et Jacques Borel commence à engranger un vrai succès à la fois commercial , financier et stratégique. Un cas d’école.

Il réfléchit en centaines de couverts, optimisant tous les postes de travail, les groupements d’achats ce qui permet des gains de temps : c’est l’industrialisation des cuisines et du service.

Il est le premier à décliner son concept de restauration rapide dans les centres commerciaux avec des restaurants de grillades et de pizzas entre autres.

En 1972, Jacques Borel décide de se diversifier en se lançant dans l’hôtellerie. Mais il se rend vite compte que ce métier n’est pas le sien et peine à attirer des clients. Par conséquent, pour renforcer sa position il décide de racheter les hôtels de luxe Sofitel en 1975 mais doit faire face aux réserves et aux résistances des professionnels du secteur. Il est perçu comme une menace. Bref, c’est l’homme à abattre.

L’emprunt pour le rachat de Sofitel est garanti sur ses biens personnels : ses banques et son conseil d’administration le lâchent en 1977 (Il est évincé par ses propres actionnaires). Il est totalement ruiné et doit repartir à zéro.

Son groupe Jacques Borel International (JBI) servira de base à la création du groupe Accor après sa fusion avec Novotel.

Gérard Pélisson (avec Paul Dubrule) rachète JBI avec les Novotels y découvre « pépinière de talents. » avec l’ajout de Sofitel, Restoroute, Courtepaille, Ticket Restaurant et Générale de Restauration, ainsi qu’une centrale d’achat (Scapa) et un organisme de formation (Afhor).

De son coté, Il tente de se relancer en Amérique (USA, Brésil, Mexique) sans succès avec « Frère Jacques » et sa formule de Ticket Restaurant.

A retour en France, il se reconvertit à plus de 70 ans en consultant auprès d’entreprises régionales de restauration collective puis se lance en 1994 dans le lobbying pour la baisse de la TVA dans la restauration, via, sa structure Jacques Borel Consultants qui est une société de lobbying qui opère auprès du Parlement Européen pour faire baisser le taux de TVA dans la restauration

Il obtiendra finalement gain de cause en 2009 en France avec une TVA à 5,5% pour la restauration. Fort de cette victoire, Il parcourt l’Europe pour convaincre les différents gouvernements de l’intérêt d’une baisse de la TVA pour la restauration rapide et collective.

Au Canada il négocie une taxe sur la valeur ajoutée réduite pour l’hôtellerie et milite aux côtés de syndicats professionnels comme le SNARR.

Il détient une partie de la Société Tout Feu Tout Flam, créée en 2001 pour le développement d’une chaîne de restauration rapide composée de produits de terroirs surtout français mais aussi de certaines régions d’Europe (Pays basque, de Catalogne ou d’Ecosse).

Quel parcours ! Alors il est clair que Jacques Borel a eu son lot de détracteurs, de critiques , de jaloux , de courtisans et d’ennemis. Il a même été parodié au cinéma.

Au pays ou la gastronomie est reine, ces méthodes « industrielles » étaient très mal vues. Presque un crime de lèse-majesté au pays du terroir, de la bonne chère et des pâtisseries. Un raffinement , un prestige et un art de vivre que nous envie le monde entier. (N’en déplaise aux professionnels de frenchbashing).

Mais combien ont vu en lui un visionnaire qui avait déjà plus de 30 ans d’avance. Non pas sur la concurrence mais plus de 30 ans d’avance sur son marché. Qui lui a in fine donné totalement raison aujourd’hui.

Il a ainsi pu démocratiser l’accès aux tables pour le plus grand nombre, créé des emplois par milliers, rempli les caisses de l’état (par la fiscalité) et créer de la valeur par ses nombreux investissements et par sa stratégie de contrôle de toute la chaine de valeur.

Un véritable pionnier.

Après avoir fondé et modernisé la restauration rapide française, avec une offre unique à l’époque, il a depuis aidé les restaurateurs avec une fiscalité plus douce.

Combien peuvent se targuer d’avoir eu la bonne intuition et de l’avoir concrétiser avec un tel brio ? D’avoir autant innover ? D’avoir eu un impact aussi considérable sur la vie de millions d’individus ? Combien se sont relevés après des revers aussi lourds ?

Sur de sa force et de ses analyses. Opiniâtre sans être figé, il a ouvert un tout nouveau marché et inspiré plusieurs générations d’entrepreneurs qui marchent encore -aujourd’hui- dans ses pas sans forcément le savoir.

C’est un homme de savoir et de conviction, un homme de terrain à la fois infatigable et ambitieux qui nous apprend qu’aux travers de ses innombrables réalisations, de ses réussites, de son impact social, des obstacles, des multiples contraintes, des railleries, des échecs et des reconversions que finalement quelle que soit nos trajectoires : glorieuses ou anonymes, la seule chose qui compte vraiment c’est que le combat continue.

MEJRI Bassem

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