Rien de tel que d’avoir dans sa commune une PME familiale investie et ancrée dans le territoire… surtout par les temps qui courent !
L’année 2020 va marquer une étape pour les PME françaises. Une tendance s’est clairement affirmée pendant le printemps : l’importance du local, du terroir, déjà présente en France comme dans les autres pays européens, a gagné des places dans les priorités des Français. Avec la crise sanitaire, le raisonnement est allé plus loin, les citoyens ne souhaitant pas dépendre de manière excessive de puissances lointaines, surtout en matière médicale.
Certaines PME, particulièrement en région, avaient déjà anticipé. Relocaliser est parfois possible, voire même obligatoire si cela est considéré comme stratégique au niveau français ou européen. Et des PME dynamiques sont au centre du dispositif.
L’Arbre Vert, le Petit Poucet de l’entretien L’entreprise est la première marque française de produits d’entretien écologiques en grande distribution. Ses succès incontournables sont le liquide vaisselle et la lessive. Une réussite bâtie avec patience et conviction et dont le savoir-faire se développe aujourd’hui dans la ligne bien-être et beauté.
Comment a fait cette PME régionale pour exister et résister face à des géants tels qu’Henkel, Colgate-Palmolive ou Procter & Gamble ? Sans aucun doute, le fait que l’Arbre Vert et Novamex, son propriétaire basé à Cavaillon, aient été les premiers sur le marché, ni trop tôt, ni trop tard, a été un facteur primordial permettant d’installer la marque sur les rayons des grandes surfaces. L’offre répondait à un besoin, encore peu exprimé, et les produits ont tenu leurs promesses.
Michel Leuthy et la lessive écolo
Il fallait quand même y croire en 2003 quand Michel Leuthy a lancé le concept de la lessive écolo. Elle fut la première société européenne à obtenir la certification Ecolabel en 2007. Chimiste de formation, il a été conscient rapidement de l’influence de certains produits chimiques sur l’environnement, et dans le traitement de l’eau en particulier. A 32 ans, il crée une société de distribution de produits chimiques. Une usine en liquidation du groupe Saint-Gobain est à vendre près de Poitiers, elle avait dans son portefeuille la marque l’Arbre Vert. Michel Leuthy rachète le tout et fonde le concept de sa nouvelle offre : des produits d’entretien certifiés Ecolabel, efficaces, accessibles pour tous. Pourtant le marché était minuscule à l’époque, mais son flair ne l’a pas trompé.
Nouveau propriétaire et poursuite de l’objectif
La marque a été rachetée par le groupe familial milanais Sodalis, à la retraite du fondateur. Ce groupe produit et distribue des produits d’hygiène personnelle et d’entretien de la maison en Italie sous les marques Denim, Vital, Fresh et Clean. Aujourd’hui, la marque française a diversifié son offre, car le marché de l’entretien va peu à peu « verdir » dans sa globalité et il faut continuer sur la voie de l’innovation.
La gamme de produits de beauté « Peaux Sensibles » récemment créée travaille avec le label Médical Ecarf, un cahier des charges européen contre les allergies. Marco Petrelli, le nouveau dirigeant, souhaite poursuivre en France sur la route de création d’une véritable marque transversale.
Les cornichons se relocalisent
Il s’agit des cornichons qui se vendent sous la marque « Jardin d’Orante », soutenue par le chef Marc Veyrat. Avec 30 millions de bocaux, on peut dire que l’aventure d’Emmanuel Bois sous l’égide du groupe suisse Reitzel est déjà un succès. L’histoire a commencé avec deux agriculteurs seulement qui ont accepté de tenter l’aventure. Prêts à défendre l’honneur du cornichon français face aux bocaux remplis de produits indiens.
L’Inde est en effet un gros consommateur et le premier producteur. Ils sont à présent dix agriculteurs à travailler pour la marque, prouvant ainsi que le made in France est viable. Ce défi en cours d’être remporté prouve également que le salut passe parfois par l’Europe. En effet, la filière s’était arrêtée, car les marques françaises s’étaient orientées vers l’approvisionnement indien. La renaissance a été imaginée par un groupe suisse, Reitzel, spécialiste des condiments depuis 1909 qui a racheté la marque « Jardin d’Orante » en 2006 au groupe Lesieur. Il possède deux sites de production en France.
Une nouvelle filière agricole
Depuis 2017, le cornichon français est à nouveau commercialisé par le groupe, grâce à cette nouvelle filière agricole, encore modeste, mais en croissance. Le succès est au rendez-vous en dépit du fait que le climat français ne permette qu’une récolte annuelle au lieu de trois sur le continent indien, d’où la plante est originaire. Pourtant le produit est gourmand en main d’œuvre, car la saison venue, un cornichon double de taille dans la journée, cela signifie qu’un passage quotidien dans les champs pour récolter est nécessaire pendant les semaines de récolte, qui se fait à la main.
Nataïs, leader du popcorn
Certaines PME osent se lancer sur des créneaux qui ne semblent pas évidents au premier abord. C’est le cas de Nataïs dont la destinée se confond avec celle de Mickaël Ehmann. Ce dernier a grandi dans une famille « d’agriculteurs entrepreneurs » en Allemagne, le grain a été semé très tôt. En rentrant des Etats-Unis en 1989, sur les terres du Gers qu’avaient acheté ses parents, le projet de lancer du maïs pour popcorn est clair dans son esprit. Mais il faudra plusieurs années d’essais pour trouver la bonne variété par rapport au climat et aux sols.
Une fois le maïs récolté, et le produit créé, les clients ne se sont pas vraiment précipités sur ce produit typé américain made in France. Il a fallu de nombreuses améliorations pour répondre aux besoins de la filière et une préoccupation constante d’innovation, notamment en termes d’emballages et de praticité. C’est cette recherche constante de progrès sur toutes les étapes de la production qui a permis à Nataïs de s’attaquer aux marchés étrangers et d’y réussir.
La persévérance a porté ses fruits
Aujourd’hui, l’entreprise de Bézéril en Gascogne au Sud-Ouest de Auchs’oriente de façon claire sur l’agro-écologie, le développement régional en termes de cultures et la montée en gamme du produit. Nataïs exporte aujourd’hui dans une cinquantaine de pays, et réalise la quasi totalité de son business à l’étranger. La société est le leader incontesté avec 35% du marché du popcorn. Ses 135 salariés et près de 300 agriculteurs partenaires, dont une vingtaine en biologique.
Plus de 50 millions d’euros de chiffre pour cette belle société du Sud-Ouest qui a récemment décidé d’utiliser la blockchain afin d’être à même de fournir à ses clients toutes les informations liées à la traçabilité. Comme le dit le fondateur « On s’éclate chez Nataïs ».
Pixil veut être de toutes les soirées
C’est à Tours il y a quatre ans que Patrice Yvernogeau et Alexandre Rousseau créent Pixil pour lancer des cabines photos utilisées dans l’événementiel, séminaires, mariages, salons, anniversaires… Comme souvent, c’est à l’étranger, en l’occurrence en Angleterre, que les jeunes gens ont approché le produit. Certains de pouvoir faire un carton en France, ils franchissent le pas de la création d’entreprise grâce à une rencontre avec un pro de la photo.
Ils profitent de cette étape de développement pour mettre au point le miroir photo en prise de vue verticale, se diversifient sur les foires pour les prises de photos sur les manèges, créent un bar à badges ou la photobooth Jackpot, qui permet sous forme de machine à sous de distribuer des lots de façon ludique pendant une soirée professionnelle.
Le bâtiment mène à tout
Les deux entrepreneurs travaillaient dans leur entreprise de négoce en bâtiment, construction et génie climatique. Rien à voir avec la suite. Mais la création est parfois histoire de simple rencontre et d’envie de créer du neuf. On peut aujourd’hui trouver des produits Pixil partout en France, grâce au réseau de distribution qui s’étend jusqu’à l’outremer. Les bornes, fabriquées en France tout comme le logiciel photobooth, sont louées ou vendues par le réseau. Il leur faut tenir la barre face à un secteur devenu de plus en plus concurrentiel.
Le bel éveil de Dodo
Dodo n’est pas que ce pauvre animal disparu, symbole de l’île Maurice. C’est aussi un fabricant français de couettes et oreillers. L’entreprise existe depuis les années 30, en 1937 exactement. Créée par le couple Hannaux, la marque décide très tôt d’aller en grande distribution, alors que celle-ci n’en est qu’à ses premières années. C’est également la première marque de couettes à communiquer à la télévision en 1993.
Quand la croissance externe crée un leader
Installée à Saint-Avold en Moselle, les dirigeants Didier Hannaux, aujourd’hui assisté de son fils Jonathan, décident de plusieurs opérations de croissance externe, avec le rachat des marques Topiol, les textiles Lasson, CTM Style, l’usine Atelier des Vosges, Anne de Solène, Nuit de France. Ils font également un coup d’éclat en reprenant la marque premium Drouault.
Autant dire qu’un client souhaitant acquérir du linge de maison a toutes les chances d’acheter dans le groupe. Son savoir-faire reconnu, ses 6 sites de production sur le territoire français ont font une entreprise incontournable qui emploie 750 salariés et réalise 137 millions d’euros de chiffre d’affaires. Et ce n’est pas terminé.
Les Deux Marmottes ou le succès en infusion
Depuis 1976, et sous l’impulsion de Maurice Lebras et de son gendre, Jean-Marc Stezycki, la PME qui a développé la marque « les Deux Marmottes », à partir du village de Bons-en-Chablais (74), a su au fil du temps se bâtir une vraie réputation autour des tisanes et infusions élaborées à 100% avec les plantes de petits producteurs français sélectionnés. Cette patience a porté ses fruits, une soixantaine de salariés travaillent aujourd’hui dans la société qui réalise plus de 13 millions d’euros de chiffre d’affaires en grande distribution, restauration hors domicile et vente directe sur internet.
Belle réussite pour la PME savoyarde reprise par Christian Polge, ex Coca Cola passé à l’infusion. Ce grand écart ne l’impressionne nullement, il espère bien multiplier par 10 les exportations des produits. La société a été labellisée PME+ par la Fédération des Entreprises et Entrepreneurs de France. Ce label met en valeur certains critères RSE tels que l’approvisionnement responsable, l’emploi local, des emballages éco-responsables et recyclables. 115 entreprises sont aujourd’hui labellisées.
Ces PME régionales présentent l’avantage d’être ancrées dans leurs territoires. Autour d’elles, elles alimentent toute une économie locale. Autre avantage, elles délocalisent beaucoup moins, que les grosses unités. Il serait temps d’envisager sur ces PME familiales une totale exonération des droits de succession, comme cela se pratique en Allemagne ou en Italie.
A.F.