L’ancien rugbyman Gérard Bertrand a su poser son empreinte dans le monde de la viticulture en devenant un spécialiste des vins du Languedoc très respecté. Son partenariat avec Jon Bon Jovi et son fils est une réussite.
On évoque souvent les sportifs nord-américains aux reconversions éclatantes. Mais la France n’a rien à leur envier. Gérard Bertrand, ancien capitaine de l’équipe parisienne du Stade Français l’a prouvé.
Le décès accidentel de son père provoque son retour sur les terres natales du Languedoc, qui s’enorgueillit du succès de cet enfant du pays. Il s’est notamment illustré par sa volonté affirmée de convertir les vignobles à la biodynamie alors même que cette idée n’était pas encore populaire. De quelques hectares tests, ce sont aujourd’hui environ 900 qui au fil du temps ont été convertis à des pratiques plus respectueuses de l’environnement et de la santé. Les seize domaines détenus par Gérard Bertrand sont d’ailleurs certifiés Demeter.
Le Pet’ Nat’, le petit dernier
Dernièrement, Gérard Bertrand a prouvé une nouvelle fois qu’il reste à l’écoute du marché. Il s’est lancé sur un nouveau segment, le Pet’Nat. Un pétillant naturel rosé qui la particularité d’être biologique, et dispose d’un joli nom, le Papilou.
Ces vins naturellement pétillants sont en effet de plus en plus plébiscités par le public pour l’apéritif, car il n’y a aucun ajout de levure ou de sucre, le processus est totalement naturel, mais exige du savoir-faire. Lancé chez les cavistes et la restauration hors foyer, ce vin à base de cinsault et pinot noir sera diffusé cet été.
Réussite exemplaire
À 22 ans seulement, en 1987, Gérard Bertrand reprend le vignoble familial des Corbières et une affaire de négoce. En parallèle, il poursuit le rugby jusqu’à l’âge de 30 ans.
Aujourd’hui propriétaire de 16 châteaux languedociens, son entreprise produit quelque 35 millions de bouteilles. En dépit de cette réussite hors normes, l’homme garde parfois l’image du vin de grande distribution qui lui a permis à ses débuts de faire décoller l’entreprise afin de mettre sur pied par la suite des projets plus marketing et personnels depuis une vingtaine d’années.
Pourtant, l’homme ne renie pas l’histoire. Après tout, c’est le caviste Nicolas et des enseignes telles que Prisunic qui ont permis à l’entrepreneur de passer au stade supérieur. Il remercie d’ailleurs ouvertement les foires aux vins qui ont été l’opportunité pour le public de se familiariser avec les vins du Midi.
Le virage sur le premium a commencé avec le rachat du Château l’Hospitalet en 2002. Il fallait quand même disposer d’un mental solide pour racheter à l’époque une propriété de 70 hectares pour une somme supérieure au chiffre d’affaires de l’époque, soit 9 millions d’euros. L’affaire de négoce est également florissante, Gérard Bertrand travaille avec environ 200 viticulteurs et 15 caves coopératives en Languedoc.
Jon Bon Jovi, fan de rosé
La star américaine de rock, Jon Bon Jovi, comédien à ses heures a d’autres cordes peut-être un peu moins connues à son arc. Entre autres, il adore le rosé. Une boisson de femmes pour les Américains, mais non ! « Real men drink pink » selon la star qui adore ce produit.
La « Hampton Water », marque du rosé lancée en 2018 par Jon Bon Jovi et son fils Jesse, est à elle seule un positionnement. En effet, les Hamptons sont une région où certains privilégiés disposent de grandes propriétés, sur le beau territoire de Long Island, familier du clan Kennedy et dont la réputation n’est plus à faire aux États-Unis.
Jesse Bon Jovi fait un jour remarquer à son père que l’on y boit plus de rosé que d’eau. Ni une ni deux, le duo se lance dans ce projet, charge à Jesse de mettre au point le business plan. L’idée marketing est belle, et la France s’impose immédiatement comme pays d’origine. Encore faut-il trouver le partenaire idéal. Gérard Bertrand, rencontré chez des amis communs, s’impose rapidement, un choix dont les Bon Jovi se félicitent encore aujourd’hui. Le trio est constitué.
Lancement américain réussi
Il s’agissait pourtant d’une première pour Gérard Bertrand. Il avait jusqu’alors toujours développé ses propres vins, sans collaboration avec une star internationale. C’est l’idée de créer un vin en quelque sorte familial et représentatif d’un style de vie qui le séduit.
La musique est aussi un point commun, Gérard Bertrand organise en effet depuis plus de quinze ans un festival international de jazz au Château l’Hospitalet, une musique dont il est fan.
Le mentorat de Gérard Bertrand et de ses équipes a été efficace, c’est le moins que l’on puisse dire. En 2020, le vin « Hampton Water » a été désigné Meilleur Rosé 2018 par le magazine Wine Spectator, dans son classement des 100 meilleurs vins. Encore mieux, de 2018 à 2022, la Hampton Water a obtenu la note de 90 points sur 100 quatre années consécutives.
L’aventure se poursuit
Fort de cette première expérience réussie, concrétisée par plus d’un million de cols vendus, le trio a décidé d’aller plus loin. Les clients qui fréquentaient un certain magasin Carrefour le 10 mai dernier ont été un peu surpris. Jon Bon Jovi en personne se promenait dans les allées avec son fils et le viticulteur-négociant français devant une tête de gondole de rosé « Hampton Water ».
Car ce rosé va à présent être proposé aux Européens, et plus particulièrement aux Français qui le retrouvent déjà chez Monoprix et Carrefour. Le vin n’est pas bio, mais « pourrait l’être dans les années à venir » selon Gérard Bertrand dont la majorité des vignes est cultivée en bio et biodynamie. Alors, prêt à déguster un petit air des Hamptons en écoutant « It’s my life » de Bon Jovi ?
Anne Florin