Pionnier de la robotique agricole, la jeune pousse toulousaine Naïo Technologies va pouvoir consolider son leadership avec sa levée de fonds de 32 millions d’euros. Le champion du désherbage des cultures maraîchères et de la vigne accélère à l’exportation. Il créé une offre de robots légers, 100% électriques. Retour sur un modèle de développement.
Gaëtan Séverac et Aymeric Barthes sont les heureux parents d’une startup qui vient de fêter ses dix ans en novembre dernier. Rien n’était pourtant gagné d’avance dans cette création d’entreprise du secteur de l’agritech. Les deux hommes sont ingénieurs en robotique. Ces deux Toulousains ont baptisé leur société Naïo Technologies dans leur région de cœur, le siège est implanté à Escalquens.
On ne peut qu’envier ces deux hommes qui ont choisi un business qui fait rêver. Presque un jeu, car ils créent des robots qui répondent aux jolis noms de Oz, Dino ou Ted. Oz est un magicien spécialiste du binage / désherbage pour les maraîchers. Dino opère également sur ce secteur, mais en tant que robot enjambeur.
Quant à Ted, haut sur pattes lui aussi, il est un spécialiste de l’entretien des sols de la vigne. Les trois aînés sont heureux d’avoir d’ores et déjà deux nouveaux petits frères, tous frais éclos du savoir-faire de Naïo, Orio, un pro des légumes sur surfaces industrielles et Jo, le chenillard pour vignes étroites et pépinières. Ils sont nés suite aux désirs exprimés par les clients eux-mêmes, quoi de mieux pour des entrepreneurs ?
LA RECETTE DU SUCCÈS : RÉPONDRE À DES BESOINS IDENTIFIÉS
Pour réussir en entreprise, il faut parvenir à répondre à une demande, ni trop tôt, ni trop tard. Et Naïo Technologies apporte des solutions dans plusieurs domaines pour les agriculteurs à un moment où le besoin se fait pressant.
MAIN D’ŒUVRE
Avant de se lancer, les fondateurs se sont basés sur un diagnostic bien réel, qui peut sembler évident aujourd’hui, mais moins il y a dix ans. Il s’agit du manque de main-d’œuvre, un phénomène particulièrement aigu dans le monde agricole même si d’autres secteurs économiques ont été touchés depuis. C’est en discutant avec des professionnels de l’agriculture que la question se pose d’un petit robot pratique et bien adapté à certains besoins.
TÂCHES FATIGANTES
L’offre mise au point par Naïo Technologies permet de compenser partiellement ce manque difficile à combler pour les exploitants agricoles, mais elle a également une autre mission, débarrasser les travailleurs agricoles de tâches physiques ingrates ou difficiles. Sans oublier que lorsque c’est un robot qui désherbe, la tentation d’utiliser des produits herbicides souvent nocifs baisse d’un cran.
100% ÉLECTRIQUE
Enfin, cerise sur le gâteau, les robots de la famille Naïo sont électriques, légers, l’entreprise réalise son bilan carbone et dispose même de la certification B-Corp.
Un travail d’amélioration des performances des robots se poursuit également en collaboration avec Varta, le leader allemand des batteries, afin de prolonger l’autonomie des robots. Un point capital pour les clients. Ce travail a d’ores et déjà porté ses fruits avec des bornes de recharge portatives à énergie solaire vers lesquelles les robots se dirigent en cas de petit « coup de mou ».
300 robots fabriqués par Naïo Technologies travaillent un peu partout sur le globe, une filiale est née en Californie, avec 70 collaborateurs, et l’entreprise n’entend pas en rester là. Elle prévoit de passer à la vitesse supérieure et d’accélérer sa croissance inter-nationale et industrielle. Avec des robots de plus en plus sophistiqués grâce aux retours des demandes des clients, Naïo Technologies poursuit sur le chemin de la croissance.
32 MILLIONS POUR GRANDIR
14 millions d’euros avaient été levés il y a trois ans via un tour de table mené par Bpifrance et son fonds Écotechnologies. Aujourd’hui, l’entreprise Naïo Technologies a levé 32 millions auprès de Écotechnologies, Capagro, Demeter, Pymwymic & Codeman, sans oublier M Capital et la région Occitanie dont plus des 2/3 en fonds propres. Une étape indispensable pour ne pas se laisser dépasser par les concurrents qui émergent à l’étranger, en particulier en Allemagne ou aux États-Unis.
2 FOIS PLUS
Premier axe de travail, le partenariat avec Syselec et d’autres acteurs régionaux va aider à accélérer l’industrialisation des robots, car le carnet de commandes est bien rempli. L’objectif du doublement du nombre de ventes en deux ans est à présent tout à fait réalisable. Car il faut aller vite. Le marché de la robotique agricole est en plein essor et la concurrence frappe à la porte.
Aymeric Barthes et Gaétan Séverac sont heureux d’aller de l’avant après deux années de pandémie qui ont affecté l’activité, et une année 2022 sur les chapeaux de roue qui a déjà permis une première fois de doubler le chiffre d’affaires. La reconnaissance du travail est déjà en marche, même les Allemands le disent ! Quelle meilleure preuve de la réussite de Naïo Technologies, que le premier prix de la catégorie Machines et Ingénierie des « German Innovation Awards » attribué au robot Oz. Celui-ci est d’ailleurs la première vente de Naïo Technologies, il est également le moins cher, la gamme dé-marrant à 30 000 euros.
ROBOT AS A SERVICE : RAAS
Les clients ont aussi le choix de… ne pas acheter ! Une offre a été mise en place pour pénétrer le marché américain. Il s’agit d’une prestation de service intégrale, pour les agriculteurs et fermiers qui ne souhaitent pas investir ou gérer le matériel. Pas d’investissement de départ nécessaire ce qui est un critère important pour certains. L’Europe et les États-Unis font partie des priorités du futur, d’autant que les services maitrisés par les Oz, Ted, Orio et Jo ne cessent de se multiplier, avec semis, tonte, légumes, effeuillage et contrôle des maladies.
Claudio Flouvat