Laurent Vigier, PDG de CDC International Capital, filiale de la Caisse des Dépôts dédiée aux partenariats d’investissement avec des fonds souverains, revient sur les relations qu’entretiennent la structure française avec le fonds souverain coréen Korea Investment Corporation (KIC). Cette coopération a pour but d’accompagner des sociétés françaises et coréennes ayant un lien avec la France.
Pourquoi le fonds souverain coréen KIC s’intéresse-t-il aujourd’hui à la France ?
Laurent Vigier : CDC IC agit comme un catalyseur de fonds souverains. L’accord vient d’être signé avec KIC mais nous sommes en contact avec eux depuis plusieurs mois. Le fonds KIC, jusqu’à présent très implanté en Asie et aux États-Unis, a décidé de faire un rééquilibrage en Europe et notamment en France.
Quelles sont les cibles des 500 M€ que KIC veut investir en France (secteurs, tailles d’entreprises…) ?
LV : En fait, l’enveloppe est de plus de 600 M€ puisque CDC IC co-investira l’équivalent d’au moins 25% de l’apport de KIC. Il s’agit de tickets minoritaires allant de 50 à 200 M€, ce qui correspond à des ETI plus qu’à des PME, avec un focus sur les entreprises qui ont un potentiel de croissance à l’international, de préférence avec des ambitions en Asie.
Tous les secteurs sont concernés, notamment ceux où la France a un savoir-faire reconnu, comme l’agro-alimentaire, les technologies numériques ou la santé. Notre premier investissement, signé en juillet, est d’ailleurs dans le secteur pharmaceutique [Ethypharm, Ndlr].
Quelles sont les spécificités des Coréens par rapport aux autres fonds souverains (Qatar, Chine, Russie, Arabie saoudite) avec lesquels vous travaillez ?
LV : Tous les fonds souverains ont un fonctionnement assez convergent, au-delà des spécificités de chaque pays. La principale caractéristique commune, c’est d’envisager l’investissement à long terme, sans pression sur la sortie, comme les fonds privés. Pour les entreprises, c’est un gage de solidité et de stabilité.
Tous évoluent d’une gestion déléguée à une gestion plus active, en demandant par exemple un siège au conseil d’administration. Dans cette tendance, les Coréens entendent jouer un rôle moteur important, d’autant que l’économie coréenne, qui ne repose pas sur des ressources naturelles, est assez proche de l’économie française.
Au-delà de l’apport financier, quelles synergies les investisseurs coréens peuvent-ils apporter aux PME et ETI françaises ?
LV : Un soutien opérationnel ne fait pas partie explicitement du deal. Mais l’intérêt des investisseurs est évidemment de contribuer à la création de valeurs de leurs participations. La Corée, pays naturellement tourné vers l’export, tête de pont idéale pour l’Asie, a signé en 2015 un accord de libre échange avec la Chine.
Les entreprises peuvent naturellement bénéficier des forts réseaux de leurs investisseurs pour ouvrir des portes. Et avoir un fond souverain à son capital est un critère de différenciation et de reconnaissance