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Pourquoi le métier d’analyste ISR s’enracine dans le secteur de la finance durable


Depuis une dizaine d’années, le développement de l’ISR (Investissement socialement responsable) suscite un vif intérêt de la part des acteurs du secteur financier. Banques, sociétés d’assurance, fonds d’investissement mais encore agences de notation et de communication, sont de plus en plus nombreux à intégrer les critères environnementaux, sociaux et de...

Entreprendre - Pourquoi le métier d’analyste ISR s’enracine dans le secteur de la finance durable

Depuis une dizaine d’années, le développement de l’ISR (Investissement socialement responsable) suscite un vif intérêt de la part des acteurs du secteur financier. Banques, sociétés d’assurance, fonds d’investissement mais encore agences de notation et de communication, sont de plus en plus nombreux à intégrer les critères environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG) dans leurs choix d’orientation et d’investissements stratégiques et, à se doter d’analystes ISR.

Certaines entreprises vont même jusqu’à développer des départements entiers consacrés à l’analyse extra-financière. Le développement de l’ISR et de surcroit le développement des offres d’emploi associées d’analyste, s’inscrit dans le contexte politico-social des dernières années – favorables aux revendications sociales, à la défense de la gouvernance et à la préservation de l’environnement. Par ailleurs, l’émergence d’un contexte règlementaire contraignant participe au développement d’une « finance responsable » dont l’activité vise la recherche de la performance financière en combinant la prise en compte des besoins des générations actuelles mais également la possibilité pour les futures générations de satisfaire leurs propres besoins. L’ISR dispose donc d’un terreau fertile favorable à son développement.

Soucieux de préserver leur image ou tout simplement pragmatiques, les acteurs financiers ont pris conscience de la valeur ajoutée d’une stratégie d’investissement socialement responsable et s’en sont saisis, comme l’atteste l’émergence des nouvelles offres financières dans ce sens. En effet, poursuivant une logique de marché, la sphère financière n’a d’autres choix que de répondre aux valeurs et aspirations de la société en adaptant son offre à la demande.

Un sondage réalisé en 2018 par l’Ifop révèle ainsi que 63% des personnes interrogées accordent une place importante aux impacts environnementaux et sociaux dans leurs décisions de placements, contre 48% une année auparavant.

L’analyste ISR, bien plus qu’un simple auditeur social et environnemental

Les analystes ISR ont essentiellement pour rôle de fournir une opinion qualitative et/ou quantitative sur les pratiques sociales, environnementales et de gouvernance des entreprises à partir d’une grille de décision afin d’aider les gestionnaires, investisseurs privés dans leur choix d’investissements. Pour ce faire, les analystes ISR suivent de près l’actualité ESG : ils collectent, trient, hiérarchisent un grand nombre d’informations extra-financières. Ces informations émanent des rapports sociaux1 et
environnementaux (Rapport RSE)2 publiés par les entreprises, ONG ou les Etats. La presse spécialisée peut aussi représenter une source d’information pertinente.

Toutefois, considérer que le métier d’analyste ISR consiste simplement à certifier la fiabilité des comptes sociaux et environnementaux d’une entreprise et à restituer ainsi un audit social et environnemental pour attester de leur « bonne santé extra-financière » est réducteur. La profession inclut également un rôle de conseil et d’assistance visant à favoriser le développement d’une entreprise.

En effet, il ne faut pas oublier que dans ISR le premier mot est « investissement ». Par conséquent, la recherche de la performance financière est l’un des objectifs de l’analyste ISR. Ces derniers ont pour rôle d’évaluer chacun des actifs « extra-financier » à l’aune de leur rentabilité financière. Ils doivent évaluer leur contribution nette dans un portefeuille d’investissement. L’évaluation de la valeur créative ou destructive apportée par un actif « extra-financier » aiguille les gestionnaires dans leurs prises de décision.

L’analyse ISR peut ainsi être définie comme l’art d’évaluer la rentabilité financière d’un investissement sous contraintes d’exigences sociales et environnementales. Les critères socio-environnementaux ne viennent pas en supplément des critères financiers mais sont placés à égalité. Autrement dit, la valeur d’un actif est évaluée non seulement au regard des principes de l’Ecole de Chicago (qui prône la rentabilité financière) mais également au regard des principes de développement durable dont l’objectif est de « de répondre aux besoins du présent sans compromettre la capacité des générations futures à répondre aux leurs » (Rapport Bruntland de 1987). L’analyse ISR est sous-tendue par une logique financière à moyen-long terme.

Un métier qui suscite un intérêt croissant dans le secteur financier 

Une étude de 2018 réalisée par le cabinet de recrutement Birdeo met en exergue le développement croissant des offres d’emploi dans le secteur de la finance durable. En 3 ans, le nombre de postes proposé aurait progressé de 15%. Ce sont notamment les fonds de gestion d’Asset Management ou de Private Equity qui sont pourvoyeurs de ce type de postes. 

A l’heure actuelle, les profils les plus recherchés sont ceux ayant une double expertise, c’est-à-dire une combinaison de compétences en finance et en responsabilité sociale des entreprises.

Des contours encore mal définis

Le métier d’analyste ISR demeure toutefois à définir. Les principes et méthodologies sont en construction. A ce jour, les méthodologies d’analyse ISR restent très disparates et diffèrent d’une entreprise à l’autre, et les critères d’évaluation d’un investissement ne sont pas toujours très objectifs.

Pour autant, nul doute que ce métier va se normaliser et se codifier à l’instar du métier d’analyste financier qui possède sa propre certification CFA. La création d’une certification d’analyste ISR reconnue à l’échelle mondiale est peut-être d’ores et déjà à l’étude et serait la confirmation d’une reconnaissance professionnelle du métier.

Par Aude Renelier, consultante pour le cabinet de conseil Groupe Square.

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