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Luxe : l’incontournable eldorado chinois


La Chine est un marché incontournable et le luxe est le secteur le plus vigoureux de l’économie française. Le croisement de ces deux facteurs provoque une tendance naturelle des grands groupes, mais pas seulement, à chercher à s’implanter durablement dans cet immense pays.

Entreprendre - Luxe : l’incontournable eldorado chinois

On ne peut résumer la France à la gastronomie, la mode ou les cosmétiques, mais force est de reconnaître que lorsque le groupe LVMH s’enrhume, la Bourse de Paris tousse.

Les grandes marques françaises du luxe sont internationales, pourtant la pandémie a prouvé que sans la Chine, elles auraient bien plus souffert. Les clients chinois ont poursuivi leurs achats sur place, ne pouvant se déplacer en France. Depuis, les ventes digitales sont devenues un axe incontournable. LVMH travaille d’ailleurs en partenariat avec Alibaba, le géant de l’e-commerce.

La Chine est en train de supplanter les États-Unis en tant qu’eldorado du luxe.

L’argument des chiffres

C’est en Chine que l’on trouve le plus grand nombre de milliardaires au monde, avec 753 recensés en 2023, attirés notamment par la bijouterie et la mode. Le pays est également le deuxième marché mondial de la beauté.

Si l’âge moyen de ces milliardaires est de 61 ans, la moyenne d’âge de la clientèle du luxe est de 25 ans. Cette génération jeune, très digitalisée, recherche des produits de luxe abordables et représente un potentiel énorme.

Et s’il est vrai que la démographie chinoise est en berne, le pays compte plus d’enfants en bas âge que la population totale de la France, soit environ 80 millions.

L’axe stratégique de la communication

TikTok et Douyin permettent d’atteindre entre 600 et 800 millions de Chinois. Red est moins populaire mais regroupe 100 millions d’utilisateurs, principalement jeunes et féminins. Les influenceurs sont également un canal clé pour capter cette audience.

Au-delà de la communication pure, le patrimoine et la valeur historique des marques restent des atouts majeurs. Face à la crise économique, les consommateurs ont continué à privilégier des maisons comme Hermès, Dior, Vuitton ou Cartier, mais aussi des marques plus récentes ayant su asseoir leur réputation grâce à une histoire à raconter et des origines valorisées.

Prendre conscience des dangers

Les aléas géopolitiques, douaniers et juridiques sont cités par les entrepreneurs comme des facteurs de complexité. L’ouverture ou la fermeture du marché et les tensions autour de Taïwan peuvent bouleverser l’environnement du jour au lendemain.

Autre difficulté, la rapidité avec laquelle évoluent les attentes des consommateurs en fonction des tendances sur les réseaux sociaux.

Trois créateurs français en Chine

Laurent Taisne, fondateur de Totemist

Sa vie professionnelle oscille entre Shanghai et Paris. Après une carrière chez L’Oréal, ce physicien-chimiste décide de lancer en 2021 son projet Totemist, une marque de rouges à lèvres connectés baptisée YiZhiJi.

Rechargeable, le boîtier permet d’intégrer des contenus vidéos, photos et audio, transformant ce produit de beauté en un cadeau unique et personnalisé. Plus d’un an de conception a été nécessaire pour développer cette innovation qui doit également être lancée en France.

La technologie intégrée au monde de la cosmétique séduit les jeunes, tout comme l’IA, la réalité augmentée, la réalité virtuelle et le métavers.

« Le marché chinois et ses consommateurs sont très au fait de la technologie, rapides et pragmatiques. »

Natacha Tarascon, fondatrice de Doucéa

Docteure en pharmacie originaire de Montpellier et spécialiste de la dermo-cosmétique, elle s’expatrie en Chine où elle crée en 2019 sa marque Doucéa, spécialisée dans les soins naturels pour enfants sur le segment premium.

La marque arrive en France, avec une fabrication répartie entre les deux pays et des formules adaptées aux attentes locales en matière de texture et de prix.

Entreprendre en Chine signifie respecter une réglementation complexe et en constante évolution, mais le marché infantile y est porteur.

« En reformulant et premiumisant notre marque en Chine, nous répondons aux attentes du marché. Avec les contraintes économiques, les parents chinois reportent naturellement leurs achats sur les besoins de leurs enfants. Il convient aussi de s’entourer d’experts et de comptables sérieux dès le départ. »

Laurent Cibot, fondateur de P.M. Cibot

Installé en Chine depuis une vingtaine d’années, il est expert en beauté, parfumerie et botanique locale. Il vient de lancer sa propre marque en s’appuyant sur l’histoire de son aïeul, Pierre Martial Cibot, qui a vécu à la cour de l’empereur de Chine il y a deux siècles.

Comme partout, atteindre le succès passe par le respect des spécificités culturelles et la maîtrise des cadres réglementaires.

« Il faut de la persévérance, une vraie capacité d’adaptation et une excellente préparation… Mais le réseau personnel sur place est souvent aussi important que le produit. »

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