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Pétrole Hahn peut se faire des cheveux


Les difficultés financières actuelles du groupe rémois témoignent de la nécessité pour le gouvernement de poursuivre sa politique de l’offre, tant nos PMI souffrent dans leur ensemble d’insuffisances de fonds propres.

Didier Martin, actionnaire majoritaire et président du groupe Eugène Perma

Eugène Perma, PME de 290 salariés, 84 millions d’euros de chiffre d’affaires, fondée en 1919 et érigée souvent en modèle de redéploiement industriel, avait tout pour plaire. Marques connues (Pétrole Hahn, Kéranove, Solaris ou Eugène Color), relocalisation en 2009 sur un territoire, Reims, largement centré sur un produit emblématique ô combien le Champagne, un dirigeant entreprenant, Didier Martin, ex-dirigeant de 67 ans, qui avait osé racheter Eugène Perma en 1998 à Procter & Gamble, au prix d’une acrobatie financière assez risquée. En 2007, il s’était placé en procédure de sauvegarde. Un montage qui n’aura pas passé les soubresauts du marché et surtout du bon vouloir du fonds américain Bear Stearns qui exigera brutalement en 2007 le remboursement immédiat d’une importante échéance de 17 millions d’euros. Grâce à un accord de refinancement avec un autre fonds, l’aventure put se perpétuer. D’autant que la stratégie ne manquait pas d’ambition. Le PDG avait même entrepris d’élargir le portefeuille avec le rachat de la marque de soins et d’épilation, les laboratoires Laurence Dumont (situés à Agen) pour mieux asseoir son poids auprès de la grande distribution.

Un marché de plus en plus concurrencé où seules des marques indépendantes comme la marque provençale le Petit Olivier arrivent encore à percer en s’appuyant sur un marketing fortement identifié.

Trop daté, Pétrole Hahn n’a pas su se démarquer. La notoriété ne suffit plus, voyez les difficultés de la relance des savons Lux. Peut-être aurait-il fallu devoir aussi viser un créneau plus qualitatif et haut-de-gamme ? L’avenir reste ouvert, l’export est à développer (moins de 30 % du CA actuel).

Les difficultés financières du groupe rémois résultent aussi de son manque criant de fonds propres, un mal endémique de nos industriels.

Il serait temps qu’on arrête, à ce sujet, de ponctionner autant nos entrepreneurs et nos entreprises. Le signal d’un éventuel étalement sur 4 ans de la baisse de 4 milliards d’euros promise en 2024 sur les impôts de production serait désastreux à l’adresse de nos industriels pour le gouvernement d’Elisabeth Borne et de son ministre Bruno Le Maire. Le président du Medef, Patrick Martin, semble vigilant sur le sujet. Nous le sommes aussi.

Les difficultés d’une PMI comme Eugène Perma l’illustrent à merveille. Répétons-le, la réindustrialisation est un objectif à long terme qui exige patience et stabilité de l’environnement tant fiscal que réglementaire.

Concernant le sauvetage d’Eugene Perma et de ses fleurons, il faut souhaiter qu’un groupe cosmétique tricolore à l’image de Clarins (famille Courtin), Caudalie, Nuxe (Aliza Jabès), Yves Rocher, voire L’Occitane ou L’Oréal, se positionne sur une telle reprise. Placé en redressement judiciaire devant le tribunal de commerce de Paris, les candidats ont jusqu’au 4 septembre avant qu’Eugène Perma ne soit éventuellement récupéré par un fonds anglo-saxon. L’aubaine serait vraiment trop belle.

Robert Lafont

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