Au départ, un lieu, exceptionnel, le château royal de Villers-Cotterêts, dans l’Aisne. Emmanuel Macron veut en faire la cité internationale de la langue française. Un investissement de près de 200 millions d’euros, et 10 millions de visiteurs attendus pour un projet grandiose.
Le chef d’œuvre de la Renaissance fut mis en avant par le roi François Ier qui en fit une de ses villégiatures préférées, un lieu de chasse et de fêtes. Mais la date essentielle dans le contexte est 1539, année de la signature de l’ordonnance de Villers-Cotterêts, une ordonnance très spéciale et toujours en vigueur, qui impose le français en lieu et place du latin pour les actes juridiques et administratifs du royaume.
Après avoir connu des hauts, le château connaît des bas après la révolution, il devient dépôt de mendicité sous Napoléon, puis maison de retraite à partir de 1889 avant de connaître l’abandon en 2014. C’est Emmanuel Macron qui décide en 2018 de cette renaissance. Il s’agit d’abord d’un sauvetage, celui d’un patrimoine constitué par un château bien délabré et la très belle forêt de Retz.
Mais aussi d’une création, celle d’un nouveau lieu de vie autour de la langue française, de la francophonie, destiné à abriter la Cité internationale de la langue française. Le chantier est sous la responsabilité du Centre des Monuments Nationaux avec pour objectif de créer un « voyage » véhiculé par la langue française.
PROGRAMME COMPLET
Expositions, spectacles, projections de films, fêtes, résidence d’artistes, de chercheurs, ateliers de formation, laboratoire de recherche, autant d’activités prévues pour animer la vie du château royal, situé à peine à 80 kms de Paris. Un parcours est créé autour de différents poles, l’histoire du château, la langue française vivante, réinventée, et transformée par les rappeurs, les francophones de pays lointains, les poètes et écrivains.
Certaines startups seront les bienvenues sur de nouveaux concepts liant langue et intelligence artificielle, ce qui pourrait aboutir à la création d’un incubateur dédié aux langues. La Cité est un projet ambitieux qui se veut à la fois éducatif, économique et touristique. Liant passé, présent, futur, l’adjectif « international » ne doit pas être oublié, c’est le français dans le monde qui est le sujet.
UN CHANTIER CULTUREL HORS NORME
Trois grands thèmes ont été définis pour le futur parcours de visite ouvert au grand public, culture et création, éducation et formation, recherche et innovation. Pour parvenir à ces fins, un investissement de quelques 185 millions d’euros a été nécessaire, faisant de ce projet le plus grand chantier culturel de ces dernières années.
LE FRANÇAIS, LANGUE MONDIALE
Le français est aujourd’hui la cinquième langue parlée au monde. Devancée par le chinois (mandarin), l’anglais, l’espagnol, l’arabe, elle est parlée sur les cinq continents. On répertorie 300 millions de francophones dans le monde dont 235 millions qui utilisent le français au quotidien. Elle reste une véritable langue diplomatique, 32 États ayant le français comme langue officielle, dont de nombreux États africains. Un point intéres- sant rarement mis en avant est que le français est bel et bien une langue d’aujourd’hui, la preuve en est qu’elle occupe la 4e place sur internet.
OUVERTURE PROGRAMMEE
La date n’est pas précisée, mais la fin juin a été définie pour l’ouverture de la Cité internationale de la langue française, dirigée par le tout nouveau directeur Paul Rondin, après quelques retards dus à la pandémie. Trois années de travail intensif de restauration et de création d’animations interactives ont été nécessaires pour accueillir quelques 200 000 visiteurs par an.
Paul Rondin, ancien directeur délégué du festival d’Avignon, réfléchit également à la création d’un festival dans ce lieu si particulier, peut-être sur le thème de l’humour, qui exploite toutes les subtilités de la langue.
La Cité internationale de la langue française est l’un des plus grands projets culturels de ces dernières années, parler, écrire, traduire, écouter le français sous toutes ses formes, voici un défi républicain. Peut-être le surnom donné par François Ier au château de Villers-Cotterêts « Mon Plaisir » redeviendra-t-il de mise après des siècles de déshérence. Car la terre du pays de Valois a déjà fait honneur à la langue française, elle a vu naitre non loin de là Alexandre Dumas, Jean Racine ou Jean de la Fontaine. Sans oublier que depuis juin 2022, le château et son parc sont classés domaine national.
Les vi-siteurs pourront également conjuguer cette visite avec d’autres lieux proches, comme les châteaux de Pierrefonds, de Coucy ou un peu plus loin, le château de Chantilly, l’abbaye de Royaumont sans oublier un autre type d’attraction, le Parc Astérix par exemple. À moins qu’ils ne choisissent de se perdre dans la belle forêt de Retz labellisée « Forêt d’exception » en mars 2022. Un magnifique programme.
Anne Florin