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L’incroyable essor de La Belle-Îloise


92 ans après sa fondation, la petite fille du fondateur multiplie les innovations et les boutiques de la petite conserverie de Quiberon.

Entreprendre - L’incroyable essor de La Belle-Îloise

La presque-île de Quiberon est un lieu de villégiature prisé des touristes, mais il est aujourd’hui connu pour sa conserverie de poisson, La Belle-Îloise. Une affaire comme il y en a beaucoup en France, une PME familiale qui approche sereinement de son centenaire. Née en 1932, elle est la seule encore active sur la presqu’île et résiste en dépit des aléas de la pêche. Son fondateur n’avait que 22 ans quand il l’a créée.

Georges Hilliet décide d’exploiter les retours de pêche, en mettant en conserve des sardines sitôt arrivées, sitôt travaillées, le tout à la main. Il se fait remarquer par la suite en refusant d’aller en grande distribution, ce qui le conduira à ouvrir sa première boutique fondée par une présentation également haut de gamme, en phase avec les exigences fixées par la direction.

65 MILLIONS D’EUROS

L’entreprise réalise 65 millions de chiffre d’affaires, dont 25% sur la sardine. Une dépendance dont elle tente de s’affranchir depuis plusieurs années. Ayant déjà introduit le maquereau et le thon blanc germon, la R&D s’est attelée à compléter l’offre de base avec de toutes nouvelles recettes originales. La direction a également tout récemment mené à bien sa première opération de croissance externe, pas très loin, sur Quiberon même. Il s’agit de La Quiberonnaise, elle aussi familiale et sans successeur, qui réalisait 1,8 million de chiffre d’affaires. Une grande différence existe cependant entre les deux entreprises. Si La Belle-Îloise est restée fidèle au principe fondateur de commercialisation en vente directe, La Quiberonnaise vend localement en supermarchés. Deux sociétés, deux approches pour l’avenir.

CAROLINE HILLIET LE BRANCHU, ÉCOLOGIE ET DIVERSIFICATION

Elle est aux commandes depuis 2011 après avoir passé quelques années à apprendre le métier auprès de son père, Georges fils, qui avait repris l’entreprise avec son frère Bernard. Mais elle a eu une autre vie auparavant. Diplômée de l’École de Commerce de Clermont-Ferrand, sa vie professionnelle a débuté chez IBM. Enfant, la petite Carole ne voulait pas reprendre cette boîte à sardines, mais l’enfance ne présage pas toujours de l’avenir. Vers 24-25 ans, elle se dit qu’il serait intéressant d’intégrer l’aventure, son père réfléchissant à la succession. La décision fut finalement prise. Et il n’y a pas de regret.

Aujourd’hui, la dirigeante est bien dans son poste et passionnée. Elle intègre dans l’entreprise son intérêt pour les questions écologiques, un élément d’autant plus important lorsque l’on évolue dans le monde de la pêche. La RSE fait partie intégrante de sa politique, via par exemple, des partenariats avec des bateaux locaux, un label « enseigne responsable » pour pêcher moins, mais pêcher mieux. Caroline Hilliet Le Branchu a souhaité faire de La Belle-Îloise une société officiellement labellisée « à mission » et a conduit à bien une diversification nécessaire afin de pérenniser la société en diminuant sa dépendance en allant vers de toutes nouvelles recettes où le poisson n’est pas l’ingrédient principal.

Un complément bienvenu lorsque la pêche est problématique pour les conserveries de poisson françaises comme ce fut le cas l’an dernier. Le choix a été fait d’aller vers des tartinables ou « cuillérables » pour pique-nique, sandwich ou apéritif. Du poisson, mais aussi des légumes, des algues, des épices, la R&D poursuit l’exploration de nouvelles pistes, et le rythme de lancement de nouvelles références est élevé pour une structure de ce type.

LE DÉFI DE LA GESTION DU PERSONNEL

Le recrutement, la fidélisation sont des défis pour chaque entreprise. À La Belle-Îloise, cela est un véritable métier. Les loyers sur place sont hors d’atteinte pour la main-d’œuvre saisonnière, il faut travailler lorsque le poisson frais débarque, ce qui n’est pas toujours le cas. Le personnel se voit donc parfois obligé de rester à la maison et de travailler plus lorsque le poisson arrive, une situation évidemment compliquée, notamment l’été. Ces éléments expliquent le prix de vente des produits, une leçon d’optimisme aussi qui démontre que d’autres voies existent. Un savoir-faire ancestral allié à un marketing agressif et proche des gens, contre vents et marées.

Anne Florin

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