Par Matthieu Stefani, co-fondateur et CEO d’Alvo
Portés par la conjoncture, les « Deals Small Cap », transactions de moins de 10 millions d’euros, ont pris une place prépondérante dans le paysage des fusions-acquisitions. Au regard de la dynamique actuelle, le consensus des analystes pour les « Small Caps » s’établit à +27% pour 2023 et +16% pour 2024[1]. Cette tendance s’explique en partie par le phénomène « d’entrepreneurship through acquisition« , où de plus en plus d’individus aspirent à devenir entrepreneurs en acquérant des entreprises déjà existantes. Ces transactions dynamisent le marché M&A (Mergers and Acquisitions) en apportant un souffle nouveau à l’innovation et en créant des opportunités pour les TPE-PME de prospérer dans un environnement économique en constante mutation.
Dans ce contexte, comment ces changements redéfinissent le marché du M&A ? Quels acteurs du secteur peuvent préparer au mieux les nouveaux acheteurs, et les accompagner dans le processus d’acquisition ?
Le marché des M&A redéfini par des changements sociétaux
L’évolution constante de la société influence de manière significative le paysage économique, et le marché des fusions et acquisitions ne fait pas exception. À mesure que des changements sociétaux profonds se manifestent, le M&A, traditionnellement considéré comme un jeu financier, se développe.
Le premier moteur de la transformation du marché de la fusion et acquisition est démographique. L’Europe voit sa population vieillir. Les “papys boomers” de la génération du baby-boom approchent de l’âge de la retraite, entraînant une vague de transmissions et de cessions d’entreprises. 72% des cessions font suite à un départ à la retraite contre 66% en 2017[2]. Elles représentent, pour les entrepreneurs en quête de nouvelles initiatives, une opportunité inédite. La pandémie mondiale a engendré une prise de conscience collective sur l’importance de trouver un sens profond dans le travail. De nombreux cadres, managers et salariés, cherchent à quitter le monde corporatif pour reprendre ou créer des entreprises qui correspondent davantage à leurs aspirations personnelles et valeurs. Environ 70% des repreneurs ont plus de 40 ans.[3] Cette quête de sens stimule la demande pour la reprise d’entreprises existantes.
Les consommateurs et les investisseurs sont de plus en plus attentifs aux pratiques commerciales durables, aux questions environnementales et à la responsabilité sociale des entreprises. Cette sensibilité influence désormais les transactions de fusion et acquisition (M&A), modifiant la manière dont les entreprises évaluent leurs partenaires potentiels et conduisent les négociations. Les entreprises qui intègrent ces critères éthiques et sociaux dans leurs démarches de M&A auront la capacité d’attirer et de retenir plus efficacement les talents, créant ainsi une valeur ajoutée durable.
Dans un contexte de globalisation en mutation et d’une tendance croissante à la démondialisation, les petites entreprises, notamment en Europe, sont confrontées au besoin impératif de consolidation pour rester compétitives, mais aussi pour maintenir la souveraineté économique régionale. Ce processus permet aux petites structures de se transformer en PME plus robustes et influentes, capable de faire face aux défis économiques et de tirer parti des opportunités émergentes.
À l’aube d’une nouvelle ère : l’importance des intermédiaires et du digital lors de la transmission d’entreprise
En 2024, le succès des reprises d’entreprise repose sur l’expertise et la collaboration avec des intermédiaires. Près de 60% des transactions de M&A sont des échecs stratégiques, laissant les entreprises impliquées avec des pertes financières importantes et des impacts négatifs sur leur réputation[4]. Due diligence insuffisante, objectifs opérationnels incompatibles, valorisation imprécise, ou délais d’intégration trop longs, les défis économiques et les opportunités émergentes exigent une approche holistique, où ces acteurs jouent un rôle pivot. Les intermédiaires, tels que les conseillers en fusion-acquisition, les experts-comptables, et les courtiers spécialisés, agissent comme des accélérateurs de transactions et fluidifient les échanges. Ces acteurs spécialisés sont en mesure d’identifier les opportunités, de négocier des accords avantageux et de faciliter le processus complexe de la reprise d’entreprise.
Jusqu’à présent, les difficultés de transmission des entreprises, surtout les « small caps », résidaient dans l’absence d’un marché centralisé et transparent. Avec la digitalisation et l’évolution du marché, les intermédiaires diversifient leurs services et développent des activités de conseil. Ils proposent de plus en plus de services d’accompagnement à la transmission d’entreprise digitalisés, répondant ainsi aux besoins croissants des entreprises. Les outils technologiques offrent une transparence et une accessibilité sans précédent, permettant aux entrepreneurs, chefs d’entreprise, et intermédiaires, d’affronter l’écosystème du M&A, et ainsi faciliter la prise de décision et réduire les frictions. Ils jouent un rôle crucial dans la fluidification et l’accélération des transactions.
Cette révolution, impulsée par des changements démographiques, économiques, culturels et technologiques, ouvre des portes vers des perspectives sans précédent. Il est impératif pour les acteurs du marché de se préparer activement à cette transformation, en utilisant les différents outils digitaux. L’avenir des TPE-PME réside dans leur capacité à embrasser le changement et à saisir les opportunités offertes.
[1] Source : Etude ODDO BHF
[2] Source : Observatoire de la transmission 2023
[3] Source : Observatoire de la transmission 2023
[4] Selon une étude de McKinsey