Loin des géants généralistes comme Amazon ou Cdiscount, de nouveaux acteurs du e-commerce adaptent le modèle des places de marché spécifiques à des secteurs plus restreints. Et ça marche !
Le principe d’une place de marché est simple : il s’agit d’un site de e-commerce proposant les offres d’une multitude de vendeurs. Selon Benoît Feron, cofondateur et responsable des ventes de Izberg, éditeur d’une solution de création de place de marché, l’intérêt est de proposer un éventail de produits le plus large possible sur une plateforme en ligne unique, accessible depuis n’importe quel terminal fixe ou mobile.
«Le succès d’Amazon, avec son offre pléthorique et diversifiée, montre que le consommateur reste fidèle s’il peut regrouper tous ses achats sur une même plateforme. Cela lui évite de constamment avoir à comparer les prix, de passer d’un site à l’autre en fonction des catégories qui l’intéressent… Il peut également renvoyer et se faire rembourser un produit commandé qui ne lui convient pas».
Et le succès est là ! «En France, le chiffre d’affaires e-commerce a progressé de 14% en 2015 par rapport à 2014, dans un contexte de consommation toujours ralentie, se situant à 64,9 Mds€*. Les place de marché occupent une place de plus en plus importante, représentant 9% des ventes de produits en ligne en 2015. On estime à plus de 3 Mds€ le volume d’affaires réalisé via les marketplaces. En 2016, les ventes via ce canal ont augmenté de 15% entre les 3èmes trimestres 2015 et 2016», détaille Benoît Féron.
Intéressant pour les vendeurs
Les marchands, de taille très variable, souvent des PME, voire des TPE, peuvent ainsi profiter de la puissance marketing de l’hôte, de sa visibilité et de son audience. Selon Amazon, leur présence sur la place de marché représente une augmentation des ventes de plus de 50%.
Des sites comme la FNAC ou Cdiscount annoncent plus de 10 millions de visiteurs uniques par mois et une place de marché spécialisée comme ManoMano compte plus de 600.000 clients. Des chiffres impossibles à atteindre pour un acteur indépendant. Le risque financier est relativement faible, puisqu’il ne faut payer à la place de marché qu’une commission sur les commandes effectives et non investir en marketing sans être certain de réaliser des ventes.
Et la visibilité est meilleure que celle, toujours aléatoire, obtenue via les moteurs de recherche. Attention cependant, chaque vendeur reste responsable de la logistique et du SAV. Sur les places de marché, le marchand n’a pas le droit à l’erreur. Les notes et avis clients descendront les marques qui ne sont pas parfaites. Il faut éviter les litiges, les retards, les ruptures, les erreurs, les délais de réponse trop longs…
Vers plus de spécialisation
Les premières places de marché sont nées de la diversification de gros sites de vente en ligne à la recherche de rentabilité, à l’exemple d’Amazon. Pour Greg Zemor, fondateur de Neteven, éditeur de solutions permettant aux marchands de se connecter sur les différentes marketplaces, il s’agit d’une véritable tendance de fond, qui concerne l’ensemble des acteurs et des secteurs de la distribution.
«L’importance du modèle des places de marché se confirme. Après les pure-players tels que La Redoute, Rue du Commerce, Menlook, Privalia… c’est au tour des enseignes traditionnelles d’adosser à leur stratégie e-commerce une marketplace. Carrefour, la Fnac, Darty ou encore Auchan s’y sont déjà mis. Aujourd’hui, c’est au tour d’Intermarché d’élargir son offre en permettant à des vendeurs tiers de proposer leurs produits sur le site du groupe. En se concentrant sur le non-alimentaire dans un premier temps, il est fort probable que ces marketplaces ouvrent d’autres univers comme le montre l’annonce récente de la place de marché de Pernod Ricard sur le champagne et les spiritueux». Mais, face aux géants généralistes, une nouvelle tendance se fait jour : la spécialisation.
Le parcours de ManoMano, lancé en 2012 par Christian Raison et Philippe de Chanville sous le nom de MonEchelle.fr a de quoi faire rêver : 1 M€ de CA en 2013, 15 M€ en 2014, 32 M€ en 2015 et près de 100 M€ en 2016 ! Pas mal pour un site de e-commerce spécialisé dans le bricolage et le jardinage, un marché de 30 Mds€ en France (et de 190 Mds€ en Europe), mais sur lequel les concurrents se nomment Castorama et Leroy Merlin d’un côté, Amazon de l’autre.
Ce succès, c’est celui d’une place de marché sur un segment bien défini, fédérant plus de 500 vendeurs et proposant plus de 600.000 références. Un succès qui n’est qu’une étape, avec l’ouverture de pays comme l’Espagne, l’Italie et le Royaume-Uni. «L’enjeu est de devenir leader européen, car les marges sont faibles. C’est un jeu de volumes», explique Philippe de Chanville. Un jeu, certes… mais qui peut faire rêver tous les entrepreneurs, de plus en plus nombreux, qui souhaitent reproduire le modèle.
* Source FEVAD