Livestorms est une plateforme de conférence en ligne. En 2020, l’entreprise a levé 30 millions d’euros. Entretien avec le cofondateur de la startup Gilles Bertaux.
Pouvez-vous vous présenter brièvement ainsi que votre entreprise ?
Je suis Gilles Bertaux, co-fondateur et PDG de Livestorm, la première plateforme d’engagement vidéo tout-en-un qui permet de se connecter, d’interagir et de capturer les données de performance en un seul et même endroit.
Je suis un jeune entrepreneur. J’ai co-fondé Livestorm en 2016 avec des amis rencontrés sur les bancs de l’HETIC : Robin Lambert, Tom Forlini et Vincent Garreau. En 2020, nous avons levé 30 millions de dollars en série B afin d’accélérer l’expansion commerciale de Livestorm et créer des offres spécifiques répondant aux besoins des très grandes entreprises.
La plateforme de Livestorm est accessible directement depuis le navigateur et ne nécessite ni téléchargement, ni installation. Livestorm peut être utilisé pour des réunions, webinars ou événements à la demande, en direct ou préenregistrés.
Aujourd’hui, plus de 5 000 entreprises font confiance à Livestorm pour organiser leurs réunions, webinaires ou événements en ligne.
De par notre fort développement cette année, nous avons été amenés à recruter un grand nombre de profils et nous avons des difficultés à recruter des profils féminins dans ce domaine. En effet, nous avons fait le triste constat que seules 12% des candidatures à Livestorm sont déposées par des femmes pour un poste ouvert dans l’équipe tech, alors que dans la plupart des autres fonctions, la parité́ est respectée. C’est pourquoi nous avons voulu mener une étude pour comprendre pourquoi et connaître la perception de ce secteur par les Français et son attractivité, notamment par les femmes.
En effet, les métiers du numérique offrent de plus en plus l’avantage de travailler à distance grâce à un modèle hybride. La quasi-totalité des personnes interrogées (91%) et surtout les femmes (93%), voient dans le télétravail un critère majeur. Cette flexibilité semble constituer une réelle motivation pour elles : 70% pensent que le télétravail est l’atout le plus important de ce secteur.
Vous avez réalisé une étude sur la disparité Hommes / Femmes dans le secteur de l’informatique et des nouvelles technologies, que pouvez-vous nous dire sur les résultats obtenus ?
Selon cette étude réalisée avec Opinéa, 24% des femmes estiment que le secteur reste essentiellement ouvert aux hommes. Les raisons qui sous-tendent l’absence des femmes dans cette industrie sont diverses : manque de modèles féminins dans ce domaine. En effet, il semble que les femmes sont moins nombreuses à opter pour des études en informatique, ce qui impacte forcément la parité du genre dans les candidats à postuler à ces postes. Et ce, malgré les différents atouts qu’offrent les métiers du numérique : flexibilité et modèle de travail hybride, énumérations attractives, etc.
En ce qui concerne les rémunérations dans ce secteur, 49% des interrogés les considèrent attractives, aussi bien pour les femmes que pour les hommes. Le potentiel salarial est en effet substantiel même pour les emplois de premier échelon. Les salaires plus élevés et les avantages sociaux proposés s’expliquent par la pénurie de talents dans ce domaine.
L’étude met également en avant que le secteur de l’informatique et des nouvelles technologies est un secteur prometteur dans l’imaginaire des Français : près d’une personne sur deux (49%) estime qu’il est un domaine d’avenir.
Pourtant, l’étude Livestorm révèle que seulement 21% d’entre eux déclarent vouloir orienter leur fille vers le secteur des nouvelles technologies, pour lequel ils préfèrent des professions traditionnellement considérées plus féminines comme le secteur de l’administration publique, l’enseignement, la santé, etc. Lorsque la même question est posée concernant les garçons, 38% des personnes interrogées choisissent l’informatique et les nouvelles technologies comme premier souhait d’orientation.
On constate donc un véritable problème de perceptions du secteur des nouvelles technologies, qui reste malheureusement à la traine par rapport aux autres secteurs sur le plan du recrutement des femmes, malgré́ les avantages offerts par le secteur.
Selon vous, comment les entreprises peuvent-elles réduire l’écart et encourager plus de femmes à opter pour des carrières en informatique ?
Les entreprises pourraient se pencher sur plusieurs pistes qui, selon moi, pourraient rendre le secteur plus attractif pour les femmes et les aider à se tourner vers la voie du numérique. Elles pourraient recruter des femmes lauréates d’écoles informatiques 100% féminines dont le nombre ne cesse d’augmenter. Elles pourraient également lancer un programme de mentoring, en demandant à des femmes occupant des postes de responsabilités au sein de l’entreprise de prendre sous leurs ailes les nouvelles recrues.
Les décisions gouvernementales nécessitent toujours plus de temps pour être prises. C’est pourquoi le rôle des collaborateurs et des entreprises, aujourd’hui, est de suggérer de nouveaux dispositifs et d’être force de proposition pour réclamer des reformes. Parental Act en a donné́ l’exemple en constituant une étape avant-gardiste au sein d’une multitude d’entreprises en France. Avec 434 entreprises signataires et 42.854 salaries impactés, le dispositif permet d’allonger le congé pour le deuxième parent qui, aujourd’hui, n’est que de 28 jours consécutifs.
Il s’agit là d’un point de départ, mais le chemin est encore très long. Il est important de multiplier les initiatives similaires à celle-ci afin d’opérer le changement escompté au sein des entreprises et inciter le gouvernement à élaborer de nouveaux dispositifs règlementaires et juridiques adaptés au nouveau mode de travail.
Quelles sont les mesures que Livestorm souhaite mener pour réduire cet écart en interne ?
Tout d’abord, nous souhaitons revoir nos méthodes de recrutement afin de diversifier les processus d’embauche. La mise en place de scores grids de recrutement plus strict au sein des lors du processus d’embauche pourrait constituer notamment un bon point de départ pour que tous les candidats aient les mêmes chances, et que les capacités et les compétences soient les seuls critères qui puissent départager deux candidats, et non le genre.
Nous réflechissons également à organiser ou parrainer un coding bootcamp féminin. Nous avons récemment organisé un hackathon où bous avions choisis comme partenaires les écoles Female Coders et de SheCan Code. Ce type de parrainage serait une solution idéale pour les femmes qui n’ont pas suivi de formation aux métiers de la tech. C’est également une technique adéquate pour encourager et valoriser les changements de parcours professionnels et de réinsertion dans d’autres secteurs.
Quels sont vos objectifs pour l’année 2022 ? Prévoyez-vous de prochains grands développements ?
Au cours des deux dernières années, nous nous sommes concentrés sur notre stratégie de développement. Nous avons massivement investi dans la notoriété de notre marque et le développement des ventes.
Nous allons maintenant nous concentrer sur le développement de notre écosystème et sur certains marchés dynamiques, en mettant l’accent sur les États-Unis, afin de consolider notre position en tant qu’entreprise internationale.
Dans les prochaines années, nous voulons devenir la première plateforme tout-en-un qui permet aux équipes de créer une stratégie complète d’engagement vidéo en un seul endroit, de tout gérer de A à Z, et de permettre aux gens de personnaliser les vidéos avec d’autres outils utilisés par l’entreprise.
Nous pensons que la communication vidéo aura un impact sur notre façon de travailler et de vivre, qu’il s’agisse du travail à domicile, de la télémédecine, de l’enseignement dans des classes virtuelles ou de tout autre événement en ligne. Il n’y a pas de limites à l’utilisation de la vidéo et nous pensons qu’elle va fortement influencer notre vie quotidienne.
Du point de vue des produits, nous souhaitons redoubler d’efforts en matière d’intégration et de fonctionnalités haut de gamme afin d’étendre notre portée aux entreprises. Nous sommes actuellement intégrés à plus de 20 applications telles que Pipedrive, HubSpot et Intercom, et nous prévoyons de déployer plus de 100 intégrations supplémentaires l’année prochaine. Nous voulons également créer un marketplace d’intégrations pour notre plateforme, à la manière de Slack : un écosystème où les développeurs pourront facilement construire sur Livestorm.