Mourad Boudjellal, fondateur des éditions Soleil a réussi, et il garde tout son franc-parler. À 53 ans, la figure incontournable du rugby français, président du RC Toulon, reste fasciné par la réussite mais déplore que l’école ne forme pas davantage les jeunes aux réalités de l’entreprise. Mourad Boudjellal est candidat En marche aux élections législatives (1ère circonscription du Var).
Entreprendre :
Vous êtes l’homme qui a révolutionné le rugby pro. À Toulon, le RCT est devenu une entreprise à part entière…
Mourad Boudjellal :
L’important était de réussir quelque chose d’incroyable et de construire à partir de ce qui existait. Réussir quelque chose d’incroyable consistait à faire venir les meilleurs joueurs du monde. Comment j’ai réussi à faire venir ces joueurs ? Je pense que j’ai eu de la chance, j’ai envoyé le bon mail au bon moment. Il y a toujours une part de chance, la chance vous sourit parfois sans réellement savoir pourquoi.
Pour moi, le RCT est une marque qui correspond à une certaine logique, à une certaine façon de voir les choses et de vivre. Une marque qui correspondant à une certaine forme de rêve, à un objectif qui tente de faire vivre un rêve. Lorsqu’on est éditeur, on fait des livres pour faire rêver les gens ; quand on à une entreprise, on fait des produits qui vont faire rêver pour créer un engouement auprès du public.
Entreprendre :
C’était votre rêve de jeunesse ?
Mourad Boudjellal :
Quand j’étais gamin, je voulais être éditeur. Mais à l’école, on ne m’a pas appris ce qu’était une entreprise. On m’a enseigné plein de trucs, notamment à tracer des fonctions, mais tout ceci ne me sert à rien aujourd’hui. Un jour, je me suis retrouvé à créer mon entreprise en ayant d’énormes lacunes car cela ne faisait pas partie de la culture scolaire que j’avais reçue. Pourtant, il me paraît important d’avoir des bases et ces bases on ne me les a pas du tout données à l’école. Je n’ai pas fait de longues études, mais j’ai quand même fait un bac+1. J’estime qu’au niveau du bac, on devrait avoir quelques notions de l’entreprise. A mon époque, on n’en parlait pas du tout, cela ne faisait pas partie du cursus. J’ai donc monté une société sans même en connaître précisément tous les tenants et aboutissants.
Entreprendre :
En 2006, vous déclariez à Libération ne vouloir rester qu’un ou deux ans dans le rugby. Vous êtes toujours là. Que s’est-il passé ?
Mourad Boudjellal :
Tout fonctionnait bien dans l’édition, j’avais réussi aux Etats-Unis et je me suis associé avec Gallimard, une association qui permettait une reconnaissance absolue dans le secteur de l’édition. J’avais réussi beaucoup de choses qui semblaient impossibles. Au départ, je pensais récupérer le RCT pour un an, je n’avais rien d’autre de programmé. J’ai donc décidé de quitter provisoirement le chemin de l’édition pour une autre destination. Reprendre le RCT était un challenge, je souhaitais voir comment j’allais m’en sortir.
Entreprendre :
Vous êtes quand-même précoce ! À 15 ans, vous organisez un festival de la BD, à 20 ans vous ouvrez une librairie avant de devenir propriétaire des éditions Soleil à 30. D’où vient cette passion pour l’édition et plus particulièrement pour la BD ? Pourquoi avoir cédé cette activité en 2011 ?
Mourad Boudjellal :
Je ne m’en suis jamais vanté, je faisais toujours celui qui ne connaissait pas l’édition. A travers les discussions, les gens se rendaient compte que je connaissais mieux qu’eux le sujet. Il est inutile de se mettre en avant tout le temps et de prétendre que l’on a des valeurs, je trouve cela stupide. Brassens disait : « Je ne montre mon cul qu’à mes maîtresses et à mes médecins ». Quand on a un peu de pudeur, on ne parle pas de valeurs. Ce n’est pas quelque chose dont on parle, c’est quelque chose que l’on démontre au quotidien. En parler signifie que l’on a besoin de se justifier et de prouver que l’on a des valeurs.