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Le patron français de Moderna, Stéphane Bancel, demande le lancement d’un fonds de croissance pour nos biotechs !


On est quand même un pays formidable, unique en son genre. Un pays, celui de Pasteur, à la fois incapable de produire dans les temps un vaccin anti-Covid, même si Sanofi annonce le sien un an après Pfizer ou Moderna , et en même temps, celui dont est originaire Stéphane...

Stéphane Bancel, le patron du laboratoire Moderna.

On est quand même un pays formidable, unique en son genre. Un pays, celui de Pasteur, à la fois incapable de produire dans les temps un vaccin anti-Covid, même si Sanofi annonce le sien un an après Pfizer ou Moderna , et en même temps, celui dont est originaire Stéphane Bancel, 49 ans, l’extraordinaire ingénieur centralien formé à la biochimie et que le monde nous envie.

Qualifié partout « d’homme qui pourrait sauver le monde », celui qui a fait ses armes chez BioMérieux (de 1995 à 2008) a même intégré à la faveur du succès de son ARN messager le top 30 des fortunes mondiales de Forbes (23 éme position avec une fortune estimée à 3,6 milliards d’euros)

Cela laisse songeur. Une progression record même si ce n’est pas du tout la motivation première du PDG de Moderna. À l’écouter, dans un entretien accordé au Journal du Dimanche, c ‘est même tout l’inverse et pourrait s’apparenter à du bénévolat : « avec ma femme, nous donnons l’intégralité de notre fortune à une fondation baptisée Champions of love. Nos enfants sont prévenus : « on paye vos études et ensuite vous vous débrouillez. » Voilà qui est clair !

Bancel est animé par l’intérêt supérieur de l’humanité, et ne semble n’avoir jamais douté du fait que ce nouveau type de vaccin n’allait pas manquer d’engendrer comme avancées médicales. L’ingénieur marseillais pense que l’on va pouvoir guérir d’autres maladies : « cette technologie va transformer la médecine d’une manière extraordinaire. En cardiologie, grâce à un partenariat avec AstraZeneca, nous testons une molécule qu’il suffit d’injecter dans le cœur d’une victime d’infarctus pour que des vaisseaux sanguins tout neufs se reconstituent… Nous testons également des traitements personnalisés contre le cancer. Et nous espérons guérir des maladies auto-immunes dont le lupus. »

Tout cela est prometteur, et laisse beaucoup d’espoir. Visiblement, l’intérêt financier n’est pas le moteur de notre génie habité par un projet supérieur. Cela force le respect, notamment lorsqu’il avoue sans ambage : « J’ai été éduqué par les jésuites à servir. Aider à sauver des vies, c’est mon métier depuis mon premier job à 23 ans où je me bâts pour sauver la vie d’enfants japonais victimes d’une épidémie bactérienne…. »

Alors bien sûr, on ne peut pas se réjouir d’un tel parcours aussi prodigieux sans éprouver quelques regrets sur le fait qu ‘il n’ait pas pu mettre en œuvre tout cet esprit d’entreprendre et d’innovation en France au lieu de le faire à Boston aux Etats-Unis. C’est une question légitime et importante. Là aussi, Bancel n’élude pas le sujet, et il y répond. Sur le plan de la Recherche d’abord : « La France a des scientifiques de haut niveau mais manque d’un vivier d’ingénieurs et de techniciens formés aux technologies les plus modernes. « 

Sur le sujet du financement, le PDG de Moderna reste plus catégorique : « il manque une structure adaptée au capital de croissance des biotechs en France à cause d’un problème de législation…»  Une pierre jetée dans le jardin des Bruno Le Maire, Nicolas Dufourcq (BpiFrance) voire d’Emmanuel Macron, pour pouvoir accomplir et réussir cette fameuse « startup nation », à laquelle le président de la République tient et à juste titre. Un président avec qui Bancel échange régulièrement et c’est heureux.

Il est vrai qu’au-delà de la prouesse technologique, la capacité à pouvoir lever beaucoup d’argent devient un point fondamental dans les nouvelles réussites mondiales du monde globalisé. Qui lève le plus et vite, gagne ! On l’a vu ces dernières années pour les GAFA américains propulsés à la fois par le formidable essor du capital risque américain aussi bien que par les appuis massifs et ininterrompus des administrations et notamment du Pentagone, comme cela a été le cas pour Google.

Moderna a pu aussi être soutenu très rapidement au début de l’épidémie par Donald Trump en personne, qui après avoir lui même rencontré Stéphane Bancel et ses équipes dès le 2 mars 2020 à la Maison-Blanche, n’hésita pas à mobiliser très vite moyens, logistiques et commandes. Une subvention exceptionnelle de 483 millions de dollars pour « le développement du vaccin contre le coronavirus » de la part du BARDA (Biomédical Advanced Research and Development Authority) fut enclenchée. En mai 2020, le président de la banque Morgan Stanley, James Gorman souscrivit seul l’intégralité de l‘augmentation de capital pour 1,3 milliards de dollars. Ce qui fait dire prosaïquement à Bancel : « on peut critiquer la vision à très court terme des marchés financiers, mais en l’occurrence, ils ont réagi très vite et efficacement. »  (sic)

Des ses débuts en 2011,  Moderna a pu mobiliser un financement record de 100 milliards de dollars et de nombreux family offices se sont penchés sur son berceau dont un certain Bernard Arnault, le fondateur de LVMH, qui a investi dès 2016 dans Moderna via sa holding familiale Agache.
Les riches, cela sert aussi à cela ! Donc, autant les avoir chez soi ! Essayons de nous en rappeler, au lieu de chercher à les pourchasser.

Robert Lafont

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